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28/12/2010 | FRANCE | N°344434

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 28 décembre 2010, 344434


Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Isata A, agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses deux enfants, Saliou B et Ahmed B, demeurant ... ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite du consul général de France à Bamako (Mali) refusant de délivrer un visa de long séjour au titre d'un regroupement familial

à ses deux enfants ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangère...

Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Isata A, agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses deux enfants, Saliou B et Ahmed B, demeurant ... ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite du consul général de France à Bamako (Mali) refusant de délivrer un visa de long séjour au titre d'un regroupement familial à ses deux enfants ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères et européennes et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de réexaminer les demandes de visas et de délivrer ceux-ci dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision du juge des référés, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que la condition d'urgence est satisfaite compte tenu de l'âge de ses enfants et du fait qu'elle en est séparée depuis six ans ; qu'il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ; que cette décision n'est pas motivée ; que la décision est entachée d'erreur de droit, dès lors que la seule constatation de l'inauthenticité des actes d'état civil est insuffisante pour refuser la délivrance des visas ; que cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que les irrégularités mentionnées sont la conséquence de la délivrance des actes d'état-civil à un tiers ; que, compte tenu des liens entretenus avec ses fils, attestés par les pièces qu'elle produit, la possession d'état est établie ; qu'elle n'a pas été en mesure de justifier par tous moyens de la filiation maternelle ; qu'elle leur envoie régulièrement de l'argent, par des versements en espèces remis à des tiers, ainsi que des colis ; que la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant le droit de mener une vie familiale normale ainsi que celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la copie du recours enregistré le 11 février 2010 présenté par Mme A à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu la copie de la requête en annulation présentée par Mme A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2010, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le juge des référés n'est pas compétent pour enjoindre à l'administration de délivrer les visas sollicités ; que la condition d'urgence n'est pas satisfaite du seul fait de la durée de séparation avec ses enfants allégués ; que le recours en suspension a été enregistré plus de huit mois après le dépôt de son recours en annulation ; qu'elle n'a pas sollicité de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France la communication des motifs du rejet implicite de sa demande de visa ; que les actes de naissance des deux enfants comportent de nombreuses irrégularités ; que les versements d'argent à ses enfants dont Mme A se prévaut ont été effectués après la saisine de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; qu'aucun des éléments produits n'atteste que Mme A aurait participé à l'entretien des deux enfants depuis son entrée en France en 2004 ; que les documents produits n'attestent pas de la fréquence des relations téléphoniques alléguées ; que les témoignages émanent majoritairement de personnes qui ne connaissent pas les enfants ; que les photographies versées au dossier ne permettent pas d'attester du lien de filiation allégué ; qu'en raison de l'absence de preuve du lien de filiation, la décision contestée ne viole ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme A et, d'autre part, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 23 décembre 2010 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Vexliard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A ;

- Mme A ;

- les représentants du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. ;

Considérant que Mme A, de nationalité sierra léonaise, entrée en France en 2004 et à qui la commission des recours des réfugiés a reconnu la qualité de réfugié par une décision du 9 mars 2005, demande la suspension de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision des autorités consulaires françaises à Bamako (Mali) rejetant sa demande de visas de long séjour pour Saliou B et Ahmed B, nés respectivement les 22 mai 1995 et 16 janvier 2001, dont elle allègue être la mère ;

Considérant que la décision de la commission s'étant substituée à celle des autorités consulaires, le moyen tiré de ce que la décision de celles-ci n'a pas été motivée est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les actes de naissance produits pour les deux enfants présentent de nombreuses irrégularités, ce que la requérante ne conteste d'ailleurs pas ; que s'agissant de l'enfant Ahmed B, les débats lors de l'audience publique n'ont pas permis de comprendre comment cet enfant, dont le père n'a pas quitté la Guinée, serait, selon les déclarations de la requérante, né en Côte d'Ivoire dix mois après le départ de sa mère de Guinée ; que ni les pièces produites par Mme A, relatives aux versements d'argent et envois de colis à ses enfants, ni les témoignages communiqués, ne sont de nature à établir qu'elle aurait été en relation fréquente avec les deux enfants et contribuerait à leur entretien ; qu'ainsi, le lien de filiation ne pouvant être regardé comme établi, les moyens tirés de ce que la décision contestée serait entachée d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation et de violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ne sont pas, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ;

Considérant que, par suite, et sans qu'il soit besoin de rechercher si la condition d'urgence est en l'espèce satisfaite, les conclusions tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite de la commission ne peuvent être accueillies ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions à fin d'injonction et de celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Isata A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 344434
Date de la décision : 28/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2010, n° 344434
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Christnacht
Rapporteur ?: M. Alain Christnacht
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU ; SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:344434.20101228
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