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24/01/2011 | FRANCE | N°308367

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 24 janvier 2011, 308367


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août et 5 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Frédéric A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 5 juin 2007 de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions tendant à l'annulation du jugement du 9 décembre 2004 du tribunal administratif de Lille rejetant leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il

s ont été assujettis au titre des années 1998 à 2000 et des pénalités ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août et 5 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Frédéric A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 5 juin 2007 de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions tendant à l'annulation du jugement du 9 décembre 2004 du tribunal administratif de Lille rejetant leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998 à 2000 et des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. et Mme A,

- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. et Mme A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A, qui exploitait un commerce de vente de meubles, n'a pas souscrit, malgré une mise en demeure, de déclaration de résultats au titre des exercices clos en 1998 et 1999 et s'est ainsi placée en situation de voir ses bénéfices commerciaux évalués d'office ; qu'à l'issue d'une première vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1997 au 30 septembre 2000, ces bénéfices ont été fixés à la somme de 308 143 francs pour l'exercice clos en 1998 et de 822 915 francs pour l'exercice clos en 1999 ; qu'une seconde vérification de comptabilité a porté sur la période du 1er janvier 2000 au 30 avril 2001 ; que les bénéfices industriels et commerciaux de l'exercice clos en 2000 de Mme A ont été imposés conformément aux déclarations de la contribuable, l'administration mettant uniquement à la charge de M. et Mme A la majoration de 10 % prévue pour retard de déclaration ; que les intéressés se pourvoient en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 5 juin 2007 en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998 à 2000, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur les impositions établies au titre des années 1998 et 1999 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 60-3 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : L'avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le litige relatif aux impositions mises à la charge des contribuables au titre des années 1998, 1999 et 2000 a été soumis à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, toutefois, les dispositions de l'article R. 60-3, dont il résulte que l'administration ne peut mettre régulièrement en recouvrement une imposition sur laquelle un avis a été émis par la commission départementale sans qu'au préalable cet avis ait effectivement été notifié par ses soins au contribuable, ne sont applicables que dans les cas dans lesquels la loi a prévu la saisine de cette commission ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales que la procédure de redressement contradictoire n'est pas applicable dans les cas d'évaluation d'office des bases d'imposition ; que, par suite, le litige relatif aux cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ont été assujettis M. et Mme A selon la procédure d'évaluation d'office n'avait pas à être soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, s'agissant des revenus des années 1998 et 1999 ; que, dès lors, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que les impositions établies au titres de ces deux années aient été mises en recouvrement avant la notification aux contribuables de l'avis de la commission départementale n'affectait pas la régularité de la procédure d'imposition ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait dénaturé les faits en affirmant que la commission départementale n'avait pas eu à se prononcer sur le bénéfice imposable des exercices clos en 1998 et 1999, qui est relatif à un motif surabondant de l'arrêt attaqué, est en tout état de cause inopérant ;

Sur les impositions établies au titre de l'année 2000 :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les bénéfices commerciaux de l'exercice clos en 2000 et le revenu global de M. et Mme A au titre de l'année 2000 ont été imposés conformément aux déclarations des contribuables ; qu'ainsi, les impositions correspondantes ne procèdent d'aucune des vérifications de comptabilité dont a fait l'objet l'activité commerciale de Mme A ; que l'irrégularité de ces vérifications, à la supposer établie, n'était, dès lors, pas de nature à affecter la régularité des impositions établies au titre de l'année 2000, alors même que les contribuables n'avaient pas été imposés selon la procédure d'évaluation d'office ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en rejetant comme inopérant le moyen tiré de la violation de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...). L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ; que lorsque les bénéfices industriels et commerciaux ont été évalués d'office au titre d'une année, après que l'administration a écarté la comptabilité, et que la reconstitution extra-comptable à laquelle elle a procédé a conduit l'administration à fonder l'imposition sur l'évaluation du niveau de certains postes de bilan, elle ne peut, saisie d'une réclamation portant sur l'année suivante, refuser de tenir compte des valeurs qu'elle a établies pour corriger les postes de bilan concernés au bilan d'ouverture de l'exercice sur lequel porte cette réclamation ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour évaluer le bénéfice imposable de l'activité commerciale de Mme A au titre de l'exercice clos en 1999, l'administration a estimé la valeur des stocks en fin d'exercice à la somme de 1 317 933 francs alors que ces mêmes stocks étaient inscrits au bilan d'ouverture de l'exercice 2000 dans la comptabilité de Mme A pour la somme de 936 682 francs ; que l'administration a rejeté la réclamation des contribuables portant sur l'exercice 2000 et tendant à la prise en compte de la valeur des stocks retenue par l'administration pour la fin de l'exercice 1999 ; qu'en jugeant que l'administration avait ainsi à bon droit rejeté la demande de M. et Mme A tendant à la révision de leurs bases d'imposition au titre de l'année 2000 dès lors les contribuables n'établissaient pas l'existence d'une erreur comptable affectant la valorisation des stocks inscrits au bilan d'ouverture de l'exercice 2000 selon leurs propres déclarations, la cour a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant seulement qu'il s'est prononcé sur leurs conclusions tendant à la réduction de leur imposition au titre de l'année 2000 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme A d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 5 juin 2007 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. et Mme A tendant à la réduction de leur impôt sur le revenu au titre de l'année 2000.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. et Mme A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. et Mme A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Frédéric A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 308367
Date de la décision : 24/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jan. 2011, n° 308367
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Matt
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : SCP LE BRET-DESACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:308367.20110124
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