La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/02/2011 | FRANCE | N°314096

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 16 février 2011, 314096


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mars et 10 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS, représenté par le président du conseil général ; le département demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'il a interjeté du jugement du 19 octobre 2006 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la délibération du 10 mai 2005 de la commission permanent

e de son conseil général attribuant une subvention de 12 000 euros à l'u...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mars et 10 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS, représenté par le président du conseil général ; le département demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'il a interjeté du jugement du 19 octobre 2006 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la délibération du 10 mai 2005 de la commission permanente de son conseil général attribuant une subvention de 12 000 euros à l'union départementale de la confédération générale du travail (CGT) pour l'organisation de son congrès à Bobigny du 15 au 17 juin 2005 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 et la décision du Conseil constitutionnel n° 2001-455 DC en date du 12 janvier 2002 ;

Vu le décret n° 2005-849 du 25 juillet 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération du 10 mai 2005, la commission permanente du conseil général de la Seine-Saint-Denis a accordé une subvention d'un montant de 12 000 euros à l'union départementale de la confédération générale du travail (CGT) pour l'organisation de son congrès, du 15 au 17 juin 2005, à Bobigny ; que cette délibération a été déférée par le préfet de la Seine-Saint-Denis au tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui, par un jugement du 19 octobre 2006, l'a annulée pour défaut d'intérêt départemental ; que le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 29 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'il a interjeté de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales : Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département. / Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d'intérêt départemental dont il est saisi (...) ;

Considérant qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Versailles s'est fondée, pour juger que l'organisation du congrès pour laquelle la délibération dont elle était saisie a octroyé une subvention du département ne présentait aucun intérêt public départemental, sur la seule circonstance qu'il n'était pas établi que ce congrès ait été l'occasion de manifestations ouvertes au public ; qu'en subordonnant ainsi la reconnaissance de l'intérêt public local d'une manifestation à son ouverture au public, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission permanente du conseil général de la Seine-Saint-Denis a, par une délibération du 6 mars 2007, autorisé le président du conseil général à interjeter appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 19 octobre 2006, régularisant ainsi la requête enregistrée antérieurement au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles ; que la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Seine-Saint-Denis à la requête du département doit, par suite, être écartée ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3231-3-1 du code général des collectivités territoriales : Les départements peuvent attribuer des subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales représentatives dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Les organisations ainsi subventionnées sont tenues de présenter au conseil général un rapport détaillant l'utilisation de la subvention ; qu'il résulte de ces dispositions qui, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, étaient applicables même en l'absence de texte réglementaire précisant leurs modalités de mise en oeuvre, qu'un département peut légalement accorder des subventions aux structures départementales des organisations syndicales qui, en vertu des textes qui leur sont applicables, doivent être regardées comme représentatives au niveau national, au niveau local ou encore dans une branche d'activité ou au sein d'une profession, dès lors que ces subventions ont pour objet de contribuer au financement du fonctionnement courant des organisations syndicales ou d'une ou plusieurs activités particulières qui en relèvent ; qu'un département ne saurait toutefois accorder des subventions pour des motifs politiques ou pour apporter un soutien à l'une des parties dans un conflit collectif du travail, ni traiter inégalement des structures locales également éligibles à son aide ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la subvention litigieuse a été accordée pour l'organisation à Bobigny du congrès de l'union départementale de la confédération générale du travail (CGT), qui est au nombre des organisations syndicales représentatives visées par les dispositions de l'article L. 3231-3-1 du code général des collectivités territoriales ; que, eu égard à son objet, qui relève du fonctionnement courant d'un syndicat, elle constitue une subvention de fonctionnement au sens des mêmes dispositions du code général des collectivités territoriales ; qu'il n'est pas allégué que le département aurait décidé d'accorder cette subvention pour des motifs politiques ou pour apporter un soutien à l'une des parties dans un conflit collectif du travail, ni qu'il aurait méconnu le principe d'égalité ; qu'ainsi, la subvention litigieuse, dont la légalité n'avait pas à être appréciée au regard des dispositions des articles L. 1111-2 et L. 3211-1 du même code, qui ne trouvent à s'appliquer qu'en l'absence de dispositions législatives spéciales autorisant expressément le département à accorder des concours financiers, était de celles que les départements peuvent légalement attribuer en vertu de l'article L. 3231-3-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a accueilli, pour annuler la délibération du 10 mai 2005 de la commission permanente de son conseil général, le moyen tiré du défaut d'intérêt public départemental de la subvention litigieuse au regard de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant que le préfet de la Seine-Saint-Denis ne soulève pas d'autre moyen que celui tiré du défaut d'intérêt départemental de la subvention litigieuse ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la délibération du 10 mai 2005 de la commission permanente de son conseil général ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement au DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 29 novembre 2007 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 19 octobre 2006 est annulé.

Article 3 : Le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros au DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DE LA SEINE-SAINT-DENIS et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 314096
Date de la décision : 16/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 fév. 2011, n° 314096
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Rapporteur public ?: M. Geffray Edouard
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:314096.20110216
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award