La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2011 | FRANCE | N°345288

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 02 mars 2011, 345288


Vu l'ordonnance n° 0701697 du 6 décembre 2010, enregistrée le 24 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de la SOCIETE MANIRYS, tendant à la décharge des droits et pénalités qui lui ont été assignés au titre du prélèvement spécial prévu par l'article 235 ter MB du code général des impôts pour les années 1999, 2000 et 2001, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novem

bre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux...

Vu l'ordonnance n° 0701697 du 6 décembre 2010, enregistrée le 24 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de la SOCIETE MANIRYS, tendant à la décharge des droits et pénalités qui lui ont été assignés au titre du prélèvement spécial prévu par l'article 235 ter MB du code général des impôts pour les années 1999, 2000 et 2001, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, de l'article 235 ter MB du code général des impôts ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 octobre 2010 au greffe du tribunal administratif de Paris, présenté par la SOCIETE MANIRYS, représentée par Me Gérald Ayache, mandataire judiciaire et dont le siège social est 1 rue de Sèze à Paris (75009), en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu l'article 235 ter MB du code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 235 ter L, transféré à l'article 1605 sexies du code général des impôts : " Un prélèvement spécial de 33 % est perçu sur la fraction des bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu qui résulte de la production, de la distribution ou de la représentation de films pornographiques ou d'incitation à la violence " ; qu'aux termes de l'article 235 ter MB du même code : " Le prélèvement spécial prévu à l'article 235 ter L s'applique également aux bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés réalisés par les établissements mentionnés au 4° de l'article 279 bis " ; que l'article 279 bis du même code prévoit : " Le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée ne s'applique pas : (...) / 4° aux prestations de services ainsi qu'aux livraisons de biens réalisées dans les établissements dont l'accès est interdit aux mineurs en raison de leur caractère licencieux ou pornographique, soit en application de l'ordonnance n° 59-28 du 5 janvier 1959 réglementant l'accès des mineurs à certains établissements, soit en vertu des pouvoirs de police que le maire et le représentant de l'Etat dans le département tiennent des articles L. 2212-2, L. 2212-3 et L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales " ;

Considérant, d'une part, qu'en assujettissant les établissements interdits aux mineurs en raison de leur caractère licencieux ou pornographique au prélèvement spécial prévu à l'article 235 ter MB du code général des impôts, le législateur a entendu lutter contre la multiplication de ces lieux de vente et de rencontre à caractère pornographique ; que les dispositions contestées, qui, contrairement à ce qui est soutenu par la société requérante, sont en rapport avec l'objectif poursuivi, comportent des mesures qui n'ont ni pour objet d'interdire une activité ni de la soumettre à autorisation préalable, mais seulement de limiter, par un prélèvement fiscal qui ne présente aucun caractère confiscatoire, les bénéfices liés à l'exploitation des lieux de vente et de rencontre à caractère pornographique qu'elles visent ; qu'elles sont ainsi propres à assurer une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre le principe de liberté d'entreprendre et l'objectif d'intérêt général qu'elles poursuivent ;

Considérant, d'autre part, que si la libre concurrence peut être une exigence, notamment pour garantir le respect du principe d'égalité ou de la liberté d'entreprendre, elle n'est pas, en elle-même, au nombre des droits et libertés garantis par la Constitution au sens des dispositions précitées ;

Considérant, par suite, que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal administratif de Paris.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MANIRYS et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au tribunal administratif de Paris.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 02 mar. 2011, n° 345288
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi
Rapporteur public ?: M. Geffray Edouard

Origine de la décision
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Date de la décision : 02/03/2011
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 345288
Numéro NOR : CETATEXT000023663323 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-03-02;345288 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award