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14/03/2011 | FRANCE | N°308167

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 14 mars 2011, 308167


Vu l'ordonnance n° 07NT00382 du 2 août 2007, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 3 août 2007, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de M. Pascal A ;

Vu le pourvoi, enregistré le 13 février 2007 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présenté pour M. Pascal A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0405355 du 21 décembre 2006 par lequel le trib

unal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnatio...

Vu l'ordonnance n° 07NT00382 du 2 août 2007, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 3 août 2007, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de M. Pascal A ;

Vu le pourvoi, enregistré le 13 février 2007 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présenté pour M. Pascal A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0405355 du 21 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 75 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision du directeur du centre de détention de Nantes le plaçant, à titre préventif, en cellule disciplinaire ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Berriat, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Spinosi, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Spinosi, avocat de M. A ;

Considérant qu'aux termes de l'article D. 249-2 du code de procédure pénale, alors en vigueur : Constitue une faute disciplinaire du deuxième degré le fait, pour un détenu : (...) 6° De refuser de se soumettre à une mesure de sécurité définie par les règlements et instructions de service (...) ; que selon l'article D. 249-3 du même code : Constitue une faute disciplinaire du troisième degré le fait, pour un détenu : (...) 4° De refuser d'obtempérer aux injonctions des membres du personnel de l'établissement (...) ; que l'article D. 250-3 de ce code prévoit que Le chef d'établissement ou un membre du personnel ayant reçu délégation écrite à cet effet peut, à titre préventif et sans attendre la réunion de la commission de discipline, décider le placement du détenu dans une cellule disciplinaire si les faits constituent une faute du premier ou du deuxième degré et si la mesure est l'unique moyen de mettre fin à la faute ou de préserver l'ordre à l'intérieur de l'établissement. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, alors détenu au centre pénitentiaire de Nantes, a refusé d'occuper une cellule qui lui avait été attribuée par une décision prise dans le cadre de changements d'affectation ; qu'il a, pour ce motif, fait l'objet d'un placement préventif en cellule disciplinaire en application de l'article D. 250-3 du code de procédure pénale, mais n'a ensuite pas été sanctionné ; que, pour juger que M. A avait commis une faute disciplinaire relevant du 6° de l'article D. 249-2 de ce code, le tribunal administratif de Nantes a jugé qu'en refusant d'intégrer la cellule qui lui était affectée, l'intéressé avait refusé de se soumettre à une mesure de sécurité ; qu'en s'abstenant ainsi de caractériser les éléments permettant de déterminer, au vu notamment du contexte dans lequel ce refus est intervenu, s'il pouvait être regardé comme un refus de se soumettre à une mesure de sécurité définie par les règlements et instructions de service, au sens de cette disposition, alors que, selon l'article D. 249-3 du même code, le refus d'obtempérer aux injonctions des membres du personnel de l'établissement n'est qu'une faute disciplinaire du troisième degré ne permettant pas au chef d'établissement d'appliquer l'article D. 250-3 de ce code, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, dès lors, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il n'est ni établi ni même allégué que le changement d'affectation de M. A aurait été fondé, même partiellement, sur un motif de sécurité ; qu'il ne ressort ni du rapport d'incident élaboré, peu après sa survenance, par les services pénitentiaires, ni d'aucune autre pièce du dossier que le refus, opposé par l'intéressé avant tout commencement d'exécution de la mesure, aurait été formulé dans des conditions ou circonstances qui auraient pu mettre en cause la sécurité de l'établissement ; qu'en refusant ainsi, non de se soumettre à une mesure de sécurité définie par les règlements et instructions de service, mais d'obtempérer aux injonctions des membres du personnel de l'établissement, M. A a commis une faute qui n'était pas susceptible de donner lieu au placement préventif en cellule disciplinaire en application des dispositions de l'article D. 249-3 du code de procédure pénale ; qu'il en résulte que le requérant est fondé à soutenir que cette décision de placement préventif en cellule disciplinaire prise par le chef d'établissement était entachée d'illégalité dont le caractère fautif doit, comme il le demande, donner lieu à réparation ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du montant de l'indemnité due à M. A en réparation de ses préjudices en condamnant l'Etat à lui verser à ce titre la somme de 75 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement n° 0405355 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. A la somme de 75 euros.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Pascal A et au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 308167
Date de la décision : 14/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 14 mar. 2011, n° 308167
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Anne Berriat
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:308167.20110314
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