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23/03/2011 | FRANCE | N°319911

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 23 mars 2011, 319911


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 20 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Arnaud A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 11 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 11 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du ministre de l'économie, des finances et l'industrie rejetant

sa demande d'indemnité du 29 juin 2000, d'autre part, de condamner l'...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 20 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Arnaud A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 11 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 11 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du ministre de l'économie, des finances et l'industrie rejetant sa demande d'indemnité du 29 juin 2000, d'autre part, de condamner l'Etat à lui payer une somme de 43 379 557 francs assortie des intérêts en réparation du préjudice financier, du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence résultant des comportements fautifs des services du ministère de la défense et de la Cour des comptes ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 11 octobre 2005 et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 943 596 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 février 2011, présentée pour M. A ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le décret n° 85-199 du 11 février 1985 ;

Vu la décision n° 195715 du 23 février 2000 du Conseil d'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Raphaël Chambon, Auditeur,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A et de la SCP Ancel, Couturier-Heller, Meier-Bourdeau, avocat du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A et à la SCP Ancel, Couturier-Heller, Meier-Bourdeau, avocat du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi,

Sur la responsabilité de l'Etat du fait de l'action des services du ministère de la défense :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêt attaqué comporte dans ses visas et dans ses motifs l'analyse du moyen suivant lequel la direction du commissariat de l'armée de terre aurait brutalement et illégalement écarté la société Labor Métal de toutes nouvelles commandes publiques ; qu'en réponse à ce moyen, la cour administrative d'appel, qui n'était pas tenue de mentionner l'ensemble des pièces invoquées par le requérant et sur lesquelles elle a fondé son appréciation, a relevé que si la cessation de toute relation commerciale avec les services du ministère de la défense était un fait avéré, le requérant n'établissait pas que des instructions auraient été données aux services du ministère de la défense afin de l'écarter de tout marché futur ; que dans son arrêt, qui est suffisamment motivé, la cour n'a pas dénaturé les éléments qui lui étaient soumis en ne considérant pas que les préconisations contenues dans un rapport daté du 22 juillet 1995, qui ne traitait pas directement de la question de savoir si le ministère de la défense devait ou non conclure de nouveaux marchés avec la société Labor Métal, et celles contenues dans une note du 30 août 1995, dont, en tout état de cause, rien n'indique qu'elles ont été suivies, permettaient d'établir l'existence de telles instructions ;

Considérant, en second lieu, qu'en réponse au moyen, précisément mentionné dans les visas et les motifs de l'arrêt attaqué, par lequel le requérant mettait en cause la responsabilité de l'Etat du fait des conséquences dommageables résultant de la divulgation à la presse, par les services du ministère de la défense, d'informations concernant la société Labor Métal, la cour a relevé notamment que M. A n'établissait pas que les services du ministère de la défense auraient été à l'origine de l'article incriminé ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé son arrêt, qui est exempt de dénaturation des faits ;

Sur la responsabilité de l'Etat du fait de l'exercice par la Cour des comptes de ses compétences :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si la lettre du procureur général près la Cour des comptes en date du 24 octobre 1996 fait état de ce que le ministre de la défense a sollicité l'avis de la Cour sur l'opportunité d'un protocole transactionnel entre le ministère de la défense et la société Labor Métal , le procureur général s'est borné, dans sa réponse à cette demande, à un rappel succinct des conséquences juridiques de la procédure de gestion de fait engagée ; que l'appréciation portée par la cour administrative d'appel sur la portée de la lettre du procureur général est exempte de dénaturation ; que, dès lors, en jugeant qu'alors même que la lettre du 24 octobre 1996 faisait suite à une demande d'avis qui n'est prévue par aucun texte, elle ne saurait révéler l'existence d'une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat, la cour n'a, en tout état de cause, pas entaché son arrêt, qui est suffisamment motivé sur ce point, d'une erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en se fondant sur l'absence de faute pour écarter l'existence d'une responsabilité de l'Etat en raison du caractère diffamatoire du rapport public de 1996, la cour administrative d'appel n'a, en tout état de cause et contrairement à ce qui est soutenu, pas subordonné l'engagement de la responsabilité de l'Etat à raison des mentions du rapport public de la Cour des comptes à l'existence d'une faute lourde ; que pour écarter l'existence d'une faute, la cour a relevé, par une appréciation exempte de dénaturation des pièces du dossier, qu'il ne résultait pas de l'instruction que les termes employés dans le rapport public de la Cour des comptes pour 1996 afin de qualifier les faits se rapportant aux relations entre certains services du commissariat de l'armée de terre et la société Labor Métal seraient inexacts ;

Considérant, enfin, que, dès lors que l'arrêt de la Cour des comptes qui avait illégalement statué sur la procédure de gestion de fait concernant la société Labor Metal a été annulé par la décision du Conseil d'Etat du 23 février 2000, la cour administrative d'appel a pu sans erreur de droit ni dénaturation des pièces du dossier qui lui était soumis écarter la responsabilité de l'Etat du fait de l'illégalité de la procédure de gestion de fait censurée par cette décision en se fondant sur l'absence de préjudice qu'aurait causé à lui seul l'arrêt susmentionné de la Cour des comptes ; qu'en écartant les conclusions à fin d'indemnisation présentées par le requérant à raison de l'activité juridictionnelle de la Cour des comptes, l'arrêt attaqué n'a pas méconnu l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'intéressé le versement à l'Etat de la somme de 3 000 euros en application des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.

Article 2 : M. A versera à l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Arnaud A, au ministre de la défense et des anciens combattants, à la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 319911
Date de la décision : 23/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 mar. 2011, n° 319911
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Maugüé
Rapporteur ?: M. Raphaël Chambon
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP ANCEL, COUTURIER-HELLER, MEIER-BOURDEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:319911.20110323
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