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28/03/2011 | FRANCE | N°319962

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 28 mars 2011, 319962


Vu le pourvoi, enregistré le 21 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI demande au Conseil d'Etat :

1) d'annuler le jugement n°0600145 du 12 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a, d'une part, annulé, à la demande de M. Mario A, la décision du 7 décembre 2005 de la direction générale des douanes et des droits indirects lui accordant un versement prorata temporis de la troisième fraction de l'indemnité d'él

oignement, d'autre part, condamné l'Etat à verser à M. A, l'intégral...

Vu le pourvoi, enregistré le 21 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI demande au Conseil d'Etat :

1) d'annuler le jugement n°0600145 du 12 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a, d'une part, annulé, à la demande de M. Mario A, la décision du 7 décembre 2005 de la direction générale des douanes et des droits indirects lui accordant un versement prorata temporis de la troisième fraction de l'indemnité d'éloignement, d'autre part, condamné l'Etat à verser à M. A, l'intégralité de la troisième fraction de l'indemnité d'éloignement à laquelle il a droit, minorée des sommes déjà perçues au titre de cette troisième fraction ;

2) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. A devant le tribunal administratif de Basse-Terre ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n°53-1266 du 22 décembre 1953 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'Etat en service dans les départements d'outre-mer dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits : (...) L'indemnité d'éloignement est payable en trois fractions : la première, lors de l'installation du fonctionnaire dans son nouveau poste, la seconde au début de la troisième année de services et la troisième après quatre ans de services (...) ; que selon l'article 4 du même décret : Chacune des trois fractions de l'indemnité d'éloignement est majorée à concurrence d'un mois de traitement indiciaire de base pour l'épouse et de quinze jours des mêmes émoluments pour chaque enfant à charge, dans le cas où ceux-ci accompagnent le chef de famille dans son nouveau poste d'affectation d'outre-mer (...) ; qu'en vertu de l'article 8 du même décret : Dans le cas où un ménage de fonctionnaires de l'Etat est affecté dans un même département d'outre-mer, les deux conjoints ne peuvent cumuler l'indemnité d'éloignement prévue aux articles 2 et 3 du présent décret. L'indemnité d'éloignement et, le cas échéant, les majorations prévues à l'article 4 sont alors attribuées à celui des deux époux qui, à la date à laquelle commence à jouer cette interdiction du cumul, bénéficie du traitement indiciaire de base le plus favorable (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, agent de constatation principal des douanes et des droits indirects jusque là affecté en métropole, a été muté en Guadeloupe le 6 décembre 2000 alors que son épouse, contrôleuse principale du Trésor public, avait elle-même été nommée dans ce département d'outre-mer le 1er mars précédent ; que Mme A a perçu, en application des dispositions du décret du 22 décembre 1953 citées ci-dessus, les trois fractions de l'indemnité d'éloignement majorée qui lui était due, dont la dernière au 1er mars 2004 ; que M. A, pour sa part, a sollicité en octobre 2004 le versement de la troisième fraction de l'indemnité d'éloignement, à laquelle il estimait avoir droit pour le motif qu'il totalisait à la date du 6 décembre 2004, quatre années de service outre-mer, et qu'à cette date son épouse ayant cessé de percevoir l'indemnité, la règle de l'interdiction de cumul ne trouvait plus à s'appliquer ; que toutefois par une décision rendue le 7 décembre 2005 sur recours gracieux, le directeur général des douanes et des droits indirects a limité le versement à M. A de la troisième fraction de l'indemnité d'éloignement à proportion de la somme correspondant à la période postérieure au 1er mars 2004, c'est-à-dire à compter de laquelle son épouse avait épuisé ses droits à la perception de cette indemnité ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'emploi se pourvoit contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé la décision du 7 décembre 2005 ;

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 2, 4 et 8 du décret du 22 décembre 1953 citées ci-dessus que la règle de l'interdiction de cumul fait obstacle à ce que, lorsque deux époux peuvent prétendre au titre de leurs années de service dans un département d'outre-mer au bénéfice de l'indemnité d'éloignement, une même période de temps puisse être prise en compte pour le calcul de l'indemnité susceptible d'être versée à chacun d'entre eux ; que par suite en jugeant qu'à la date du 6 décembre 2004, M. A avait droit au versement de l'intégralité de la troisième fraction de l'indemnité d'éloignement, y compris au titre de la période du 6 décembre 2002 au 1er mars 2004, déjà prise en compte pour le calcul de la troisième fraction de l'indemnité versée à Mme A, le tribunal administratif de Basse-Terre a commis une erreur de droit ; que par suite le ministre de l'économie, des finances et de l'emploi est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, M. A ne pouvait légalement prétendre, au titre de la troisième fraction de l'indemnité d'éloignement due aux fonctionnaires ayant servi quatre années dans un département d'outre-mer, à une somme supérieure à celle correspondant à la période du 1er mars 2004 au 6 décembre de la même année ; que par suite il n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 7 décembre 2005 du directeur général des douanes et des droits indirects et le versement de l'intégralité de la troisième fraction ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre du 12 juin 2008 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Basse-Terre est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI et à M. Mario A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

46-01-09-06-04 OUTRE-MER. DROIT APPLICABLE DANS LES COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER ET EN NOUVELLE-CALÉDONIE. DROIT APPLICABLE AUX FONCTIONNAIRES SERVANT OUTRE-MER. RÉMUNÉRATION. INDEMNITÉ D'ÉLOIGNEMENT DES FONCTIONNAIRES SERVANT OUTRE-MER. - RÈGLE DE L'INTERDICTION DE CUMUL ENTRE CONJOINTS (ART. 8 DU DÉCRET DU 22 DÉCEMBRE 1953) - CONSÉQUENCE - PRORATISATION DES FRACTIONS DE L'INDEMNITÉ QU'UN FONCTIONNAIRE PEUT PERCEVOIR À HAUTEUR DES SEULES PÉRIODES AUXQUELLES SON CONJOINT NE LA PERCEVAIT PAS.

46-01-09-06-04 L'article 8 du décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 dispose que dans le cas où un ménage de fonctionnaires de l'Etat est affecté dans un département d'outre-mer, les deux conjoints ne peuvent cumuler l'indemnité d'éloignement. Il résulte de ces dispositions, combinées à celles des articles 2 et 4 du même décret relatives au calcul de l'indemnité et de ses majorations et à leur versement en trois fractions, que la règle d'interdiction de cumul fait obstacle à ce qu'une même période de temps puisse être prise en compte pour le calcul de l'indemnité susceptible d'être versée à chacun des deux conjoints. Par suite, une période prise en compte dans le calcul d'une fraction de l'indemnité versée à l'un des conjoints doit être déduite de la fraction de l'indemnité à laquelle peut également prétendre, le cas échéant, l'autre conjoint.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 mar. 2011, n° 319962
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Rapporteur public ?: M. Roger-Lacan Cyril

Origine de la décision
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Date de la décision : 28/03/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 319962
Numéro NOR : CETATEXT000023886626 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-03-28;319962 ?
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