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30/03/2011 | FRANCE | N°317513

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 30 mars 2011, 317513


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin et 17 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 05NC01142 du 4 octobre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'il a formé contre le jugement n° 0303222, 0401833 du 4 juillet 2005 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a partiellement rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le r

evenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au ti...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin et 17 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 05NC01142 du 4 octobre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'il a formé contre le jugement n° 0303222, 0401833 du 4 juillet 2005 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a partiellement rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 à 1999, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, Auditeur,

- les observations de la SCP Odent, Poulet, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. A,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a fait l'objet d'une vérification de la comptabilité de son activité d'agent d'assurance et de courtier au titre des années 1995 à 1997, dont les résultats lui ont été notifiés le 23 novembre 1998, puis ont été rectifiés, en ce qui concerne l'année 1995, par une notification du 24 décembre 1998 ; que M. et Mme A ont été soumis à une première procédure d'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, qui a porté sur les années 1995 à 1997 et dont les résultats leur ont été notifiés le 28 décembre 1998 en ce qui concerne l'année 1995 et le 31 mai 1999 en ce qui concerne les années 1996 et 1997, puis à une seconde procédure d'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, relative aux années 1998 et 1999 et dont les résultats leur ont été notifiés le 26 septembre 2001 ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 octobre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 juillet 2005 du tribunal administratif de Strasbourg en tant que, après avoir prononcé une réduction des bases d'imposition des années 1996 et 1997, il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 à 1999, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ;

Considérant qu'en jugeant, pour répondre au moyen, invoqué par M. A, tiré de ce qu'il n'avait pas été informé de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus par la brigade de contrôle et de recherche de Lille auprès de la compagnie Lloyd Continental et utilisés par le vérificateur aux fins de déterminer les produits de son activité d'agent d'assurance crédités sur ses comptes bancaires, qu'il avait disposé dans la notification de redressements du 23 novembre 1998 des indications nécessaires sur l'exercice du droit de communication et sur les renseignements obtenus par cette brigade, alors qu'il ressortait du dossier qui lui était soumis que cette notification de redressements se contentait d'énoncer que le montant de l'indemnité reçue par M. A en contrepartie de la cessation de l'exercice de sa profession d'agent d'assurance avait été établi à la suite de l'exercice par l'administration de son droit de communication auprès de la compagnie Lloyd Continental, la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt de dénaturation des pièces du dossier ; que, par suite, M. A est fondé à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur s'est rendu les 7 mai et 15 juin 1998 sur le lieu d'exercice de l'activité professionnelle de M. A ; que ces deux rencontres ont été suffisamment espacées pour permettre un débat oral et contradictoire ; que, si M. A soutient qu'il ne disposait pas des pièces nécessaires à un véritable débat, il n'apporte aucune précision sur la nature des pièces qui auraient fait défaut ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance du débat oral et contradictoire doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres et documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : / 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excèdent pas les limites prévues au 8 de l'article 302 septies A du code général des impôt. /(...)/ Toutefois l'expiration du délai des trois mois n'est pas opposable (...) pour l'examen, en vertu de l'article L. 12, des comptes financiers utilisés à titre privé et professionnel, ni pour la vérification, en vertu des l'article L. 13, des comptes utilisés pour l'exercice d'activités distinctes (...). ;

Considérant que M. A soutient que la vérification de comptabilité, qui a commencé le 7 mai 1998, se serait prolongée jusqu'au 22 octobre 1998, alors que le délai de trois mois prévu par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales était écoulé ; que, toutefois, conformément aux dispositions précitées de cet article, le vérificateur a pu régulièrement demander, le 22 octobre 1998, à M. A, dans le cadre de la première procédure d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, d'apporter des précisions sur la nature des crédits figurant sur des comptes mixtes ; que la circonstance que la mention de cette demande figure dans la notification de redressements du 24 décembre 1998 envoyée à l'issue des deux contrôles effectués dans le cadre de la vérification de comptabilité n'est pas, en tout état de cause, de nature à démontrer que la durée de cette vérification de comptabilité aurait été excessive ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 B du livre des procédures fiscales : Au cours d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, l'administration peut examiner les opérations figurant sur les comptes financiers utilisés à la fois à titre privé et professionnel et demander au contribuable tous éclaircissements ou justifications sur ces opérations sans que cet examen et ces demandes constituent le début d'une procédure de vérification de comptabilité. / Au cours d'une procédure de vérification de comptabilité, l'administration peut procéder aux mêmes examens et demandes, sans que ceux-ci constituent le début d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle. / L'administration peut tenir compte, dans chacune de ces procédures, des constatations résultant de l'examen des comptes ou des réponses aux demandes d'éclaircissements ou de justifications et faites dans le cadre de l'autre procédure conformément aux seules règles applicables à cette dernière ; qu'il résulte de ces dispositions que le vérificateur a pu, sans confondre les procédures de redressement, utiliser dans la notification de redressements du 24 décembre 1998 au titre de l'année 1995 les constatations effectuées lors de l'examen des comptes mixtes de M. A ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que les renseignements relatifs aux bordereaux d'encaissement des primes et de règlement de sinistres recueillis par l'administration dans l'exercice de son droit de communication auprès de la compagnie Lloyd Continental, qui ne sont d'ailleurs pas mentionnés dans les notifications de redressements, ont été effectivement utilisés pour fonder les redressements litigieux ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition est irrégulière faute pour l'administration fiscale de l'avoir informé de l'origine et de la teneur de ces renseignements avec une précision suffisante pour lui permettre de demander que les documents qui les contiennent soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'à compter de la cessation, le 28 février 1997, de son activité d'agent d'assurance et de courtier, les comptes bancaires de M. A n'ont plus retracé que des opérations privées et non plus des opérations mixtes ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que le vérificateur ne pouvait pas avoir recours à la procédure prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales en comparant, pour chacune des années 1998 et 1999, les sommes portées au crédit des comptes bancaires aux revenus nets qu'il avait déclarés et non à ses recettes professionnelles brutes ;

Sur le bien-fondé des impositions au titre de l'année 1995 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de l'examen de la comptabilité de M. A, le vérificateur a constaté l'absence de registre des immobilisations et des bordereaux des encaissements des primes et règlements d'assurance ; qu'après avoir constaté, à bon droit, que la comptabilité n'était pas probante, il a pu considérer que les sommes encaissées sur les comptes bancaires mixtes étaient liées à l'activité professionnelle du requérant et les imposer dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au titre de l'année 1995 ; que M. A n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette qualification ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg, après l'avoir déchargé des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales établies au titre des années 1996 et 1997 correspondant à des réductions en base, respectivement, de 3 461 096 F et 3 941 096 F, ainsi que des pénalités correspondantes, a rejeté le surplus de sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 à 1999 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. A d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 4 octobre 2007 est annulé.

Article 2 : La requête de M. A devant la cour administrative d'appel de Nancy et le surplus des conclusions de son pourvoi sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Claude A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 30 mar. 2011, n° 317513
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Ménéménis
Rapporteur ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Rapporteur public ?: M. Geffray Edouard
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 30/03/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 317513
Numéro NOR : CETATEXT000023886622 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-03-30;317513 ?
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