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06/04/2011 | FRANCE | N°340484

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 06 avril 2011, 340484


Vu le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, enregistré le 11 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 08LY00144 du 4 mai 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation de l'article 1er du jugement n° 0304430 du 23 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. A des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujett

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Vu le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, enregistré le 11 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 08LY00144 du 4 mai 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation de l'article 1er du jugement n° 0304430 du 23 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. A des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1997 ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, au rétablissement, en droits et pénalités, de M. et Mme A au rôle de l'impôt sur le revenu et à celui des contributions sociales, à hauteur de la décharge prononcée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A détenait 5 297 actions de la société anonyme Vaudoise de Participation ; qu'il en a apporté 3 409 à la société civile Minos, constituée le 5 septembre 1997, en plaçant la plus-value de 14 517 870 francs réalisée lors de cet apport sous le régime du report d'imposition prévu au 4 du I ter de l'article 160 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur ; que la société civile Minos a cédé à la société Industrielle et Financière de Lorraine, dès le 19 septembre 1997, les actions qui lui avaient été apportées ; que, le même jour, M. A a cédé à la société Industrielle et Financière de Lorraine l'ensemble des actions de la SA Vaudoise de Participation qu'il détenait encore ; que l'administration fiscale a remis en cause le report d'imposition dont avait bénéficié M. A en estimant, conformément à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit, que l'interposition de la société civile Minos dans la cession de certaines actions de M. A à l'acquéreur de l'ensemble des actions de la société anonyme Vaudoise de Participation était constitutive d'un abus de droit ; que M. A a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 1997 à raison de ce redressement ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 mai 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant à l'annulation de l'article 1er du jugement du 23 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. A des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1997 ainsi que des pénalités correspondantes ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du 4 du I ter de l'article 160 du code général des impôts, applicable aux impositions en litige : L'imposition de la plus-value réalisée à compter du 1er janvier 1991 en cas d'échange de droits sociaux résultant d'une opération de fusion, scission ou d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B ; qu'aux termes du II de l'article 92 B du même code, alors en vigueur : 1. A compter du 1er janvier 1992 ou du 1er janvier 1991 pour les apports de titres à une société passible de l'impôt sur les sociétés, l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres résultant d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, peut être reportée au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou l'annulation des titres reçus lors de l'échange. (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...) L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus font l'objet d'un rapport annuel. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, auraient normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;

Considérant que, lorsque l'administration entend remettre en cause les conséquences fiscales d'une opération qui s'est traduite par un report d'imposition au motif que les actes passés par le contribuable ne lui sont pas opposables, elle est fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu'en effet, une telle opération, dont l'intérêt fiscal est de différer l'imposition, entre dans le champ d'application de cet article dès lors qu'elle a nécessairement pour effet de minorer l'assiette de l'année au titre de laquelle l'impôt est normalement dû à raison de la situation et des activités réelles du contribuable ; que, par suite, en jugeant que l'administration ne pouvait faire usage des pouvoirs qu'elle tient de ces dispositions lorsqu'elle entend contester le fait, pour un contribuable, de solliciter le report d'imposition prévu au 4 du I ter de l'article 160 du code général des impôts d'une plus-value déclarée, au motif qu'une telle demande, qui ne déguise, par elle-même, ni une réalisation, ni un transfert de bénéfices ou de revenus, n'entrait pas dans les prévisions du b) de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, pour accueillir la demande de substitution de base légale présentée par l'administration sur le terrain de la fraude à la loi, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 4 mai 2010 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT, et à M. Olivier A.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 340484
Date de la décision : 06/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 avr. 2011, n° 340484
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi
Rapporteur public ?: Mme Cortot-Boucher Emmanuelle
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:340484.20110406
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