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06/05/2011 | FRANCE | N°321564

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 06 mai 2011, 321564


Vu l'ordonnance n° 08NT02579 du 3 octobre 2008, enregistrée le 13 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'État, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour par M. A ;

Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2008 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présentée par M. Robert A demeurant ... ; M. Robert A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0601142-6 d

u 7 juillet 2008 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif d...

Vu l'ordonnance n° 08NT02579 du 3 octobre 2008, enregistrée le 13 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'État, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour par M. A ;

Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2008 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présentée par M. Robert A demeurant ... ; M. Robert A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0601142-6 du 7 juillet 2008 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Caen, saisi par le tribunal de grande instance de Lisieux d'une question préjudicielle, a rejeté sa demande tendant à ce que soient déclarés mal fondés les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été assignés à la société E3 Industries au titre des années 1997 et 1998 et les pénalités correspondantes ;

2°) de faire droit à sa demande ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Allais, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boullez, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boullez, avocat de M. A,

Considérant que M. A a été assigné devant le tribunal de grande instance de Lisieux par le receveur des impôts, en sa qualité de président-directeur général de la société E3 Industries aux fins de se voir déclaré solidairement responsable, sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, du paiement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assignés à cette société à la suite d'une vérification de sa comptabilité ; que, par jugement du 17 mars 2006, le tribunal de grande instance de Lisieux a sursis à statuer sur cette demande dans l'attente de la réponse de la juridiction administrative à une question préjudicielle portant sur le bien-fondé des impositions mises à la charge de la société E3 Industries au titre de la période comprise entre le 1er janvier 1996 et le 30 juin 1998 ; que M. A interjette appel du jugement du 7 juillet 2008 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Caen a déclaré qu'il n'était pas fondé à soutenir que l'administration avait assigné à tort à la société E3 Industries des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de pénalités, au titre des années 1997 et 1998 ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, postérieurement à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux chargé de la direction du contrôle fiscal Ouest a, par une décision du 4 février 2009, procédé au dégrèvement de la somme de 42 096,05 euros correspondant aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée notifiés le 13 décembre 1999 pour les sommes de 249 051 francs et 27 082 francs ; que, par suite, les conclusions de la requête de M. A relatives à ces impositions sont devenues sans objet ;

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assignés à la société E3 Industries restant en litige :

En ce qui concerne un rappel de taxe sur la valeur ajoutée de 927 000 francs opéré au titre de l'exercice clos en 1998 et relatif à la cession d'une presse :

Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article L. 205 du livre des procédures fiscales : Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue un redressement lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque le redressement fait apparaître une double imposition ;

Considérant d'autre part, qu'aux termes qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ; que le 1) de l'article 266 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au cours de la période d'imposition concernée par le présent litige, que la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée : a) Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au titre de l'exercice clos en 1998, l'administration fiscale a soumis à la taxe sur la valeur ajoutée la cession par la société E3 Industries d'une presse, pour un prix de 4 500 000 francs, dont la livraison réalisée en juin 1998 n'avait pas été portée dans la déclaration de chiffre d'affaires de la société ; que, si M. A ne conteste pas le caractère imposable de cette cession, il soutient que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 927 000 francs qui en résulte serait compensé par une surévaluation du chiffre d'affaires imposable à la taxe sur la valeur ajoutée déclaré par la société E3 Industries pour un montant de 15 648 687 francs, alors que le compte de résultat de l'exercice clos au 30 juin 1997 afficherait un chiffre d'affaires de 10 562 664 francs, y compris la cession de cette presse mentionnée dans le compte factures à établir ; que, selon le requérant, la surévaluation du chiffre d'affaires déclaré provient de ce que la société E3 Industries a consenti, le 30 novembre 1997, deux avoirs à la société E3 Emboutissage correspondant à des factures impayées d'un montant de 9 675 919,54 francs ;

Considérant que le caractère complètement et définitivement irrécouvrable des créances n'a pas été établi ; qu'au demeurant, il est constant que les avoirs en cause ont été consentis dans le cadre de la restructuration du groupe et en considération des difficultés financières de la société E3 Emboutissage et ne correspondent pas à des prestations de services individualisées fournies à la société E3 Industries ; que le lien entre les abandons de créance ainsi consentis par cette société et les avantages qui pouvaient en résulter pour elle ne pouvant être qualifié de direct, les abandons de créances en cause ne pouvaient être regardés comme ayant rémunéré des prestations de services effectuées à titre onéreux par la société E3 Emboutissage ; que, par suite, ils ne peuvent être regardés comme étant légalement passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi M. A ne justifiant pas de l'existence d'une créance de taxe sur la valeur ajoutée à raison de l'établissement le 30 novembre 1997 d'avoirs au profit de la société E3 Emboutissage, sa demande de compensation ne peut en tout état de cause qu'être rejetée sans qu'il puisse utilement se prévaloir de la circonstance que l'administration fiscale n'a pas notifié, à la société E3 Industries, à la suite de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, un rappel de taxe sur la valeur ajoutée sur ces avoirs ;

En ce qui concerne un rappel de taxe sur la valeur ajoutée déductible relatif à l'exercice clos en 1998 d'un montant de 155 732 francs :

Considérant qu'aux termes du II de l'article 271 du code général des impôts : 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs vendeurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures (...) / 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession (...) desdites factures (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a remis en cause le caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée par la société E3 Industries pour un montant de 155 732 francs, pour la période du 1er juillet 1997 au 30 juin 1998, correspondant, selon M. A, à des loyers versés au titre d'un contrat de crédit bail immobilier, conclu le 2 octobre 1987 entre la société Batiroc et la société E3 Equipements, aux droits de laquelle était venue, par absorptions successives, la société E3 Industries ; que si M. A produit pour la première fois en appel des duplicata des factures censés avoir été établis entre le 3 décembre 1996 et le 2 septembre 1998 et mentionnant la taxe sur la valeur ajoutée en litige, l'administration fiscale conteste la valeur probante de ces documents en faisant valoir, sans être contredite, que ceux-ci font mention que leur émetteur, la société Batiroc, est une SA au capital social de 2 917 813 euros alors que ce capital n'a été converti en euros que le 24 mai 2002, que son siège social est sis au 2 rue A. Sakharov à Mont-Saint-Aignan, alors que le transfert à cette adresse n'a été effectué que le 22 mars 2005 ; que par ailleurs sont mentionnés des montants de loyers en francs et leur contre-valeur en euros alors que le taux de conversion de cette monnaie n'a été officiellement fixé que le 1er janvier 1999 ; que dans ces conditions, M. A ne peut être regardé avoir établi que la société E3 Industries était, à la date où elle a porté ces sommes dans sa déclaration de chiffre d'affaires, en possession de factures mentionnant la taxe sur la valeur ajoutée en litige, conformément aux dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement qu'il attaque, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que soient déclarés mal fondés les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, restant en litige, assignés à la société E3 Industries ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A relatives aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée notifiés le 13 décembre 1999 pour les sommes de 249 051 francs et 27 082 francs.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. A est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 321564
Date de la décision : 06/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Publications
Proposition de citation : CE, 06 mai. 2011, n° 321564
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Alain Ménéménis
Rapporteur ?: Mme Christine Allais
Rapporteur public ?: M. Edouard Geffray
Avocat(s) : SCP BOULLEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:321564.20110506
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