Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 décembre 2008 et 3 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Manuel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 07PA02930 du 18 septembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a interjeté du jugement du 4 juin 2007 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1994, ainsi que des pénalités correspondantes ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Christine Allais, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A,
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a acquis le 29 décembre 1994, pour le prix de 900 000 F, 2 125 titres détenus par la société Segex dans le capital de la société Segas, dont M. A était associé majoritaire ; que dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la société Segex, l'administration a estimé que ce prix était minoré, pour un montant de 910 500 F, minoration qu'elle a ramenée, dans le cadre d'une procédure de conciliation avec la société Segex, à la somme de 637 350 F ; qu'à l'issue de cette vérification et du contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. A, l'administration, estimant que la différence entre la valeur vénale réelle des titres cédés par la société Segex et le montant acquitté par M. A, constituait un avantage occulte au sens de l'article 111 c du code général des impôts, a imposé cet avantage entre les mains de ce dernier au titre de l'année 1994 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 septembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a interjeté du jugement du 4 juin 2007 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1994, ainsi que des pénalités correspondantes ;
Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : Sont notamment considérés comme revenus distribués : ... c. Les rémunérations et avantages occultes... ;
Considérant qu'en cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsque est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A soutenait devant la cour, d'une part, que l'administration n'apportait pas, pour justifier l'application des dispositions de l'article 111 c. du code général des impôts, la preuve que la société Segex avait eu l'intention de lui octroyer une libéralité à l'occasion de la cession des titres de la société Segas intervenue le 29 décembre 1994, ni qu'il avait eu l'intention de recevoir une telle libéralité et, d'autre part, que l'existence d'une telle libéralité ne pouvait être déduite de la qualité d'ancien administrateur de la société Segex, qu'il n'avait jamais eue ; que la cour a omis de répondre à ce moyen qui n'était pas inopérant ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt n° 07PA02930 de la cour administrative d'appel de Paris du 18 septembre 2008 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Manuel A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.