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11/05/2011 | FRANCE | N°323507

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 11 mai 2011, 323507


Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 2008, le 23 mars 2009 et le 14 décembre 2009, présentés par Mlle Joëlle A, domiciliée ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite, confirmée par une décision du 19 novembre 2009, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 30 juin 2008 du consul général de France à Tananarive (Mada

gascar) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France...

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 2008, le 23 mars 2009 et le 14 décembre 2009, présentés par Mlle Joëlle A, domiciliée ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite, confirmée par une décision du 19 novembre 2009, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 30 juin 2008 du consul général de France à Tananarive (Madagascar) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France ;

2°) d'enjoindre aux autorités consulaires de délivrer le visa demandé dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thierry Carriol, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

Considérant que, pour rejeter le recours dirigé contre la décision du 30 juin 2008 du consul général de France à Tananarive refusant un visa d'entrée et de long séjour en France à Mlle A, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'absence de lien de filiation avec Mme D qui serait révélée par le caractère apocryphe de son acte de naissance résultant de sa signature par son père décédé à la date de sa naissance ;

Mais considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'acte de naissance de Mlle A a été signé uniquement par sa mère, Mme D née B ; que, contrairement à ce qu'affirme la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, M. Gustave B, qui est le grand-père maternel de Mlle A, n'a pas signé cet acte alors qu'il aurait été décédé à cette date ; que l'absence de caractère probant de l'acte de naissance de Mlle A n'est donc pas démontrée par l'administration ;

Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que, dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant que, dans son mémoire en défense, communiqué à Mlle A, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration doit être regardé comme demandant au Conseil d'Etat de substituer au motif initial le motif tiré de l'absence de lien de filiation établi entre Mlle A et, d'une part, Mme D en raison du caractère apocryphe de l'acte de naissance résultant de sa date d'insertion dans le registre d'état civil ainsi que, d'autre part, de M. D, en raison de la contrariété de l'acte de reconnaissance avec la législation malgache ; qu'il résulte de l'instruction que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait pris la même décision si elle avait entendu se fonder initialement sur ces motifs ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, l'extrait d'acte de naissance produit à l'appui du recours pour établir le lien de filiation de Mlle A avec Mme D est apocryphe, dès lors qu'il n'a été ajouté sur le registre de 1988 qu'en 2005 ou 2006 alors qu'il aurait été établi le 31 décembre 1988 sur déclaration de Mme D, sans qu'aucune circonstance particulière ni aucun jugement supplétif qui aurait permis de justifier cette discordance temporelle ne soient invoqués ; que, d'autre part, l'acte de reconnaissance de Mlle A par M. D, dressé le 10 mai 2006, est sans incidence sur le lien de filiation dès lors qu'au regard de la législation malgache, le père légal de Mlle A est M. C, dont il n'est pas démontré qu'il aurait désavoué sa paternité ; que, dès lors, la décision de refus peut légalement être fondée sur ces motifs ; qu'eu égard à ses motifs, cette décision, qui est suffisamment motivée, ne porte pas, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte disproportionnée au droit de Mlle A au respect de sa vie privée et familiale, ni à son intérêt supérieur garanti par l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 19 novembre 2009 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mlle A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Joëlle A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 mai. 2011, n° 323507
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Thierry Tuot
Rapporteur ?: M. Thierry Carriol
Rapporteur public ?: M. Julien Boucher

Origine de la décision
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 11/05/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 323507
Numéro NOR : CETATEXT000023996986 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-05-11;323507 ?
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