La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/06/2011 | FRANCE | N°344394

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 08 juin 2011, 344394


Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE SEG FAYAT, dont le siège est rue Richelieu à Floirac (33270), qui demande au Conseil d'Etat de condamner le département de la Gironde à une astreinte en vue d'assurer l'exécution de la décision du 7 octobre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 5 juin 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux et le jugement du 24 février 2005 du tribunal administratif de Bordeaux et a rejeté la demande présentée par le dé

partement de la Gironde devant ce tribunal, tendant à sa condamna...

Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE SEG FAYAT, dont le siège est rue Richelieu à Floirac (33270), qui demande au Conseil d'Etat de condamner le département de la Gironde à une astreinte en vue d'assurer l'exécution de la décision du 7 octobre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 5 juin 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux et le jugement du 24 février 2005 du tribunal administratif de Bordeaux et a rejeté la demande présentée par le département de la Gironde devant ce tribunal, tendant à sa condamnation, solidairement avec la société Atelier des maîtres d'oeuvre (ATMO), à l'indemniser du préjudice résultant des désordres affectant le centre d'hébergement et de loisirs de Lacanau, qu'elles ont construit pour le département ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code monétaire et financier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Polge, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

Considérant que par un jugement du 24 février 2005, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné solidairement la SOCIETE SEG FAYAT et la société Atelier des maîtres d'oeuvre (ATMO), à la demande du département de la Gironde, à verser à ce dernier une indemnité de 84 243,82 euros et a mis à leur charge, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement au département d'une somme de 1 000 euros ; que par un arrêt du 5 juin 2007, la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisie par la SOCIETE SEG FAYAT, d'une part, et par la société ATMO et son assureur, la Compagnie Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres, d'autre part, a annulé le jugement du 24 février 2005, condamné les sociétés SEG FAYAT et ATMO, solidairement, à verser au département une indemnité de 60 025,82 euros, et mis à leur charge, ensemble, le versement à celui-ci d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par une décision du 7 octobre 2009, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi par la société ATMO et la Compagnie Les souscripteurs du Lloyd's de Londres, a annulé l'arrêt du 5 juin 2007 et le jugement du 24 février 2005, a rejeté la demande présentée par le département de la Gironde devant le tribunal administratif et a mis à sa charge le versement de 2 500 euros chacune à la société ATMO et à la Compagnie Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite du jugement du 24 février 2005, les sommes allouées au département de la Gironde ont été payées par la SOCIETE SEG FAYAT ; que, si le département de la Gironde n'a pris aucune mesure d'exécution de l'arrêt du 5 juin 2007 avant la décision du Conseil d'Etat du 7 octobre 2009 annulant cet arrêt et le jugement, il a versé à cette société, le 30 avril 2010 et le 29 septembre 2010, respectivement, les sommes de 1 000 euros et 84 243,82 euros, dont elle a accepté l'imputation sur le principal des sommes dues ;

Considérant que, par une lettre du 20 décembre 2010 en réponse aux observations du département de la Gironde, recueillies par la section du rapport et des études conformément aux articles R. 931-2 et R. 931-6 du code de justice administrative, la SOCIETE SEG FAYAT a pris acte du règlement par le département de sa créance en principal ; que cette société doit donc être regardée comme se désistant de sa requête, en tant qu'elle vise à assurer le paiement de la dette en principal du département ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il lui en soit donné acte ;

Considérant, en revanche, que la SOCIETE SEG FAYAT maintient sa demande en ce qui concerne le paiement des intérêts, qu'elle estime dus à compter de la lecture du jugement du 24 février 2005 ou du paiement qui a suivi ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1153 du code civil : Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal (...). Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier : En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, d'une part, la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision exécutoire du juge administratif n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, qui la rend exécutoire, de la décision ouvrant droit à restitution et que ces intérêts courent jusqu'à l'exécution de la décision, c'est-à-dire, en principe et sous réserve d'un délai anormalement long entre la liquidation et le paiement effectif, jusqu'à la date à laquelle la dette est liquidée ; que, d'autre part, le taux d'intérêt applicable est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à la partie débitrice ;

Considérant que, par suite, les intérêts dus par le département de la Gironde sur les sommes à restituer à la SOCIETE SEG FAYAT en exécution, respectivement, de l'arrêt du 5 juin 2007 et de la décision du Conseil d'Etat du 7 octobre 2009 n'ont commencé à courir sur ces sommes qu'à compter de la notification de chacune de ces décisions ; que la requérante n'est, dès lors, pas fondée à demander qu'une astreinte soit prononcée pour assurer le paiement de ces intérêts sur une période antérieure, courant à compter du jugement du 24 février 2005 ou du paiement effectué en exécution de celui-ci ;

Considérant qu'il résulte, en revanche, de ce qui précède que le département de la Gironde devait à la SOCIETE SEG FAYAT, à compter de la notification de l'arrêt du 5 juin 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, les intérêts sur la somme de 22 718 euros à restituer en exécution de cet arrêt, ainsi que, à compter de la notification de la décision du 7 octobre 2009 du Conseil d'Etat, les intérêts sur le montant complémentaire de 62 525,82 euros à restituer en exécution de cette décision, jusqu'à la liquidation de ces dettes, au taux légal, majoré dans l'un et l'autre cas de cinq points à l'expiration du délai de deux mois à compter, selon le cas, de la notification de l'arrêt de la cour administrative d'appel ou de celle de la décision du Conseil d'Etat ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le département de la Gironde a mandaté le 14 décembre 2010, en faveur de la SOCIETE SEG FAYAT, une somme de 10 494,34 euros comprenant celle de 9 494,34 euros dont le département de la Gironde s'estimait débiteur au titre des intérêts dus à cette société ; que ce montant a été calculé en appliquant le taux d'intérêt légal aux sommes à restituer en exécution de l'arrêt du 5 juin 2007 puis de la décision du Conseil d'Etat du 7 octobre 2009 à compter, pour la part correspondant à chacune de ces décisions, de la date de sa lecture, antérieure à celle de sa notification, et jusqu'au paiement effectif de la dette en principal, postérieur à sa liquidation ; que le taux d'intérêt légal appliqué à chacune de ces parts a été majoré dès le lendemain de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la lecture de la décision de justice ouvrant droit à restitution, et non à compter de l'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de cette décision ; que le calcul auquel a procédé le département de la Gironde repose ainsi sur l'application du taux d'intérêt légal et de sa majoration sur une durée plus longue que celle qui résulte des règles définies plus haut ;

Considérant qu'il résulte également de l'instruction, il est vrai, que, pour la période allant de la notification de la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux à la liquidation de la somme de 1 000 euros versée par le département en apurement partiel de sa dette et dont la SOCIETE SEG FAYAT a accepté l'imputation sur celle de 85 243,82 euros alors due en principal, cette somme de 1 000 euros n'a pas été incluse dans l'assiette de calcul des intérêts ; qu'en revanche, l'assiette retenue pour la période allant de la notification de l'arrêt du 5 juin 2007 à la notification de la décision du Conseil d'Etat du 7 octobre 2009 a été majorée, dans le calcul effectué par le département, de 2 500 euros ; qu'eu égard à la durée respective des périodes sur lesquelles portent ces erreurs dans la définition de l'assiette de calcul des intérêts, au taux d'intérêt légal applicable à chacune de ces périodes et à la combinaison de leurs effets avec celui de l'allongement de la durée d'application du taux d'intérêt légal et de sa majoration, il résulte de l'instruction que le montant de 9 494,34 euros versé par le département de la Gironde au titre des intérêts est nécessairement supérieur au montant dû en application des règles définies plus haut ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la SOCIETE SEG FAYAT tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision du 7 octobre 2009, en tant qu'elle implique le paiement d'intérêts, sont devenues sans objet ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il est donné acte à la SOCIETE SEG FAYAT du désistement de ses conclusions tendant à ce que le département de la Gironde soit condamné à une astreinte pour assurer l'exécution de la décision du 7 octobre 2009 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, en tant qu'elle implique le paiement des sommes dues en principal.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la SOCIETE SEG FAYAT tendant à ce que le département de la Gironde soit condamné à une astreinte pour assurer l'exécution de la décision du 7 octobre 2009, en tant qu'elle implique le paiement des intérêts dus sur les mêmes sommes.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SEG FAYAT et au département de la Gironde.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 344394
Date de la décision : 08/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Action en astreinte

Analyses

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - EXÉCUTION DES JUGEMENTS - RESTITUTION PAR UNE PARTIE D'UNE SOMME QU'ELLE DÉTENAIT EN VERTU D'UNE DÉCISION EXÉCUTOIRE DU JUGE ADMINISTRATIF ET QU'ELLE DOIT REVERSER EN RAISON DE L'ANNULATION DE CETTE DÉCISION - INTÉRÊTS (ART - 1153 DU CODE CIVIL ET L - 313-3 DU CMF) - 1) POINT DE DÉPART - NOTIFICATION DE CETTE DERNIÈRE DÉCISION - QUI LA REND EXÉCUTOIRE - FIN - EXÉCUTION DE LA DÉCISION OUVRANT DROIT À RESTITUTION - LIQUIDATION DE LA SOMME - 2) MAJORATION DU TAUX D'INTÉRÊT APPLICABLE PASSÉ UN DÉLAI DE DEUX MOIS À COMPTER DE LA NOTIFICATION - EXISTENCE.

37-05 Il résulte des dispositions de l'article 1153 du code civil et de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier (CMF) que :,,1) la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision exécutoire du juge administratif n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, qui la rend exécutoire, de la décision ouvrant droit à restitution et que ces intérêts courent jusqu'à l'exécution de la décision, c'est-à-dire, en principe et sous réserve d'un délai anormalement long entre la liquidation et le paiement effectif, jusqu'à la date à laquelle la dette est liquidée ;... ...2) le taux d'intérêt applicable est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à la partie débitrice.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - EXÉCUTION DES JUGEMENTS - EFFETS D'UNE ANNULATION - RESTITUTION PAR UNE PARTIE D'UNE SOMME QU'ELLE DÉTENAIT EN VERTU D'UNE DÉCISION EXÉCUTOIRE DU JUGE ADMINISTRATIF ET QU'ELLE DOIT REVERSER EN RAISON DE L'ANNULATION DE CETTE DÉCISION - INTÉRÊTS (ART - 1153 DU CODE CIVIL ET L - 313-3 DU CMF) - 1) POINT DE DÉPART - NOTIFICATION DE CETTE DERNIÈRE DÉCISION - QUI LA REND EXÉCUTOIRE - FIN - EXÉCUTION DE LA DÉCISION OUVRANT DROIT À RESTITUTION - LIQUIDATION DE LA SOMME - 2) MAJORATION DU TAUX D'INTÉRÊT APPLICABLE PASSÉ UN DÉLAI DE DEUX MOIS À COMPTER DE LA NOTIFICATION - EXISTENCE.

54-06-07-005 Il résulte des dispositions de l'article 1153 du code civil et de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier (CMF) que :,,1) la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision exécutoire du juge administratif n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, qui la rend exécutoire, de la décision ouvrant droit à restitution et que ces intérêts courent jusqu'à l'exécution de la décision, c'est-à-dire, en principe et sous réserve d'un délai anormalement long entre la liquidation et le paiement effectif, jusqu'à la date à laquelle la dette est liquidée ;... ...2) le taux d'intérêt applicable est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à la partie débitrice.


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2011, n° 344394
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Nicolas Polge
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:344394.20110608
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award