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15/06/2011 | FRANCE | N°345540

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 15 juin 2011, 345540


Vu le jugement n° 1000926 du 14 décembre 2010, enregistré le 5 janvier 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, avant de statuer sur la demande de l'EARL DU PEYROU tendant à l'annulation de la délibération du 11 avril 2010 par laquelle le conseil municipal d'Arches a sursis à statuer sur la demande de M. A tendant à l'attribution de terres à vocation agricole ou pastorale appartenant à la section de Cheix, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de tra

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Vu le jugement n° 1000926 du 14 décembre 2010, enregistré le 5 janvier 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, avant de statuer sur la demande de l'EARL DU PEYROU tendant à l'annulation de la délibération du 11 avril 2010 par laquelle le conseil municipal d'Arches a sursis à statuer sur la demande de M. A tendant à l'attribution de terres à vocation agricole ou pastorale appartenant à la section de Cheix, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante : dans l'hypothèse où un exploitant agricole a constitué une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) dont il est devenu associé exploitant, est-il recevable à demander en son nom propre l'attribution de terres à vocation agricole ou pastorale, en application de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales, pour les mettre ensuite à la disposition de l'EARL ou seule cette dernière, dès lors qu'elle est dotée d'une personnalité morale distincte de celle de ses membres et à supposer qu'elle puisse être regardée comme ayant droit de la section, est-elle compétente pour déposer une telle demande '

Vu les observations, enregistrées le 9 mars 2011, présentées par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire ;

Vu les observations, enregistrées le 14 mars 2001, présentées par M. Emmanuel Magne ;

Vu les pièces desquelles il ressort que la demande d'avis a été communiquée à l'EARL DU PEYROU, à M. et Mme Neyrat et au GAEC de Neyrat, à la commune d'Arches agissant pour la section de Cheix et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, qui n'ont pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil, notamment son article 1842 ;

Vu le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 2411-10 ;

Vu le code rural et de la pêche maritime, notamment ses articles L. 324-1 et suivants ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, Auditeur-rapporteur,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

L'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales dispose que :

Les membres de la section ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature. / Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail rural ou par convention pluriannuelle de pâturage conclue dans les conditions prévues à l'article L. 481-1 du code rural et de la pêche maritime ou par convention de mise à disposition d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural au profit des exploitants agricoles ayant un domicile réel et fixe, ainsi que le siège d'exploitation sur la section. L'autorité municipale peut attribuer, le cas échéant, le reliquat de ces biens au profit d'exploitants agricoles sur la section ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale leurs animaux sur la section, ou à défaut au profit de personnes exploitant des biens sur le territoire de la section et résidant sur le territoire de la commune ; à titre subsidiaire, elle peut attribuer ce reliquat au profit de personnes exploitant seulement des biens sur le territoire de la section ou, à défaut, au profit des exploitants ayant un bâtiment d'exploitation sur le territoire de la commune. / Pour toutes les catégories précitées, les exploitants devront remplir les conditions prévues par les articles L. 331-2 à L. 331-5 du code rural et de la pêche maritime et celles prévues par le règlement d'attribution défini par l'autorité municipale (...) .

La demande d'avis soumise au Conseil d'Etat pose la question de savoir si un exploitant agricole, associé exploitant d'une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), peut obtenir l'attribution de terres à vocation agricole ou pastorale en application des dispositions précitées.

Aux termes du premier alinéa de l'article L. 324-1 du code rural et de la pêche maritime : Une ou plusieurs personnes physiques peuvent instituer une société civile dénommée exploitation agricole à responsabilité limitée, régie par les dispositions des chapitres Ier et II du titre IX du livre III du code civil, à l'exception de l'article 1844-5. Les associés ne supportent les pertes qu'à concurrence de leurs apports . Les associés majeurs d'une EARL qui participent effectivement à l'exploitation sont dénommés associés exploitants en application de l'article L. 324-8 du même code.

Conformément à l'article L. 324-2 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) a pour objet l'exercice d'activités réputées agricoles au sens de l'article L. 311-1, selon lequel : sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation (...) .

Enfin, en vertu de l'article L. 311-2 du même code, est regardée comme exploitant agricole toute personne physique ou morale exerçant à titre habituel des activités réputées agricoles au sens de l'article L. 311-1 .

Il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'une EARL, dotée d'une personnalité morale distincte de celle de ses associés exploitants, constitue un exploitant agricole, auquel peuvent être attribuées des terres à vocation agricole ou pastorale propriétés d'une section de commune en application des dispositions précitées de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales.

Lorsqu'une EARL est créée pour gérer une exploitation agricole, c'est cette EARL qui est attributaire de terres au titre de cette exploitation. Le respect des critères d'attribution des terres doit alors être apprécié au regard de la situation de la seule EARL, dont le siège doit être regardé comme le domicile réel et fixe au sens de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales.

La demande d'attribution de terres peut être présentée par toute personne habilitée à représenter l'EARL ; en particulier, lorsque l'EARL est constituée par un associé unique, celui-ci peut présenter la demande au nom de l'EARL unipersonnelle.

Lorsqu'un associé exploitant d'une EARL conserve une activité agricole en dehors du périmètre de l'EARL, en qualité d'exploitant agricole à titre individuel, il peut demander à ce titre l'attribution de terres en application de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales. Les critères d'attribution sont alors appréciés au regard de sa situation personnelle et de celle de son exploitation individuelle.

Quand une demande d'attribution de terres est présentée par une personne physique, sans qu'il soit précisé si celle-ci agit en tant qu'exploitant individuel ou en tant qu'associé unique d'une EARL, il appartient à la section puis, le cas échéant, au juge, de rechercher, compte tenu des informations qui sont fournies au soutien de cette demande, notamment du siège de l'exploitation qui y est mentionné, si la demande doit être regardée comme présentée au nom de l'exploitation individuelle ou au nom de l'EARL. Si la demande est présentée au nom de l'EARL, il appartient à la section puis, le cas échéant, au juge, de requalifier en ce sens la demande.

Par ailleurs, si un exploitant agricole individuel, qui a obtenu l'attribution de terres dont une section est propriétaire, par bail rural ou par convention pluriannuelle de pâturage, devient ultérieurement l'associé d'une EARL, il peut mettre ces terres à la disposition de cette dernière conformément aux dispositions de l'article L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime, ou lui en faire apport conformément aux dispositions de l'article L. 411-38 du même code.

Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, à l'EARL DU PEYROU, à la commune d'Arches, à M. Magne, à M. et Mme Neyrat et au GAEC du Neyrat, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

Il sera publié au Journal officiel de la République française.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 345540
Date de la décision : 15/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PÊCHE - EXPLOITATIONS AGRICOLES - EARL - 1) POSSIBILITÉ D'ATTRIBUTION DE TERRES DE SECTIONS DE COMMUNES - EXISTENCE - 2) CRITÈRES D'ATTRIBUTION DES TERRES - DÉFINITION DU SIÈGE DE L'EARL - 3) DEMANDE PRÉSENTÉE PAR UNE PERSONNE PHYSIQUE - SANS QU'IL SOIT PRÉCISÉ SI CELLE-CI AGIT EN TANT QU'EXPLOITANT INDIVIDUEL OU EN TANT QU'ASSOCIÉ UNIQUE D'UNE EARL - REQUALIFICATION DE LA DEMANDE PAR LA SECTION PUIS LE JUGE - 4) ASSOCIÉ DE L'EARL QUI CONSERVE UNE ACTIVITÉ AGRICOLE EN DEHORS DE SON PÉRIMÈTRE - POSSIBILITÉ D'ATTRIBUTION DE TERRES - EXISTENCE - 5) EXPLOITANT INDIVIDUEL QUI DEVIENT ASSOCIÉ D'UNE EARL - POSSIBILITÉ D'APPORT DE SES TERRES - EXISTENCE - AVEC L'ACCORD DE LA SECTION.

03-03 1) Une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), dotée d'une personnalité morale distincte de celle de ses associés exploitants, constitue un exploitant agricole, auquel peuvent être attribuées des terres à vocation agricole ou pastorale propriétés d'une section de commune en application des dispositions de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales (CGCT).... ...2) Lorsqu'une EARL est créée pour gérer une exploitation agricole, c'est cette EARL qui est attributaire de terres au titre de cette exploitation. Le respect des critères d'attribution des terres doit alors être apprécié au regard de la situation de la seule EARL, dont le siège doit être regardé comme le « domicile réel et fixe » au sens de l'article L. 2411-10 du CGCT.... ...3) Quand une demande d'attribution de terres est présentée par une personne physique, sans qu'il soit précisé si celle-ci agit en tant qu'exploitant individuel ou en tant qu'associé unique d'une EARL, il appartient à la section puis, le cas échéant, au juge, de rechercher, compte tenu des informations qui sont fournies au soutien de cette demande, notamment du siège de l'exploitation qui y est mentionné, si elle doit être regardée comme présentée au nom de l'exploitation individuelle ou au nom de l'EARL. Si la demande est présentée au nom de l'EARL, il appartient à la section puis, le cas échéant, au juge, de requalifier en ce sens la demande.,,4) Lorsqu'un associé exploitant d'une EARL conserve une activité agricole en dehors du périmètre de l'EARL, en qualité d'exploitant agricole à titre individuel, il peut demander à ce titre l'attribution de terres en application de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales.,,5) Si un exploitant agricole individuel, qui a obtenu l'attribution de terres dont une section est propriétaire, par bail rural ou par convention pluriannuelle de pâturage, devient ultérieurement l'associé d'une EARL, il peut mettre ces terres à la disposition de cette dernière conformément aux dispositions de l'article L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime, ou lui en faire apport conformément aux dispositions de l'article L. 411-38 du même code.

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - COMMUNE - BIENS DE LA COMMUNE - INTÉRÊTS PROPRES À CERTAINES CATÉGORIES D'HABITANTS - SECTIONS DE COMMUNE - EARL - 1) POSSIBILITÉ D'ATTRIBUTION DE TERRES DE SECTIONS DE COMMUNES - EXISTENCE - 2) CRITÈRES D'ATTRIBUTION DES TERRES - DÉFINITION DU SIÈGE DE L'EARL - 3) DEMANDE PRÉSENTÉE PAR UNE PERSONNE PHYSIQUE - SANS QU'IL SOIT PRÉCISÉ SI CELLE-CI AGIT EN TANT QU'EXPLOITANT INDIVIDUEL OU EN TANT QU'ASSOCIÉ UNIQUE D'UNE EARL - REQUALIFICATION DE LA DEMANDE PAR LA SECTION PUIS LE JUGE - 4) ASSOCIÉ DE L'EARL QUI CONSERVE UNE ACTIVITÉ AGRICOLE EN DEHORS DE SON PÉRIMÈTRE - POSSIBILITÉ D'ATTRIBUTION DE TERRES - EXISTENCE - 5) EXPLOITANT INDIVIDUEL QUI DEVIENT ASSOCIÉ D'UNE EARL - POSSIBILITÉ D'APPORT DE SES TERRES - EXISTENCE - AVEC L'ACCORD DE LA SECTION.

135-02-02-03-01 1) Une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), dotée d'une personnalité morale distincte de celle de ses associés exploitants, constitue un exploitant agricole, auquel peuvent être attribuées des terres à vocation agricole ou pastorale propriétés d'une section de commune en application des dispositions de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales (CGCT).... ...2) Lorsqu'une EARL est créée pour gérer une exploitation agricole, c'est cette EARL qui est attributaire de terres au titre de cette exploitation. Le respect des critères d'attribution des terres doit alors être apprécié au regard de la situation de la seule EARL, dont le siège doit être regardé comme le « domicile réel et fixe » au sens de l'article L. 2411-10 du CGCT.... ...3) Quand une demande d'attribution de terres est présentée par une personne physique, sans qu'il soit précisé si celle-ci agit en tant qu'exploitant individuel ou en tant qu'associé unique d'une EARL, il appartient à la section puis, le cas échéant, au juge, de rechercher, compte tenu des informations qui sont fournies au soutien de cette demande, notamment du siège de l'exploitation qui y est mentionné, si elle doit être regardée comme présentée au nom de l'exploitation individuelle ou au nom de l'EARL. Si la demande est présentée au nom de l'EARL, il appartient à la section puis, le cas échéant, au juge, de requalifier en ce sens la demande.,,4) Lorsqu'un associé exploitant d'une EARL conserve une activité agricole en dehors du périmètre de l'EARL, en qualité d'exploitant agricole à titre individuel, il peut demander à ce titre l'attribution de terres en application de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales.,,5) Si un exploitant agricole individuel, qui a obtenu l'attribution de terres dont une section est propriétaire, par bail rural ou par convention pluriannuelle de pâturage, devient ultérieurement l'associé d'une EARL, il peut mettre ces terres à la disposition de cette dernière conformément aux dispositions de l'article L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime, ou lui en faire apport conformément aux dispositions de l'article L. 411-38 du même code.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 jui. 2011, n° 345540
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Rapporteur public ?: M. Edouard Geffray

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:345540.20110615
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