La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2011 | FRANCE | N°320466

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 29 juin 2011, 320466


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre et 20 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0400362 du 13 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la prise en compte, pour le calcul de sa pension de retraite, de la période du 1er octobre 1966 au 30 septembre 1967, à titre principal, à raison du temps d'étude qu'il a accompli comme élève avec une bourse d'agrégation e

t, à titre subsidiaire, à raison des services de non titulaire qu'il a...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre et 20 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0400362 du 13 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la prise en compte, pour le calcul de sa pension de retraite, de la période du 1er octobre 1966 au 30 septembre 1967, à titre principal, à raison du temps d'étude qu'il a accompli comme élève avec une bourse d'agrégation et, à titre subsidiaire, à raison des services de non titulaire qu'il a effectués en qualité de moniteur de travaux pratiques à la faculté des lettres et des sciences humaines de Lyon ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu loi du 26 décembre 1908 de finances pour 1909 ;

Vu le décret du 31 août 1933 pris pour l'application de l'article 82 de la loi du 28 février 1933 ;

Vu le décret n° 46-1700 du 13 juillet 1946 ;

Vu le décret n° 56-595 du 15 juin 1956 ;

Vu le décret n° 69-1011 du 17 octobre 1969 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, Auditeur,

- les observations de Me Ricard, avocat de M. Alain A,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Ricard, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A a perçu durant l'année universitaire 1966/1967 une bourse d'agrégation , alors qu'il préparait les épreuves du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré, tout en exerçant des fonctions de moniteur de travaux pratiques à la faculté des lettres et des sciences humaines de Lyon ; que cette bourse lui a été attribuée à la suite de son succès aux épreuves du diplôme d'études supérieures ; qu'il a été nommé professeur certifié stagiaire à compter du 1er octobre 1967, puis titularisé à compter du 16 septembre 1968 ; que M. A, qui a été admis à la retraite le 1er mars 2003, a sollicité du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé de l'éducation nationale, par courrier du 29 septembre 2003, la révision de sa pension, afin que l'année universitaire 1966/1967 soit prise en compte parmi les annuités liquidables pour le calcul de sa pension ; qu'à la suite du refus qui lui a été opposé par le ministre de l'éducation nationale par courrier du 26 novembre 2003, confirmé par une décision du 14 janvier 2004 prise sur recours gracieux, M. A a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à l'annulation de cette dernière décision et à la prise en compte, parmi les annuités liquidables, de l'année universitaire 1966/1967 ; qu'il se pourvoit en cassation contre le jugement du 13 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant que l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit que le temps passé dans toutes positions ne comportant pas l'accomplissement de services effectifs peut, à titre dérogatoire, entrer en ligne de compte dans la constitution du droit à pension dans les cas exceptionnels prévus par une loi ou par un décret en Conseil d'Etat ; que l'article R. 9 du même code dispose que ces cas exceptionnels sont énumérés dans le tableau annexé au présent code ; que ce tableau est celui qui est publié en annexe au décret du 17 octobre 1969 portant règlement d'administration publique pour l'application des dispositions de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, parmi les dérogations, ce tableau mentionne, pour les fonctionnaires de l'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale, le temps d'études accompli comme élève : / - près des facultés, avec une bourse de licence ou d'agrégation (loi du 26 décembre 1908, art. 37) et précise que le texte autorisant cette dérogation est le 4° de l'article 1er du décret du 31 août 1933 pris pour l'application de l'article 82 de la loi du 28 février 1933 ; qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 26 décembre 1908 de finances pour 1909 : Le temps passé par les fonctionnaires de l'enseignement public, en qualité de boursiers de licence et d'agrégation près des facultés des lettres et des sciences, entrera en compte, jusqu'à concurrence de trois années, dans le calcul des services valables pour l'obtention d'une pension de retraite. ; que le 4° de l'article 1er du décret du 31 août 1933 autorise la prise en compte, parmi les annuités liquidables, du temps d'études accompli comme élève, dans les conditions ci-dessous spécifiées, par les fonctionnaires relevant du ministère de l'éducation nationale qui ont pris l'engagement de servir pendant un certain nombre d'années dans l'enseignement : / Près des facultés avec une bourse de licence ou d'agrégation (loi du 26 décembre 1908, art. 37) ;

Considérant qu'alors même qu'à l'époque où le législateur a adopté l'article 37 de la loi de finances pour 1909, les boursiers de licence et d'agrégation mentionnés à cet article étaient uniquement, compte tenu des modalités d'attribution des bourses universitaires alors en vigueur, les personnes qui avaient obtenu, à l'issue des concours communs aux candidats à l'Ecole normale supérieure et aux bourses de licence et d'agrégation près les facultés des sciences et des lettres créés en 1904, une bourse de licence ou d'agrégation assortie de l'engagement de restituer celle-ci au cas où elles ne serviraient pas pendant dix ans dans l'enseignement public, les dispositions combinées précitées, instituant la dérogation autorisant, pour les fonctionnaires de l'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale, la prise en compte pour la retraite du temps d'études accompli comme élève près des facultés avec une bourse de licence ou d'agrégation s'appliquent à toute période d'étude accomplie en qualité d'élève près des facultés avec une bourse de licence ou d'agrégation, dès lors que l'octroi de cette bourse a été assorti de l'engagement de servir pendant un certain nombre d'années dans l'enseignement public, sans que la dérogation ainsi prévue puisse être subordonnée au fait d'avoir passé les concours communs institués en 1904 et supprimés en 1960 ;

Considérant, dès lors, qu'en jugeant que le temps d'étude que M. A a accompli du 1er octobre 1966 au 30 septembre 1967 près la faculté des lettres et des sciences humaines de Lyon avec une bourse d'agrégation ne pouvait être pris en compte pour le calcul de ses droits à pension en application des articles L. 9 et R. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite, au seul motif que cette bourse lui avait été accordée sans qu'il ait été admis aux concours communs mentionnés ci-dessus, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que M. A est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice du 13 juin 2008 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à M. A de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 13 juin 2008 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Nice.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Alain A, au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 320466
Date de la décision : 29/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Analyses

48-02-01-04-02 PENSIONS. PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES DE RETRAITE. QUESTIONS COMMUNES. LIQUIDATION DES PENSIONS. SERVICES EFFECTIFS. - POSITIONS NE COMPORTANT PAS L'ACCOMPLISSEMENT DE SERVICES EFFECTIFS MAIS PRISES EN COMPTE POUR LA CONSTITUTION DU DROIT À PENSION (ART. L. 9 ET R. 9 DU CODE DES PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES DE RETRAITE ET ANNEXE AU DÉCRET DU 17 OCTOBRE 1969 PORTANT RÈGLEMENT D'ADMINISTRATION PUBLIQUE POUR L'APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L. 9 DE CE CODE) - TEMPS D'ÉTUDES ACCOMPLI COMME ÉLÈVE PRÈS DES FACULTÉS AVEC UNE BOURSE DE LICENCE OU D'AGRÉGATION - EXISTENCE [RJ1].

48-02-01-04-02 La dérogation autorisant, pour les fonctionnaires de l'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale, la prise en compte pour la retraite du temps d'études accompli comme élève près des facultés avec une bourse de licence ou d'agrégation ne peut pas être subordonnée au fait d'avoir passé les concours communs institués en 1904 et supprimés en 1960.


Références :

[RJ1]

Comp. CE, 24 juillet 1987, Ministre de l'éducation nationale c/ Pochon, n° 62449, T. p. 842.


Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2011, n° 320466
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : RICARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:320466.20110629
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award