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29/06/2011 | FRANCE | N°332562

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 29 juin 2011, 332562


Vu la requête, enregistrée le 6 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la CONFEDERATION GENERALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (CGPME) DE LA REUNION, dont le siège est 4, chemin Rouania - Ligne Paradis à Saint-Pierre (97410), la CHAMBRE SYNDICALE DES AMBULANCIERS AGREES DE LA REUNION, dont le siège est 23, rue Rodier, Appartement 2 à Saint-Pierre (97410), la FEDERATION REGIONALE DES TAXIS INDEPENDANTS, dont le siège est 23, chemin de la Fermette, Ravine Coco à Sainte-Marie (97438), la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTEURS DE VOYAGEURS, don

t le siège est 15, rue du Soleil, Zone de la Mare à Sainte...

Vu la requête, enregistrée le 6 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la CONFEDERATION GENERALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (CGPME) DE LA REUNION, dont le siège est 4, chemin Rouania - Ligne Paradis à Saint-Pierre (97410), la CHAMBRE SYNDICALE DES AMBULANCIERS AGREES DE LA REUNION, dont le siège est 23, rue Rodier, Appartement 2 à Saint-Pierre (97410), la FEDERATION REGIONALE DES TAXIS INDEPENDANTS, dont le siège est 23, chemin de la Fermette, Ravine Coco à Sainte-Marie (97438), la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTEURS DE VOYAGEURS, dont le siège est 15, rue du Soleil, Zone de la Mare à Sainte-Marie (97438), la FEDERATION DES TERRASSIERS DE LA REUNION, dont le siège est 26, chemin la Marque, Rivière des Roches, à Saint-Benoît (97470), l'ASSOCIATION DES ENTREPRISES DE LA REUNION, dont le siège est 941, chemin du Butor à Saint-André (97440), le SYNDICAT REUNIONNAIS DES TABACS PRESSE, dont le siège est 3, avenue de la Victoire à Saint-Denis (97400), le GROUPEMENT NATIONAL DES CARROSSIERS REPARATEURS, dont le siège est 9, rue de l'Anjou, ZAC du Moufia à Sainte-Clotilde (97490) ; la CGPME DE LA REUNION et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2009 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville portant extension du titre Ier de l'accord régional interprofessionnel de la Réunion, signé le 25 mai 2009 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

Sur la légalité externe de l'arrêté du 27 juillet 2009 :

En ce qui concerne l'avis préalable à l'extension et le recueil des observations des parties intéressées :

Considérant que, conformément aux dispositions de l'article D. 2261-3 du code du travail, l'arrêté attaqué, portant extension du titre Ier de l'accord régional interprofessionnel du 25 mai 2009, qui avait fait l'objet d'une demande du MEDEF Réunion, a été précédé, le 18 juin 2009, de la publication au Journal officiel de la République française - qui constitue la seule modalité de publicité exigée par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur - d'un avis invitant les organisations et les personnes intéressées à faire connaître leurs observations sur l'extension envisagée, portant sur l'octroi aux salariés de la Réunion compris dans son champ d'application d'un bonus exceptionnel ; que la sous-commission des conventions et accords de la Commission nationale de la négociation collective a ensuite été saisie pour avis avant que le ministre ne procède, par l'arrêté attaqué du 27 juillet 2009, à cette extension ;

Considérant qu'eu égard à la procédure prévue pour l'extension d'un accord collectif, dont le texte ainsi que les réserves que le ministre se propose d'y apporter sont soumis à l'avis des organisations syndicales principalement intéressées au sein de la Commission nationale de la négociation collective, le ministre n'est pas tenu de mentionner ces réserves dans l'avis d'extension publié au Journal officiel, une telle mention n'étant au demeurant prévue par aucune disposition législative ou réglementaire en vigueur ; qu'il suit de là que la circonstance que l'avis publié le 18 juin 2009 n'indiquait pas les deux réserves dont le ministre a, par la suite, assorti l'extension de l'accord du 25 mai 2009, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les syndicats requérants, les observations éventuellement produites à la suite de la publication de l'avis prévu à l'article D. 2261-3 du code du travail n'ont pas à être communiquées aux membres de la sous-commission des conventions et accords avant la séance ; qu'il ne résulte par ailleurs d'aucune disposition législative ou réglementaire que le ministre serait, le cas échéant, tenu de mentionner dans l'arrêté d'extension le contenu, le sens ou l'identité des auteurs de ces observations ; que le moyen tiré de ce que la procédure suivie aurait été irrégulière sur ce point doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne la consultation de la Commission nationale de la négociation collective :

Considérant qu'il résulte de l'article L. 2261-27 du code du travail que, lorsqu'un accord collectif n'a pas été signé par la totalité des organisations les plus représentatives intéressées, le ministre chargé du travail peut procéder à son extension après avoir recueilli l'avis motivé favorable de la Commission nationale de la négociation collective ; que, contrairement à ce que soutiennent les syndicats requérants, l'opposition écrite et motivée de deux organisations d'employeurs ou de deux organisations de salariés représentées à cette commission ne fait pas obstacle à l'extension d'un tel accord, mais impose seulement au ministre, s'il entend poursuivre le processus d'extension, d'une part, de consulter à nouveau la commission sur la base d'un rapport précisant la portée des dispositions en cause ainsi que les conséquences d'une éventuelle extension et, d'autre part, de motiver sa décision ; que, dès lors qu'en l'espèce deux organisations d'employeurs membres de la sous-commission des conventions et accords ont fait part de leur opposition à l'extension de l'accord du 25 mai 2009 dans les conditions indiquées ci-dessus, le ministre, en procédant à une seconde consultation de la commission sur la base d'un rapport dont l'existence ressort en particulier des énonciations non contestées de l'avis rendu par la sous-commission à l'issue de la séance du 23 juillet 2009, n'a fait que se conformer à la procédure décrite précédemment ;

Considérant que les avis rendus par la sous-commission des conventions et accords à l'issue de ses séances des 10 et 23 juillet 2009 ne se bornent pas à faire référence à la double opposition de la CGPME et de l'Union nationale des professions libérales (UNAPL), mais comportent l'exposé de considérations justifiant, d'une part, l'extension envisagée eu égard notamment aux objectifs poursuivis par l'accord du 25 mai 2009 et à ses conditions de négociation ainsi que, d'autre part, les deux réserves dont le ministre entendait assortir cette extension ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la motivation des avis rendus ne serait pas conforme aux exigences de l'article L. 2261-27 du code du travail doit être écarté ;

En ce qui concerne la motivation de l'arrêté d'extension :

Considérant que, si l'arrêté par lequel le ministre étend les stipulations d'un accord collectif n'est pas au nombre des actes soumis à l'obligation générale de motivation prévue par la loi du 11 juillet 1979, l'existence d'une double opposition dans les conditions prévues à l'article L. 2261-27 du code du travail oblige le ministre, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à motiver sa décision d'extension ; qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué, qui fait référence aux deux avis motivés de la Commission nationale de la négociation collective et aux oppositions formulées par deux organisations syndicales d'employeurs, comporte des considérations justifiant l'extension, sous deux réserves elles aussi assorties de justifications, de l'accord du 25 mai 2009, qui doivent être regardées comme satisfaisant à l'exigence de motivation posée par l'article L. 2261-27 du code du travail ;

Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne les conditions de conclusion de l'accord régional interprofessionnel du 25 mai 2009 :

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 2261-19 du code du travail que, pour qu'une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel puisse légalement être étendu, les représentants de l'ensemble des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré doivent avoir été invités à la négociation de cette convention ou de cet accord ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le syndicat local des entreprises distributrices de carburants aurait dû être convié à la négociation en raison de son caractère d'organisation représentative des employeurs de ce secteur d'activité n'est pas assorti des précisions qui permettraient d'en apprécier le bien-fondé ; que la circonstance que le MEDEF Réunion ne serait pas représentatif de ce même secteur d'activité serait, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de l'arrêté d'extension, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'arrêté attaqué et des stipulations de l'article premier de l'accord régional interprofessionnel du 25 mai 2009 que celui-ci ne saurait avoir pour effet de rendre applicable les stipulations du titre Ier de l'accord étendu aux employeurs des secteurs dont le MEDEF Réunion n'est pas représentatif ; que, si les syndicats requérants contestent la représentativité du MEDEF Réunion dans le champ d'application de cet accord, ils n'apportent aucun élément de nature à la remettre sérieusement en cause ;

En ce qui concerne la qualité du MEDEF Réunion pour signer l'accord régional interprofessionnel du 25 mai 2009 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2231-1 du code du travail : Les associations d'employeurs constituées conformément aux dispositions de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, qui ont compétence pour négocier des conventions et accords, sont assimilées aux organisations syndicales pour les attributions conférées à celles-ci par le présent titre ; que le MEDEF Réunion, association d'employeurs constituée conformément à la loi du 1er juillet 1901 et composée des employeurs et des organisations d'employeurs qui y adhèrent, constitue une personne morale distincte du MEDEF, association à vocation nationale ; que, par suite, pour contester la compétence du MEDEF Réunion pour négocier et signer l'accord du 25 mai 2009, les syndicats requérants ne sauraient utilement soutenir que le MEDEF ne disposerait pas d'une telle capacité ; qu'ils ne sauraient pas davantage utilement se référer aux statuts ou au règlement intérieur du MEDEF national, dès lors que l'objet et la capacité du MEDEF Réunion ne peut résulter que de ses seuls statuts ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que cet accord serait invalide faute d'avoir été signé par une organisation ayant qualité pour ce faire doit être écarté ; que, par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que le MEDEF Réunion n'était pas habilité à saisir le ministre d'une demande d'extension de cet accord en application de l'article L. 2261-24 du code du travail ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le MEDEF Réunion, la CGPME DE LA REUNION et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la CGPME DE LA REUNION et autres et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des syndicats requérants, pris ensemble, le versement au MEDEF Réunion de la somme de 3 000 euros au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la CGPME DE LA REUNION et autres est rejetée.

Article 2 : La CGPME DE LA REUNION et autres verseront ensemble au MEDEF Réunion une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CONFEDERATION GENERALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES DE LA REUNION, à la CHAMBRE SYNDICALE DES AMBULANCIERS AGREES DE LA REUNION, à la FEDERATION REGIONALE DES TAXIS INDEPENDANTS, à la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTEURS DE VOYAGEURS, à la FEDERATION DES TERRASSIERS DE LA REUNION, à l'ASSOCIATION DES ENTREPRISES DE LA REUNION, au SYNDICAT REUNIONNAIS DES TABACS PRESSE, au GROUPEMENT NATIONAL DES CARROSSIERS REPARATEURS, au MEDEF Réunion, à l'UIR-CFDT, à la CGTR, à la CFTC, à la CFE-CGC, à l'UNSA Réunion et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 332562
Date de la décision : 29/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2011, n° 332562
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Jean Lessi
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:332562.20110629
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