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11/07/2011 | FRANCE | N°334277

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 11 juillet 2011, 334277


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 décembre et 17 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES ; la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 09PA05112 du 16 novembre 2009 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'ordonnance du 23 juillet 2009 du juge des référés du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande aux fins de condamnation de l'Et

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 décembre et 17 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES ; la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 09PA05112 du 16 novembre 2009 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'ordonnance du 23 juillet 2009 du juge des référés du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande aux fins de condamnation de l'Etat à lui verser des dommages et intérêts à titre de provision en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi, de janvier 2004 à février 2008, du fait du transfert aux communes, par des dispositions réglementaires illégales, de la charge de recueillir les demandes de cartes nationales d'identité et de passeports et de délivrer ces documents ;

2°) statuant en référé, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 553 344,38 euros à titre de provision, avec intérêts à compter de la requête introductive d'instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, notamment son article 103 ;

Vu la décision n° 2010-12 QPC du 2 juillet 2010 par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les paragraphes II et III de l'article 103 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ;

Considérant que, par plusieurs arrêts, le Conseil d'Etat a constaté l'illégalité des dispositions de l'article 4 du décret du 25 novembre 1999 modifiant le décret du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité et de l'article 7 du décret du 26 février 2001 relatif aux conditions de délivrance et de renouvellement des passeports, qui transféraient aux maires la charge de recueillir et de transmettre les demandes de carte nationale d'identité et de passeport et de remettre ces titres aux demandeurs ; que la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article L. 541-1 du code de justice administrative aux fins de voir condamner l'Etat à lui payer à titre de provision des dommages et intérêts en réparation du préjudice ayant résulté pour elle de l'application des dispositions réglementaires illégales ; que, le juge des référés ayant rejeté sa requête, la commune a interjeté appel ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'ordonnance en date du 16 novembre 2009 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du II de l'article 103 de la loi de finances rectificative pour 2008 du 30 décembre 2008 : Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les communes ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l'incompétence du pouvoir réglementaire à mettre à leur charge les dépenses résultant, postérieurement au 25 novembre 1999, de l'exercice par les maires des missions de réception et de saisie des demandes de cartes nationales d'identité ainsi que de remise aux intéressés de ces titres, d'un préjudice correspondant à ces dépenses ; qu'en vertu du second alinéa du II du même article, il en est de même, postérieurement au 26 février 2001, pour les demandes de passeports ; que le III du même article institue, en contrepartie de l'application du II, une dotation exceptionnelle attribuée aux communes au titre de l'indemnisation des charges résultant pour elles, jusqu'au 31 décembre 2008, de l'application du décret du 25 novembre 1999 et du décret du 26 février 2001, pour le recueil des demandes et la remise aux intéressés des cartes nationales d'identité et des passeports ; que le troisième alinéa du III dispose que : Les communes qui ont engagé un contentieux indemnitaire fondé sur l'illégalité du décret n° 99-973 du 25 novembre 1999 ou du décret n° 2001-185 du 26 février 2001 précités ne sont éligibles à cette dotation exceptionnelle qu'à la condition que cette instance soit close par une décision passée en force de chose jugée et excluant toute condamnation de l'Etat ;

Considérant, en premier lieu, que le Conseil constitutionnel ayant, par sa décision n° 2010-12 QPC du 2 juillet 2010, déclaré conformes à la Constitution les dispositions des paragraphes II et III de l'article 103 de la loi précitée du 30 décembre 2008, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient des droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il appartient au juge des référés, saisi d'un moyen en ce sens, de contrôler si les dispositions réglementaires ou législatives dont il fait application ne sont pas manifestement incompatibles avec des normes internationales ; qu'en l'espèce, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a examiné si, comme le soutenait la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES, les dispositions de l'article 103 de la loi du 30 décembre 2008 étaient contraires à l'article 6, paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention et à l'article 14, paragraphe 1 du pacte international relatif aux droits civils et politiques ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que le juge des référés aurait commis une erreur de droit en jugeant qu'il ne lui appartenait pas, eu égard à son office, de procéder à un contrôle de conventionalité des dispositions précitées manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour écarter les moyens de la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES tirés de ce que les dispositions de l'article 103 de la loi du 30 décembre 2008 seraient contraires aux stipulations conventionnelles précitées, le juge des référés de la cour administrative a retenu que ces stipulations étaient inapplicables dans un litige relatif à la répartition de ressources financières publiques entre personnes publiques ; qu'en se déterminant ainsi et dès lors que le litige dont il était saisi portait sur l'étendue de l'obligation de l'Etat au titre des dépenses relatives à l'exercice par le maire d'une commune des missions de réception et de saisie des demandes de cartes nationales d'identité et de passeports ainsi que de remises aux intéressés de ces titres, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions du II de l'article 103 de la loi du 30 décembre 2008 que, sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les communes ne peuvent se prévaloir du préjudice résultant de l'application des décrets des 25 novembre 1999 et 26 février 2001 relatifs aux conditions de délivrance et de renouvellement, respectivement, des cartes nationales d'identité et des passeports ; que le droit à une indemnisation forfaitaire institué en contrepartie par les deux premiers alinéas du III de l'article 103 de la loi du 30 décembre 2008 est subordonné, pour les communes ayant engagé un contentieux indemnitaire, à la condition prévue par les dispositions du troisième alinéa aux termes duquel l'instance doit être close par une décision passée en force de chose jugée et excluant toute condamnation de l'Etat ; que cette dernière disposition a pour objet, non d'offrir aux communes le choix entre deux modalités d'indemnisation, mais d'éviter la double indemnisation qui pourrait résulter du versement, d'une part, de dommages et intérêts alloués par une décision juridictionnelle et, d'autre part, de l'indemnité forfaitaire prévue par la loi ; qu'il en résulte qu'elle ne saurait faire obstacle à l'application des dispositions déjà mentionnées du II de l'article 103 dont il résulte que les communes peuvent exclusivement prétendre au bénéfice de l'indemnité forfaitaire ; que, par suite, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a suffisamment motivé sa décision et n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'en l'absence de décision passée en force de chose jugée, les dispositions de l'article 103 de la loi du 30 décembre 2008 faisaient obstacle à ce que la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES se prévale du préjudice résultant de l'illégalité de l'article 4 du décret du 25 novembre 1999 et de l'article 7 du décret du 26 février 2001 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris en date du 16 novembre 2009 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE L'HAY-LES-ROSES et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 jui. 2011, n° 334277
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Sylvie Hubac
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Jean-Philippe Thiellay
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 11/07/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 334277
Numéro NOR : CETATEXT000024364438 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-07-11;334277 ?
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