La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/07/2011 | FRANCE | N°338390

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 18 juillet 2011, 338390


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 avril 2010 et 6 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Gwennaëlle A, demeurant au ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2009-29 du 1er octobre 2009 par laquelle l'Agence française de lutte contre le dopage a prononcé à son encontre la sanction de l'interdiction de participer pendant six mois aux compétitions et manifestations sportives organisées par la Fédération française du sport universitaire et par la Fédération frança

ise d'escrime ;

2°) de la relaxer des poursuites suivies contre elle pour...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 avril 2010 et 6 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Gwennaëlle A, demeurant au ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2009-29 du 1er octobre 2009 par laquelle l'Agence française de lutte contre le dopage a prononcé à son encontre la sanction de l'interdiction de participer pendant six mois aux compétitions et manifestations sportives organisées par la Fédération française du sport universitaire et par la Fédération française d'escrime ;

2°) de la relaxer des poursuites suivies contre elle pour dopage ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code du sport ;

Vu le décret n° 2009-93 du 26 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Gargoullaud, chargée des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Mme A et de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage,

- les conclusions de M. Damien Botteghi, rapporteur public,

La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Mme A et de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue de la rencontre des championnats de France universitaires d'escrime, organisés à Orléans le 19 mars 2009, Mme A, titulaire d'une licence de la fédération française du sport universitaire et qui venait d'obtenir une médaille de bronze, a été soumise à un contrôle antidopage qui a révélé la présence d'acide-11-nor-delta-9-THC-9 carboxylique, métabolite du tétrahydrocannabinol, principe actif du cannabis, à une concentration estimée à 145 nanogrammes par millilitre ; que cette substance, qui appartient à la classe des cannabinoïdes, figure sur la liste des produits interdits en vertu de l'article L. 232-9 du code du sport ; que, par une décision du 26 juin 2009, la commission nationale de première instance de la Fédération française du sport universitaire a annulé le résultat individuel obtenu par Mme A et prononcé une sanction d'interdiction de compétition de douze mois assortie d'un sursis total ; que l'Agence française de lutte contre le dopage, se saisissant des faits sur le fondement du 3° de l'article L. 232-22 du code du sport, a infligé à Mme A, par une décision du 1er octobre 2009, la sanction de l'interdiction de participer pendant six mois aux compétitions et manifestations sportives organisées par la Fédération française du sport universitaire et par la Fédération française d'escrime ; que Mme A demande l'annulation de cette décision de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

Considérant, en premier lieu, qu'en rappelant les dispositions applicables du code du sport et en détaillant les éléments qui l'amenaient à considérer, d'une part, qu'aucune irrégularité n'avait été commise dans la procédure de contrôle et, d'autre part, que la prise de cannabis par Mme A était établie, eu égard, à la concentration de cette substance détectée dans ses urines lors du contrôle antidopage du 19 mars 2009, l'Agence française de lutte contre le dopage a, contrairement à ce que prétend la requérante, suffisamment motivé sa décision ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 232-18 du code du sport : Les analyses des prélèvements effectués par l'Agence française de lutte contre le dopage sont réalisées sous la responsabilité scientifique et technique du directeur du département des analyses. Pour ces analyses, l'agence peut faire appel à d'autres laboratoires dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat (...) ; qu'aux termes de l'article R. 232 43 du même code : Le département des analyses ne procède aux analyses mentionnées à l'article L. 232-18 que si les échantillons qui lui sont transmis sont anonymes. Ces analyses sont effectuées conformément aux normes internationales. Pour leur réalisation, le directeur du département des analyses ne peut recevoir aucune instruction ; qu'il n'est pas contesté que l'analyse effectuée par le département des analyses de l'Agence à la suite du contrôle antidopage effectué le 19 mars 2009 a été accomplie conformément au code du sport ; que si Mme A a fait réaliser près de trois mois plus tard une expertise par un autre laboratoire à qui elle a transmis, le 10 juin 2009, un échantillon d'urine, le résultat de cette expertise ne saurait, en tout état de cause, conduire à remettre en cause ceux de l'analyse réalisée par le département des analyses dans les conditions prévues par le code du sport ; qu'ainsi, l'Agence française de lutte contre le dopage, qui a d'ailleurs examiné les résultats de cette expertise, n'a méconnu ni les droits de la défense ni les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant la décision attaquée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des trois premiers alinéas de l'article L. 232-23 du code du sport, résultant de l'ordonnance n° 2006-596 du 23 mai 2006 : L'Agence française de lutte contre le dopage, dans l'exercice de son pouvoir de sanction, conformément à l'article L. 232-22, peut prononcer :/ 1° A l'encontre des sportifs reconnus coupables des faits interdits par les articles L. 232-9 et L. 232-17, une interdiction temporaire ou définitive de participer aux compétitions et manifestations mentionnées à l'article L. 232-9 ;/ 2° A l'encontre des licenciés participant à l'organisation et au déroulement de ces compétitions et manifestations ou aux entraînements y préparant reconnus coupables des faits interdits par l'article L. 232-10, une interdiction temporaire ou définitive de participer, directement ou indirectement, à l'organisation et au déroulement des compétitions et manifestations sportives mentionnées à l'article L. 232-9, et aux entraînements y préparant, ainsi qu'une interdiction temporaire ou définitive d'exercer les fonctions définies au premier alinéa de l'article L. 212 1 ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de conférer un caractère automatique au pouvoir de sanction confié à l'Agence et lui permettent d'exercer une pleine modulation des sanctions qu'elle inflige ; qu'elles n'ont nullement pour objet de déterminer les conditions dans lesquelles l'exécution des décisions de l'Agence peut, le cas échéant, être suspendue dans l'attente qu'il soit statué sur les recours juridictionnels susceptibles d'être formés à l'encontre de ces décisions ; qu'au surplus, il ne résulte pas de l'instruction que l'Agence française de lutte contre le dopage s'est estimée tenue de prononcer la sanction attaquée ni qu'elle s'est dispensée d'examiner, comme elle le doit, l'ensemble des éléments de fait et de droit de nature à établir la nécessité de cette sanction ; que, dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance du principe de personnalité des peines, du principe des droits de la défense et des stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale contre le dopage dans le sport : Les Etats parties s'engagent à :/ (a) adopter des mesures appropriées aux niveaux national et international qui soient conformes aux principes énoncés dans le Code mondial antidopage adopté par l'Agence mondiale antidopage le 5 mars 2003 (...) ; qu'aux termes de son article 4 : ... 2. Le texte du Code et la version la plus récente des appendices 2 et 3 sont reproduits à titre d'information et ne font pas partie intégrante de la présente Convention. Les appendices, en tant que tels, ne créent aucune obligation contraignante en droit international pour les Etats parties ; qu'il en résulte que les stipulations du code mondial antidopage, qui constitue le premier appendice de la convention internationale contre le dopage dans le sport, ne produisent pas d'effets entre les Etats ni, par voie de conséquence, à l'égard des particuliers et ne peuvent donc pas être utilement invoquées, à défaut de tout renvoi du code du sport, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation d'une décision individuelle ou réglementaire ; qu'ainsi, Mme A ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 10.5.2. du code mondial antidopage, qui prévoient la possibilité d'une réduction de la période de suspension en cas de circonstances exceptionnelles, pour soutenir que la sanction d'interdiction de participer, pour une durée de six mois, aux compétitions ou manifestations sportives organisées par la Fédération française du sport universitaire et par la Fédération française d'escrime présenterait un caractère disproportionné ; qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, et notamment à la concentration de cannabis constatée lors du contrôle et au fait que Mme A ne pouvait ignorer que la consommation de ce produit était interdite, la sanction prononcée par l'agence n'est pas disproportionnée ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision en date du 1er octobre 2009 de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Gwenaëlle A, à l'Agence française de lutte contre le dopage, à la Fédération française du sport universitaire et à la Fédération française d'escrime.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 18 jui. 2011, n° 338390
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Edmond Honorat
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Gargoullaud
Rapporteur public ?: M. Damien Botteghi
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 18/07/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 338390
Numéro NOR : CETATEXT000024390154 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-07-18;338390 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award