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19/07/2011 | FRANCE | N°329141

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 19 juillet 2011, 329141


Vu, 1°), sous le n° 329141, la requête, enregistrée le 24 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CHRISDERIC, dont le siège est 5 rue Blaise Pascal à Saint-Cyprien (66750), représentée par son gérant ; la SOCIETE CHRISDERIC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 5 juin 2009 portant modification de l'arrêté du 30 janvier 2009 établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) de l'océan Atlantique à l'est de la longitude 45° O et la

Méditerranée accordé à la France pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre à l'Et...

Vu, 1°), sous le n° 329141, la requête, enregistrée le 24 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CHRISDERIC, dont le siège est 5 rue Blaise Pascal à Saint-Cyprien (66750), représentée par son gérant ; la SOCIETE CHRISDERIC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 5 juin 2009 portant modification de l'arrêté du 30 janvier 2009 établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) de l'océan Atlantique à l'est de la longitude 45° O et la Méditerranée accordé à la France pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de mettre en recouvrement les sommes correspondant au montant de l'aide illégalement versée au producteur " Thon du Nord " en application de l'arrêté du 5 juin 2009, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°), sous le n° 329143, la requête enregistrée le 24 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE RAYMOND ELISE, dont le siège est 33 rue des Jardins de la Mer Le Grau d'Agde à Agde (34300), représentée par son gérant ; la SOCIETE RAYMOND ELISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 5 juin 2009 portant modification de l'arrêté du 30 janvier 2009 établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) de l'océan Atlantique à l'est de la longitude 45° O et la Méditerranée accordé à la France pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de mettre en recouvrement les sommes correspondant au montant de l'aide illégalement versée au producteur " Thon du Nord " en application de l'arrêté du 5 juin 2009, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 3°), sous le n° 329145, la requête enregistrée le 24 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. André A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 5 juin 2009 portant modification de l'arrêté du 30 janvier 2009 établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) de l'océan Atlantique à l'est de la longitude 45° O et la Méditerranée accordé à la France pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de mettre en recouvrement les sommes correspondant au montant de l'aide illégalement versée au producteur " Thon du Nord " en application de l'arrêté du 5 juin 2009, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 juin 2011, présentée par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la convention internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique du 14 mai 1966 ;

Vu le règlement (CE) n° 643/2007 du Conseil du 11 juin 2007 ;

Vu le règlement (CE) n° 1559/2007 du Conseil du 17 décembre 2007 ;

Vu le règlement (CE) n° 43/2009 du Conseil du 16 janvier 2009 ;

Vu le règlement (CE) n° 302/2009 du Conseil du 6 avril 2009 ;

Vu le décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime ;

Vu le décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

Vu l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 26 décembre 2006 établissant les modalités de répartition et de gestion collective des possibilités de pêche (quotas de captures et quotas d'effort de pêche) des navires français immatriculés dans la Communauté européenne ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Allais, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes de la SOCIETE CHRISDERIC, de la SOCIETE RAYMOND ELISE et de M. A sont dirigées contre le même arrêté du 5 juin 2009 du ministre de l'agriculture et de la pêche ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 5 juin 2009 :

Sur la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement que M. Philippe Mauguin, directeur des pêches maritimes et de l'aquaculture au ministère de l'agriculture et de la pêche, dont l'acte de nomination a été publié au Journal officiel de la République française le 23 mai 2009, avait de ce fait qualité pour signer l'arrêté attaqué au nom du ministre compétent ; que le moyen d'incompétence invoqué par les requérants doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que si les visas de l'arrêté attaqué ne comportent pas la mention du règlement (CE) n° 302/2009 du Conseil du 6 avril 2009 relatif à un plan pluriannuel de reconstitution des stocks de thon rouge dans l'Atlantique Est et la Méditerranée, modifiant le règlement (CE) n° 43/2009 et abrogeant le règlement (CE) n° 1559/2007, ce défaut est sans influence sur la régularité de l'arrêté attaqué ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 14 du décret du 25 janvier 1990 pris pour l'application des articles 3 et 13 du décret du 9 janvier 1852 modifié sur l'exercice de la pêche maritime : " Lorsque, en application de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 (...) le ministre chargé des pêches maritimes procède à la répartition des quotas en sous-quotas, il agit après consultation de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins et des organisations professionnelles concernées. " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les arrêtés par lesquels le ministre de l'agriculture et de la pêche opère la répartition en sous-quotas des quotas de pêche alloués à la France en application de la réglementation communautaire doivent en principe être précédés d'une consultation, d'une part, de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins, d'autre part, des organisations professionnelles de pêcheurs concernées par cette répartition ;

Considérant toutefois que l'arrêté contesté du 5 juin 2009, s'il procède à l'abrogation de l'arrêté du 8 avril 2009 portant modification de l'arrêté du 30 janvier 2009 établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) de l'océan Atlantique à l'est de la longitude 45° O et la Méditerranée accordé à la France pour l'année 2009, se borne en réalité à modifier la répartition du quota de thon rouge alloué en 2009 en sous-quotas entre les navires pêchant à la senne de surface en Méditerranée, issue de cet arrêté du 8 avril 2009, afin de prendre en compte un transfert de 2,813 tonnes entre les navires " Sainte- Bernadette 2 " et " Vent du Nord ", appartenant tous deux au producteur " Vent du Nord ", ainsi que des transferts de 45 tonnes, d'une part, entre les navires " Jean-Marie Christian 3 " et " Jean-Marie Christian 5 " et, d'autre part, entre les navires " Jean-Marie Christian 6 " et " Jean-Marie Christian 7 ", navires appartenant tous au même producteur " SDF Armement Avallone Frères " ; que le comité national des pêches maritimes et des élevages marins ainsi que les organisations professionnelles de pêcheurs concernées ont été consultés sur l'arrêté du 8 avril 2009, lequel prévoyait, dans son article 3, la possibilité de réaliser un transfert de sous-quota de thon rouge, au sein d'un même armement, entre les navires senneurs immatriculés en mer Méditerranée et titulaires d'un permis de pêche spécial " thon rouge " ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, l'absence d'une nouvelle consultation de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins et des organisations professionnelles de pêcheurs concernées n'entache pas l'arrêté attaqué du 5 juin 2009 d'un vice de procédure ;

Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que le règlement (CE) n° 43/2009 du Conseil du 16 janvier 2009 établissant, pour 2009, les possibilités de pêche et les conditions associées pour certains stocks halieutiques et groupes de stocks halieutiques, applicables dans les eaux communautaires et, pour les navires communautaires, dans les eaux soumises à des limitations de capture, au vu duquel a été pris l'arrêté attaqué, aurait méconnu l'article 253 du traité instituant la Communauté européenne (TCE) faute de viser les règlements n° 643/2007 du Conseil du 11 juin 2007 et n° 1559/2007 du Conseil du 17 décembre 2007 ; que, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), et notamment son arrêt du 10 janvier 2006 " International Air Transport Association " (C-344/04), si la motivation exigée par l'article 253 du TCE doit faire apparaître d'une façon claire et non équivoque le raisonnement de l'autorité communautaire, auteur de l'acte en cause, de manière à permettre aux personnes concernées par cette mesure de connaître ses justifications et à la Cour d'exercer son contrôle, il n'est toutefois pas exigé qu'elle spécifie tous les éléments de droit ou de fait pertinents ; qu'ainsi le règlement n° 43/2009, qui fixe les quotas de pêche applicables à de nombreuses espèces de poissons, en faisant ressortir l'essentiel de l'objectif poursuivi par le Conseil, n'a pas méconnu l'obligation de motivation posée par les stipulations de cet article, dont le respect n'exigeait pas que le choix technique concernant le thon rouge fût spécifiquement motivé ;

Considérant que les requérants soutiennent par ailleurs que le règlement n° 43/2009 aurait fait application à tort de la recommandation n° 08-05 de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA) qui n'était pas encore entrée en vigueur et aurait ainsi méconnu les recommandations n° 06-05 et n° 07-04 de la CICTA, alors en vigueur ; que, dès lors qu'il n'est pas établi ni même allégué que les auteurs du règlement n° 43/2009 du 16 janvier 2009 se seraient cru tenus de faire application du total admissible de captures (TAC) fixé par la recommandation n° 08-05, adoptée en novembre 2008, qui n'est entrée en vigueur que le 17 juin 2009, le TAC représentant un tonnage maximum de possibilité de pêche à ne pas dépasser, le règlement n° 43/2009 n'a en tout état de cause pas méconnu les recommandations de la CICTA alors en vigueur en retenant un quota inférieur au TAC qui résultait de ces dernières ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu, en l'absence de difficulté sérieuse quant à la validité du règlement (CE) n° 43/2009 du Conseil du 16 janvier 2009, de saisir, sur ce point, la CJUE d'une question préjudicielle, que les moyens dirigés, par la voie de l'exception, contre ce règlement communautaire doivent, en tout état de cause, être écartés ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 87, paragraphe 1, du Traité instituant la Communauté européenne (TCE) : " Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. " ; que, si les requérants soutiennent qu'en réaffectant les sous-quotas des navires sortis de flotte aux autres navires possédés par les mêmes producteurs, l'arrêté attaqué aurait attribué aux producteurs concernés des aides d'Etat et méconnu les stipulations de l'article 88, paragraphe 3, du TCE qui imposent la notification préalable de ces mesures d'aide à la Commission européenne, l'attribution d'un sous-quota de pêche ne saurait être qualifiée d'aide d'Etat ; que, par suite, le moyen tiré par les requérants d'une méconnaissance par l'arrêté attaqué des stipulations de l'article 88, paragraphe 3, du TCE doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que le principe général d'égalité de traitement, en tant que principe général du droit communautaire, impose que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, au regard des finalités de la réglementation communautaire de limitation des captures, qui a pour objet de garantir l'exploitation durable des ressources halieutiques, les producteurs adhérents à une organisation de producteurs ne se trouvent pas dans une situation différente des producteurs non adhérents à une organisation, que ceux-ci disposent d'un ou de plusieurs navires ; que, par eux-mêmes, les décrets des 9 janvier 1852 et 25 janvier 1990, qui laissent au demeurant une grande marge d'appréciation au ministre pour combiner les trois critères de répartition qu'ils prévoient, ne méconnaissent pas le principe général du droit communautaire d'égalité et de non-discrimination ; que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de ces décrets doit dès lors être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du I de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " En vue d'assurer un développement économique durable du secteur de la pêche, et notamment de garantir l'accès à la ressource et la bonne utilisation de celle-ci, des décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions dans lesquelles, en tenant compte des antériorités des producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques : / (...) b) Il est procédé par l'autorité administrative à la répartition de quotas de captures, institués en vertu de la réglementation communautaire ou du présent décret, en sous-quotas affectés soit à des organisations de producteurs ou à leurs unions qui en assurent la gestion, soit à des navires ou à des groupements de navires. (...) " ; que l'article 14 du décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 pris pour l'application des articles 3 et 13 du décret précité du 9 janvier 1852 précise que lorsque, en application de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852, le ministre chargé des pêches maritimes procède à la répartition des quotas en sous-quotas, " il procède à cette répartition en tenant compte des antériorités des producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques " ; qu'il résulte des dispositions précitées que le ministre chargé des pêches, lorsqu'il décide de répartir les quotas de pêche, doit combiner les trois critères tirés des antériorités des producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques qu'elles mentionnent ; que ces dispositions n'imposent aucune modalité particulière de prise en compte des orientations du marché et des équilibres socio-économiques ; que si les requérants soutiennent qu'en diminuant " automatiquement " la plupart des sous-quotas attribués l'année précédente d'un pourcentage de 27 % correspondant à la baisse du quota annuel de thon rouge attribué à la France par la Communauté européenne pour la mer Méditerranée entre 2008 et 2009, l'arrêté attaqué n'aurait pris en compte que le seul critère des antériorités, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le ministre n'aurait pas tenu compte cumulativement des trois critères ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait méconnu les dispositions précitées des décrets des 9 janvier 1852 et 25 janvier 1990 ne peut dès lors qu'être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 26 décembre 2006 établissant les modalités de répartition et de gestion collective des possibilités de pêche (quotas de captures et quotas d'effort de pêche) des navires français immatriculés dans la Communauté européenne, un navire de pêche hors organisation de producteurs (OP) est défini comme un " navire de pêche battant pavillon français et immatriculé dans la Communauté européenne, déclaré actif au fichier de la flotte de pêche communautaire et non adhérent d'une OP ", alors qu'un groupement de navires de pêche est défini comme un " ensemble constitué de plus d'un navire de pêche battant pavillon français, immatriculés dans la Communauté européenne, déclaré actif au fichier de la flotte de pêche communautaire ", un tel ensemble étant constitué aux fins de la gestion d'un ou plusieurs quotas ; qu'aux termes du 1 de l'article 9 du même arrêté : " Chaque OP ou navire ou groupement de navires de producteurs dispose d'une part relative du quota. (...) " ; qu'aux termes du b) du 2 de l'article 10 du même arrêté : " L'arrêt définitif d'activité avec aide publique du navire dont le producteur non adhérent d'une OP poursuit son activité avec un ou plusieurs autres navires n'entraîne pas de modification de la part relative annuelle des navires hors OP. " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté attaqué du 5 juin 2009 : " Le quota de thon rouge (Thunnus thynnus) alloué à la France pour l'année 2009 est réparti, pour la mer Méditerranée : / 3 017 tonnes, de façon individuelle entre les navires pêchant à la senne de surface titulaires d'un permis de pêche spécial " thon rouge ", conformément aux règles de répartition définies dans l'arrêté du 26 décembre 2006 établissant les modalités de répartition et de gestion collective des possibilités de pêche et comme indiqué dans l'annexe I du présent arrêté (...) " ;

Considérant que lorsque les deux conditions prévues par les dispositions précitées du b) du 2 de l'article 10 de l'arrêté du 26 décembre 2006 sont remplies et que, par suite, la part relative annuelle des navires hors OP est maintenue, aucune disposition n'autorise le ministre de l'agriculture et de la pêche, pour garantir ce maintien, à attribuer automatiquement le sous-quota précédemment attribué au navire sorti de flotte aux seuls autres navires appartenant au même producteur ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que l'arrêté attaqué attribue au navire " Vent du Nord " le sous-quota attribué l'année précédente au navire " Marc Al " sorti de flotte avec aide publique et appartenant au même producteur " Thon du Nord ", et réaffecte les sous-quotas attribués l'année précédente aux navires sortis de flotte appartenant au producteur " Avallone Frères " aux autres navires possédés par ce dernier producteur ; qu'en réaffectant les sous-quotas des navires sortis de flotte aux autres navires appartenant aux mêmes producteurs, l'arrêté attaqué du 5 juin 2009 a méconnu les dispositions de l'article 10 de l'arrêté du 26 décembre 2006 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'arrêté attaqué du 5 juin 2009 en tant qu'il répartit, par son annexe I, le quota de thon rouge alloué en 2009 aux navires pêchant à la senne de surface en Méditerranée ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, les requérants présentent des conclusions tendant à ce que le Conseil d'Etat enjoigne au ministre de l'agriculture et de la pêche de prendre un nouvel arrêté établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) de l'océan Atlantique à l'est de la longitude 45° O et la Méditerranée accordé à la France pour l'année 2009 et enjoigne à l'Etat, sous astreinte, de mettre en recouvrement les sommes correspondant au montant des aides qui auraient été selon eux illégalement versées aux producteurs " Thon du Nord " et " Avallone Frères " en application de l'arrêté du 5 juin 2009 ; que la présente décision n'implique pas nécessairement que soit pris un nouvel arrêté de répartition du quota de thon rouge pour l'année 2009, ni que soit ordonné le reversement d'aides d'Etat qui auraient été versées aux producteurs " Thon du Nord " et " Avallone Frères ", dès lors que ces producteurs n'ont bénéficié d'aucune aide de ce type, comme il a été dit ci-dessus ; que, par suite, les conclusions présentées par les requérants aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacun des requérants d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêté du 5 juin 2009 du ministre de l'agriculture et de la pêche est annulé en tant qu'il répartit, par son annexe I, le quota de thon rouge alloué en 2009 aux navires pêchant à la senne de surface en Méditerranée.

Article 2 : L'Etat versera respectivement à la SOCIETE CHRISDERIC, à la SOCIETE RAYMOND ELISE et à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CHRISDERIC, à la SOCIETE RAYMOND ELISE, à M. A et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 329141
Date de la décision : 19/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - PROCÉDURE CONSULTATIVE - CONSULTATION OBLIGATOIRE - ARRÊTÉ ÉTABLISSANT LES MODALITÉS DE RÉPARTITION DE QUOTAS DE PÊCHE - CONSULTATION DES ORGANISATIONS INTERPROFESSIONNELLE ET PROFESSIONNELLES - EXCEPTION - ARRÊTÉ SE BORNANT À MODIFIER LA RÉPARTITION EN SOUS-QUOTAS D'UN QUOTA AYANT FAIT L'OBJET D'UN PRÉCÉDENT ARRÊTÉ SOUMIS À CONSULTATION.

01-03-02-02 Les arrêtés par lesquels le ministre de l'agriculture et de la pêche opère la répartition en sous-quotas des quotas de pêche alloués à la France en application de la réglementation communautaire doivent en principe être précédés de la consultation de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins ainsi que des organisations professionnelles de pêcheurs concernées. Toutefois, dans le cas particulier d'un arrêté se bornant à modifier la répartition en sous-quotas entre navires d'un quota ayant fait l'objet d'un précédent arrêté, soumis à consultation, et qui prévoyait la possibilité d'un transfert de quota entre les navires en cause, l'absence de consultation ne l'entache pas d'irrégularité.

- THON ROUGE - ARRÊTÉ ÉTABLISSANT LES MODALITÉS DE RÉPARTITION DU QUOTA - CONSULTATION DES ORGANISATIONS INTERPROFESSIONNELLE ET PROFESSIONNELLES - OMISSION - ARRÊTÉ SE BORNANT À MODIFIER LA RÉPARTITION EN SOUS-QUOTAS D'UN QUOTA AYANT FAIT L'OBJET D'UN PRÉCÉDENT ARRÊTÉ SOUMIS À CONSULTATION - IRRÉGULARITÉ - ABSENCE.

395-04-02-01 Les arrêtés par lesquels le ministre de l'agriculture et de la pêche opère la répartition en sous-quotas des quotas de pêche alloués à la France en application de la réglementation communautaire doivent en principe être précédés de la consultation de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins ainsi que des organisations professionnelles de pêcheurs concernées. Toutefois, dans le cas particulier d'un arrêté se bornant à modifier la répartition en sous-quotas entre navires d'un quota ayant fait l'objet d'un précédent arrêté, soumis à consultation, et qui prévoyait la possibilité d'un transfert de quota entre les navires en cause, l'absence de consultation ne l'entache pas d'irrégularité.


Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2011, n° 329141
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: Mme Christine Allais
Rapporteur public ?: M. Edouard Geffray

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:329141.20110719
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