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19/07/2011 | FRANCE | N°331350

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 19 juillet 2011, 331350


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 30 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CHAMBERY, représentée par son maire ; la COMMUNE DE CHAMBERY demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 06LY01880 du 2 juillet 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2006 rejetant ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 26 octobre 2000 du préf

et de la Savoie fixant le montant définitif de sa participation aux dépe...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 30 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CHAMBERY, représentée par son maire ; la COMMUNE DE CHAMBERY demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 06LY01880 du 2 juillet 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juillet 2006 rejetant ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 26 octobre 2000 du préfet de la Savoie fixant le montant définitif de sa participation aux dépenses d'aide sociale du département de la Savoie au titre de l'année 1999, d'autre part, de la décision, révélée par la lettre du préfet du 15 mars 2002, lui notifiant le montant de sa dotation forfaitaire au titre de la dotation globale de fonctionnement pour l'année 2002 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1, 72 et 72-2 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 2334-7-2 ;

Vu le décret n° 87-1146 du 31 décembre 1987 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christian Fournier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la COMMUNE DE CHAMBERY,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat de la COMMUNE DE CHAMBERY,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, sous l'empire des dispositions législatives antérieures à la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle, les communes contribuaient aux dépenses d'aide sociale des départements ; que l'article 7 du décret du 31 décembre 1987 relatif à la participation des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé des départements alors en vigueur, qui définissait les conditions dans lesquelles la participation de chaque commune aux dépenses d'aide sociale du département était déterminée, prévoyait que la participation d'une commune ne pouvait, au titre d'un exercice, augmenter de plus de trois points par rapport au pourcentage de variation constaté pour l'ensemble des communes du département, un écrêtement étant opéré si cette augmentation était supérieure et la somme correspondante répartie entre les autres communes du département ; que le département de la Savoie a décidé, comme d'autres départements, de rembourser aux communes concernées, chaque année suivant celle au titre de laquelle était versée leur participation, la contribution supplémentaire mise à leur charge en application du mécanisme d'écrêtement ; que la loi du 27 juillet 1999 précitée a supprimé la participation des communes aux dépenses d'aide sociale des départements et corrélativement prévu, selon des modalités qu'elle précise, que la dotation forfaitaire versée par l'Etat aux communes serait diminuée, à compter de 2000, d'un montant égal à leur participation aux dépenses d'aide sociale des départements au titre de l'année 1999, ce montant de référence faisant l'objet d'une revalorisation pour les années postérieures à 2000 ; que, par une délibération du 29 novembre 1999, le conseil général du département de la Savoie a décidé de supprimer le dispositif de remboursement qu'il avait institué ; que, par un arrêté du 26 octobre 2000, le préfet de la Savoie a fixé le montant définitif de la participation de la COMMUNE DE CHAMBERY aux dépenses d'aide sociale du département de la Savoie au titre de l'année 1999 ; qu'il a notifié le 15 mars 2002 à la commune le montant de sa dotation forfaitaire pour l'année 2002 ; que la COMMUNE DE CHAMBERY a contesté ces deux décisions devant le tribunal administratif de Grenoble, qui a rejeté sa demande ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 juillet 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé ce jugement ;

Considérant que l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue du IV de l'article 13 de la loi du 27 juillet 1999 applicable aux décisions litigieuses, dispose : I. - La dotation forfaitaire visée à l'article L. 2334-7 est diminuée, à compter de 2000, d'un montant égal à la participation de la commune aux dépenses d'aide sociale du département au titre de 1999 et revalorisé comme la dotation globale de fonctionnement mise en répartition (...) / II. - Pour le calcul, en 2000, de la diminution de la dotation forfaitaire prévue au premier alinéa du I, la participation de la commune aux dépenses d'aide sociale du département au titre de 1999 et appelée au cours de cet exercice est fixée, avant le 30 octobre 1999, par arrêté du préfet pris après avis du président du conseil général. / Un ajustement de la diminution de la dotation forfaitaire est opéré en 2001 sur la base d'un arrêté du préfet pris après avis du président du conseil général fixant, avant le 30 octobre 2000, le montant définitif de la participation de la commune aux dépenses d'aide sociale du département au titre de 1999 (...) / Pour la mise en oeuvre des deux précédents alinéas, le président du conseil général transmet au préfet, avant le 30 septembre 1999, le montant de la participation appelée pour chaque commune au titre de 1999 et, avant le 30 septembre 2000, le montant définitif de cette participation (...) ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant que la COMMUNE DE CHAMBERY soutient que les dispositions des I et II de l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales sont contraires à la libre administration des collectivités territoriales et à leur autonomie financière, garanties respectivement par les articles 72 et 72-2 de la Constitution, en ce qu'elles ne prévoient pas que la somme venant en diminution de la dotation forfaitaire des communes à compter de 2000 est égale au montant net de la participation des communes aux dépenses d'aide sociale du département, après le remboursement, décidé le cas échéant par les départements, de la part due au titre du mécanisme d'écrêtement mentionné ci-dessus ;

Considérant, en premier lieu, que la COMMUNE DE CHAMBERY ne peut utilement soutenir que les dispositions législatives contestées seraient contraires aux dispositions de l'article 72-2 de la Constitution, issues de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, dès lors que ces nouvelles dispositions constitutionnelles ne sont applicables qu'aux lois postérieures à leur date d'entrée en vigueur ;

Considérant, en second lieu, que les dispositions législatives contestées ne diminuent pas le montant ou la part des ressources propres des communes ; que le grief soulevé par la COMMUNE DE CHAMBERY à leur encontre porte sur des sommes représentant une proportion très limitée du montant des dotations de l'Etat et, plus encore, des recettes des budgets de fonctionnement des communes ; qu'elles ne sauraient donc, en tout état de cause, être regardées comme ayant pour effet d'entraver la libre administration des communes ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions des I et II de l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

Considérant, d'une part, qu'en regardant les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales et du principe de non rétroactivité comme soulevés seulement à l'appui de la contestation, par la voie de l'exception, de la délibération du 29 novembre 1999 précitée, la cour n'a pas, contrairement à ce que soutient la commune, dénaturé ses écritures ; que, par suite, en s'abstenant de répondre à ces moyens en tant qu'ils auraient été soulevés à l'appui de la contestation, par la voie de l'action, de l'arrêté du 23 octobre 2000, la cour n'a pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ;

Considérant, d'autre part, qu'en identifiant des moyens tirés de ce que la délibération du 29 novembre 1999 et la décision du 15 mars 2002 méconnaissaient la circulaire ministérielle du 3 août 1999, la cour n'a pas davantage dénaturé les écritures de la commune ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales prévoient que la diminution de la dotation forfaitaire versée aux communes, en conséquence de la suppression de leur participation aux dépenses d'aide sociale des départements, est déterminée sur la base du montant de leur participation due au titre de 1999 et précisent les modalités de mise en oeuvre de cette règle ; qu'elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'interdire à un département de mettre fin au dispositif de remboursement des contributions supplémentaires liées au mécanisme d'écrêtement des participations des communes qu'il aurait antérieurement décidé de mettre en place ; que par suite, en jugeant que, en supprimant le mécanisme de remboursement institué par le département de la Savoie en 1996, la délibération du 29 novembre 1999 n'avait méconnu ni les dispositions précitées de l'article L. 2334-7-2 ni le principe de neutralité financière qui les inspirent, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant que la délibération du 29 novembre 1999, par laquelle, ainsi qu'il a été dit, le conseil général du département de la Savoie a décidé de cesser de procéder au remboursement, en 2000, des contributions supplémentaires mises à la charge de certaines communes en application du mécanisme d'écrêtement, n'a pas modifié rétroactivement le montant des participations dues par les communes de ce département au titre de ses dépenses d'aide sociale pour l'année 1999, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en jugeant que l'arrêté préfectoral du 26 octobre 2000 ne constituait pas une mesure d'application de la délibération du 29 novembre 1999, la cour n'a pas, en tout état de cause, commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE CHAMBERY n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que réclame la COMMUNE DE CHAMBERY au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la COMMUNE DE CHAMBERY.

Article 2 : Le pourvoi de la COMMUNE DE CHAMBERY est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CHAMBERY et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie en sera adressée pour information au Premier ministre, au département de la Savoie et au Conseil constitutionnel.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 331350
Date de la décision : 19/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2011, n° 331350
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Alain Ménéménis
Rapporteur ?: M. Christian Fournier
Rapporteur public ?: M. Edouard Geffray
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:331350.20110719
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