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19/07/2011 | FRANCE | N°336199

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 19 juillet 2011, 336199


Vu le pourvoi et le mémoire rectificatif, enregistrés les 3 et 8 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 de l'ordonnance n° 07006750 du 3 décembre 2009 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille en tant que le premier de ces articles n'enjoint au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat de revaloriser sa pension de retraite qu'à compter du 1er janvier 2003 et que le seco

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Vu le pourvoi et le mémoire rectificatif, enregistrés les 3 et 8 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 de l'ordonnance n° 07006750 du 3 décembre 2009 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille en tant que le premier de ces articles n'enjoint au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat de revaloriser sa pension de retraite qu'à compter du 1er janvier 2003 et que le second fixe au 19 octobre 2007 le point de départ des intérêts moratoires ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat de revaloriser sa pension à compter du 1er janvier 1999 et de dire que les sommes dues porteront intérêt au taux légal à compter du 25 mars 2003 et que les intérêts échus à la date du 25 mars 2004, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, Auditeur,

- les observations de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A,

Considérant que, par arrêté du 22 octobre 1990, M. A a été admis au bénéfice d'une pension de retraite ; que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille, après avoir jugé que la demande de M. A était recevable et annulé l'arrêté du 22 octobre 1990 en tant qu'il ne prenait pas en compte la bonification pour enfants prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, a enjoint à l'administration de revaloriser sa pension à compter du 1er janvier 2003 et a fixé le point de départ des intérêts au 19 octobre 2007 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'article 2 de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : Sont prescrites, au profit de l'Etat (...), sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, (...) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ; qu'aux termes de l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite : Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la quatrième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux quatre années antérieures ;

Considérant que, pour fixer la date d'effet de la revalorisation de la pension de M. A, le premier juge s'est fondé sur la prescription quadriennale résultant des dispositions de la loi du 31 décembre 1968 ; que, toutefois, un recours contentieux directement formé contre un arrêté de concession de pension en vue d'en remettre en cause le montant implique nécessairement, s'il est accueilli, que l'administration procède, en prenant un nouvel arrêté, à une nouvelle liquidation de la pension ; que, par suite, lorsque, comme en l'espèce, le titulaire d'une pension est recevable à saisir directement le juge d'un recours contre un arrêté de concession qui n'avait pas fait l'objet d'une notification comportant l'indication des voies de recours, la demande ainsi présentée doit être regardée comme une demande de liquidation de pension, au sens de l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'ainsi, en se fondant, pour déterminer l'étendue des droits à revalorisation de M. A, sur les dispositions générales de la loi du 31 décembre 1968, alors que les dispositions spéciales de l'article L. 53 étaient seules applicables, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille a commis une erreur de droit ; que, par suite, l'article 2 de son ordonnance doit, pour ce motif, être annulé ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'article 3 de l'ordonnance attaquée :

Considérant que le moyen de cassation du requérant dirigé contre les dispositions de l'article 3 de l'ordonnance attaquée, qui sont relatives à la question du point de départ des intérêts moratoires et à leur capitalisation, n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ; que ces dispositions sont divisibles de celles de l'article 2 précité ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation de l'article 3 de l'ordonnance attaquée ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, dans les limites de la cassation, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite est seul applicable ; qu'il résulte de l'instruction qu'aucune circonstance ne faisait obstacle à ce que M. A présentât, dès la notification de son titre de pension, un recours tendant à obtenir une nouvelle liquidation de pension, en contestant l'absence de la bonification dont il revendique le bénéfice ; que, par suite, le délai de prescription prévu par les dispositions précitées lui est applicable ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A avait, dès le 25 mars 2003, saisi le tribunal administratif de Lille d'une première demande tendant à la prise en compte de la bonification prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, dans ces conditions, et alors même qu'il n'a de nouveau saisi le tribunal que le 19 octobre 2007, la date à retenir pour le délai de prescription des arrérages est celle du 25 mars 2003 ; que M. A peut, en conséquence, prétendre à la revalorisation de sa pension à compter du 1er janvier 1999 ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au ministre de modifier les conditions dans lesquelles la pension de M. A lui a été concédée et de revaloriser rétroactivement cette pension à compter du 1er janvier 1999 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille du 3 décembre 2009 est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement, de revaloriser la pension de M. A à compter du 1er janvier 1999.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. René A et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 19 jui. 2011, n° 336199
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Marc Dandelot
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: M. Rémi Keller
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 19/07/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 336199
Numéro NOR : CETATEXT000024390148 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-07-19;336199 ?
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