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26/07/2011 | FRANCE | N°317547

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 26 juillet 2011, 317547


Vu le pourvoi, enregistré le 24 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 07MA00272 du 21 avril 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 28 novembre 2006 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a annulé les décisions de prolongation de l'isolement de M. Bruno A des 15 juillet et 4 octobre 2004 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de proc

édure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir en...

Vu le pourvoi, enregistré le 24 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 07MA00272 du 21 avril 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 28 novembre 2006 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a annulé les décisions de prolongation de l'isolement de M. Bruno A des 15 juillet et 4 octobre 2004 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

Considérant que par décisions des 13 février, 6 mai, 15 juillet et 4 octobre 2004, le directeur du centre pénitentiaire d'Avignon-Le Pontet, pour la première, le directeur régional de l'administration pénitentiaire, pour la deuxième, le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, pour les deux dernières, ont décidé de placer puis de maintenir M. A à l'isolement ; que M. A a contesté devant le tribunal administratif de Marseille les décisions des 6 mai, 15 juillet et 4 octobre 2004 ; que, par jugement du 28 novembre 2006, le tribunal a annulé la première de ces décisions en raison d'un vice de procédure et les deux suivantes en conséquence de l'annulation de la précédente ; que, par un arrêt du 21 avril 2008, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE de la seule annulation des décisions des 15 juillet et 4 octobre 2004, a confirmé le jugement contesté ; que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant que lorsqu'il annule un acte administratif individuel, le juge de l'excès de pouvoir ne peut annuler par voie de conséquence d'autres actes individuels qui lui sont déférés dans le délai du recours contentieux, le cas échéant en relevant d'office un tel moyen qui découle de l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à la première annulation, que si ces autres actes individuels sont pris pour l'application du premier et trouvent dans celui-ci leur seule base légale ;

Considérant qu'aux termes de l'article D. 283-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable à la date des décisions contestées : " Tout détenu se trouvant dans un établissement ou quartier en commun peut soit sur sa demande, soit par mesure de précaution ou de sécurité, être placé à l'isolement. / La mise à l'isolement est ordonnée par le chef d'établissement (...). / La durée de l'isolement ne peut être prolongée au-delà de trois mois sans qu'un nouveau rapport ait été fait devant la commission de l'application des peines et sans une décision du directeur régional. / La mesure d'isolement ne peut être prolongée au-delà d'un an à partir de la décision initiale que par décision du ministre de la justice, prise sur rapport motivé du directeur régional qui recueille préalablement les avis de la commission de l'application des peines et du médecin intervenant à l'établissement. (...) " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que chaque décision de placement à l'isolement, la première comme les décisions ultérieures maintenant le détenu sous ce régime de détention, est fondée sur une appréciation des circonstances de fait existantes à la date à laquelle elle est prise et ne dépend pas des décisions précédentes, y compris en ce qui concerne la détermination de l'autorité compétente pour la prendre, que les dispositions précitées du code de procédure pénale désignent non à raison de celle qui a pris la décision précédente mais en fonction de la durée continue durant laquelle le détenu a été placé sous le régime de l'isolement ; que, par suite, les décisions successives par lesquelles les autorités compétentes maintiennent à l'isolement un détenu ne peuvent être regardées comme des mesures d'exécution des décisions précédentes plaçant et maintenant le détenu sous ce régime de détention, qui n'en constituent en aucune manière la base légale ; qu'en jugeant que l'annulation contentieuse de la décision du 6 mai 2004 maintenant M. A à l'isolement avait privé de base légale les décisions des 15 juillet et 4 octobre 2004 ayant le même objet, qui devaient par voie de conséquence être également annulées, la cour administrative d'appel de Marseille a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE est fondé à en demander l'annulation ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 21 avril 2008 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES et à M. Bruno A.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 317547
Date de la décision : 26/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-05-02-01 JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES. EXÉCUTION DES JUGEMENTS. EXÉCUTION DES PEINES. SERVICE PUBLIC PÉNITENTIAIRE. - PLACEMENT D'UN DÉTENU À L'ISOLEMENT - MESURES SUCCESSIVES AU SEIN DU MÊME ÉTABLISSEMENT - AUTONOMIE DES MESURES ENTRE ELLES [RJ1].

37-05-02-01 Chaque décision par laquelle les autorités compétentes placent un détenu à l'isolement (la décision initiale de placement comme chacune des décisions ultérieures maintenant le détenu sous ce régime de détention) est distincte de la précédente et ne peut être regardée comme prise pour son exécution. L'annulation d'une des mesures n'entraîne donc pas celle, par voie de conséquence, de la mesure suivante.


Références :

[RJ1]

Rappr., pour l'autonomie, en cas de changement d'établissement, entre la mesure de placement à l'isolement prise dans l'établissement d'origine et celle décidée dans le nouvel établissement, décision du même jour, CE, 26 juillet 2011, Ministre de a justice c/ Amrani, n° 328535, à mentionner aux Tables.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2011, n° 317547
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Gilles Pellissier
Rapporteur public ?: M. Julien Boucher

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:317547.20110726
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