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26/07/2011 | FRANCE | N°325464

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 26 juillet 2011, 325464


Vu le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, enregistré le 20 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n°06PA03782 du 19 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre le jugement du 5 juillet 2006 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a déchargé la société Pfizer Holding France, venant aux droits de la société Parke Davis, des rappels de retenue à la source auxquels cette société

a été assujettie au titre des exercices clos en 1997, 1998 et 1999, ain...

Vu le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, enregistré le 20 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n°06PA03782 du 19 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre le jugement du 5 juillet 2006 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a déchargé la société Pfizer Holding France, venant aux droits de la société Parke Davis, des rappels de retenue à la source auxquels cette société a été assujettie au titre des exercices clos en 1997, 1998 et 1999, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention conclue le 31 août 1994 entre la France et les Etats-Unis en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lesourd, avocat de la société Pfizer Holding France,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lesourd, avocat de la société Pfizer Holding France,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Parke Davis, aux droits de laquelle vient la société Pfizer Holding France, a procédé, les 29 décembre 1997, 26 juin 1998 et 30 juin 1999, au rachat d'une partie de ses actions auprès de la société américaine Parke Davis Company, puis à leur annulation ; qu'aucune plus-value n'a été réalisée par la société américaine, les rachats ayant été effectués à une valeur inférieure à la valeur d'acquisition des titres ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société Parke Davis, l'administration fiscale a qualifié les sommes versées à la société Parke Davis Company de revenus distribués, sur le fondement du 1° de l'article 112 du code général des impôts, et assujetti à la retenue à la source prévue par le 2 de l'article 119 bis du même code la totalité des montants versés à la société américaine, aux taux conventionnels de 5% pour les rachats effectués en 1997 et 1998 et de 15% pour le rachat effectué en 1999 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 5 juillet 2006 qui a accordé à la société Pfizer Holding France, venant aux droits de la société Parke Davis, la décharge des rappels de retenue à la source auxquels cette société a été assujettie au titre des exercices clos en 1997, 1998 et 1999 à la suite de ce redressement, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) " ; qu'aux termes de l'article 112 du même code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Ne sont pas considérés comme revenus distribués : 1° Les répartitions présentant pour les associés ou actionnaires le caractère de remboursements d'apports ou de primes d'émission. Toutefois, une répartition n'est réputée présenter ce caractère que si tous les bénéfices et les réserves autres que la réserve légale ont été auparavant répartis. " ; qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis du même code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " (...) Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le prix versé par une société pour le rachat de ses propres actions correspond, sous réserve des dispositions de l'article 112 du code général des impôts, à un revenu distribué au sens du 2° du 1 de l'article 109 du même code, susceptible de donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis de ce code ;

Considérant d'autre part, qu'aux termes de l'article 161 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport. La même règle est applicable dans le cas où la société rachète au cours de son existence les droits de certains associés, actionnaires ou porteurs de parts bénéficiaires " ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, en jugeant que les dispositions précitées de l'article 161 du code général des impôts devaient être regardées comme applicables à la définition de l'assiette de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis de ce code, et que, par suite, les sommes versées par une société pour le rachat de ses propres actions à un actionnaire qui n'a pas son domicile fiscal ou son siège en France ne correspondent, pour celui-ci, à un revenu distribué qu'à concurrence de l'écart, s'il est positif, entre le prix de ce rachat et celui auquel il a lui-même acquis ces actions, la cour n'a pas commis d'erreur de droit et a suffisamment motivé sa décision ; que par suite, le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Pfizer Holding France, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Pfizer Holding France la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à la société Pfizer Holding France.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 325464
Date de la décision : 26/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-06-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LE REVENU. COTISATIONS D'IRPP MISES À LA CHARGE DE PERSONNES MORALES OU DE TIERS. RETENUES À LA SOURCE. - RETENUE À LA SOURCE SUR LES DIVIDENDES VERSÉS À UNE PERSONNE N'AYANT PAS SON DOMICILE FISCAL OU SON SIÈGE EN FRANCE (ART. 119 BIS, 2 DU CGI) - CHAMP D'APPLICATION - REVENUS DISTRIBUÉS (ART. 108 À 117 BIS DU CGI) - NOTION - PRIX DE RACHAT DE SES PROPRES ACTIONS PAR UNE SOCIÉTÉ - INCLUSION (ART. 109, 1, 2° DU CGI)[RJ1] - QUALITÉ DE PERSONNE MORALE DE L'ACTIONNAIRE CESSIONNAIRE - INCIDENCE - ABSENCE.

19-04-01-02-06-01 La jurisprudence Fiteco selon laquelle, d'une part, le rachat par une société, au cours de son existence, à certains de ses associés ou actionnaires, des droits sociaux qu'ils détiennent, notamment sous forme d'actions, correspond, sous réserve des dispositions de l'article 112 du code général des impôts (CGI), à une mise à disposition au sens du 2° du 1 de l'article 109 du même code, susceptible de donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du code, et d'autre part, le prix du rachat ne correspond, pour chaque actionnaire, à un revenu distribué qu'à concurrence de l'écart, s'il est positif, entre le prix de ce rachat et celui auquel il a lui-même acquis les actions, est applicable au cas du rachat d'actions à une personne morale.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 31 juillet 2009, Société Fiteco, n° 296052, p. 339.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2011, n° 325464
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bernard Stirn
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP LESOURD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:325464.20110726
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