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26/07/2011 | FRANCE | N°340585

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 26 juillet 2011, 340585


Vu le pourvoi, enregistré le 15 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement n° 0801719 du 13 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, a annulé la décision implicite par laquelle il a rejeté la demande de Mme Patricia A tendant à ce que le montant de sa rémunération soit fixé à celui qu'elle avait perçu avant l'entrée en vigueur de son contrat signé le 5 juillet 2002, d'autre part lui a enjoint de porter le montant de s

a rémunération à celui qu'elle percevait au 31 octobre 2002 et ...

Vu le pourvoi, enregistré le 15 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement n° 0801719 du 13 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, a annulé la décision implicite par laquelle il a rejeté la demande de Mme Patricia A tendant à ce que le montant de sa rémunération soit fixé à celui qu'elle avait perçu avant l'entrée en vigueur de son contrat signé le 5 juillet 2002, d'autre part lui a enjoint de porter le montant de sa rémunération à celui qu'elle percevait au 31 octobre 2002 et a condamné l'Etat à lui verser les rappels de rémunération correspondant à la différence entre la rémunération qu'elle a perçue et celle qu'elle aurait dû percevoir, à compter de l'année 2003, si son contrat avait été établi sur la base de la rémunération dont elle bénéficiait à la date du 31 octobre 2002, la somme résultant de ce rappel portant intérêt au taux légal à compter de la réception de la demande du 6 décembre 2007 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 2001-822 du 5 septembre 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Prévost, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Bordeaux que Mme A a été recrutée le 25 décembre 1990 en qualité d'agent contractuel afin d'exercer les fonctions de coiffeuse à la division restauration et logement de la base aérienne 106 de Mérignac ; que, par un contrat du 5 juillet 2002, conclu en application des dispositions du I de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000, elle a été engagée pour une période indéterminée en qualité d'agent contractuel de droit public ; que la rémunération mensuelle qui lui a été accordée lors de l'établissement de ce contrat a été fixée à un montant inférieur à celle qu'elle percevait avant l'entrée en vigueur de ce contrat ; que Mme A a demandé le 10 décembre 2007 que ce contrat soit modifié afin que cette rémunération soit calculée à la date du 31 octobre 2002 et non à la date retenue initialement soit celle du 13 avril 2001 ; que, par jugement du 13 avril 2010, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision implicite par laquelle le MINISTRE DE LA DEFENSE a rejeté cette demande, a enjoint à l'administration de porter le montant de cette rémunération à celui que l'intéressée percevait au 31 octobre 2002 et a condamné l'Etat à verser à l'agent les rappels de rémunération correspondant à la différence entre la rémunération qu'elle a perçue et celle qu'elle aurait dû percevoir, à compter, compte tenu de la prescription quadriennale, de l'année 2003, si son contrat avait été établi sur la base de la rémunération dont elle bénéficiait à la date du 31 octobre 2002 ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE se pourvoit en cassation contre ce jugement ; qu'en soutenant que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en retenant non la date du 5 juillet 2002 correspondant à celle de la signature du contrat, mais celle du 31 octobre 2002, le ministre doit être regardé comme ne contestant que les articles 2 et 3 du jugement en ce qu'ils retiennent une date postérieure à celle du 5 juillet 2002 ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Les agents non titulaires de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif, en fonctions à la date de publication de la présente loi et qui n'ont pas été recrutés en application des articles 3, 4, 6 et 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, bénéficient d'un contrat à durée indéterminée lorsqu'ils assurent : 1° Soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs ; 2° Soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration, des hôtels de représentation du Gouvernement, dans les régions et les départements, des hôtels de commandement et des services d'approvisionnement relevant du ministère chargé de la défense. / Les fonctions ci-dessus peuvent être exercées à temps incomplet ; qu'aux termes du II du même article : Les personnels mentionnés au I ci-dessus peuvent demander que le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail. Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la date de publication de la présente loi pour présenter leur demande. (...) ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 5 septembre 2001 portant dispositions applicables aux agents contractuels de droit public du ministère de la défense mentionnés à l'article 34 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Le classement des agents dans la catégorie III s'effectue à un échelon calculé en fonction de leur ancienneté en qualité d'agent contractuel de droit public ; qu'aux termes de l'article 10 du même décret : Lorsque le classement initial effectué dans les conditions de l'article 4 ci-dessus conduit à une rémunération nette inférieure à celle perçue antérieurement, l'agent conserve, à titre personnel et exceptionnel, la rémunération nette qu'il détenait avant le classement jusqu'à ce que celle liée à sa nouvelle condition la rejoigne. Toutefois, la rémunération, maintenue à titre personnel et exceptionnel est revalorisée en fonction de l'évolution de la valeur du point fonction publique ; que l'article 12 de ce décret a prévu une date d'effet au 13 avril 2001 ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les agents de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif répondant aux conditions prévues par les dispositions du I de l'article 34 de la loi du 12 avril 2000 précitées et qui n'ont pas fait valoir dans le délai d'un an prévu par le II de l'article 34 de la loi leur droit d'option pour un contrat de travail de droit privé, doivent bénéficier à compter de la mise en oeuvre de la loi, d'un contrat de droit public à durée indéterminée ; que, pour les agents du ministère de la défense, cette mise en oeuvre a été organisée par le décret du 5 septembre 2001, d'après lequel la rémunération contractuelle doit être déterminée en fonction du classement initial des agents, selon leur ancienneté, dans la grille indiciaire, sous réserve de la rémunération qui peut leur être garantie par application des dispositions de l'article 10 de ce même décret ; que pour déterminer le droit de l'agent à cette garantie de rémunération, il y a lieu de retenir la rémunération nette perçue par l'agent en vertu de décisions créatrices de droits au jour de l'établissement de son nouveau contrat ; que l'entrée en vigueur rétroactive du décret du 5 septembre 2001, fixée, par son article 12, au 13 avril 2001, a eu pour objet de permettre que les intéressés soient régis dès cette date par les contrats établis conformément aux règles prévues par ce décret, mais n'a pas pu avoir légalement pour effet d'autoriser l'administration à refuser, pour le calcul de la rémunération contractuelle au maintien de laquelle l'article 10 du décret lui ouvre droit, de prendre en compte le montant des augmentations salariales éventuellement accordées à l'agent entre le 13 avril 2001 et la date de signature du nouveau contrat ; qu'en l'absence de toute stipulation du contrat reportant à une date postérieure à celle de cette signature la date à retenir pour le calcul de cette rémunération, la circonstance que le contrat n'aurait pris effet qu'ultérieurement ainsi que le révélerait le premier bulletin de salaire établi en vertu de ce contrat est sans incidence de sorte que les augmentations de salaires éventuellement accordées postérieurement à la date de signature du contrat ne peuvent être prises en compte ;

Considérant qu'en se fondant sur le fait que le contrat de Mme A, signé le 5 juillet 2002, n'avait pris effet que le 1er novembre 2002 ainsi que l'établissait le premier bulletin de salaire établi sous son empire pour en déduire qu'il y avait lieu de tenir compte de l'ensemble des augmentations salariales éventuellement accordées à l'intéressée entre le 13 avril 2001 et le 31 octobre 2002 alors qu'aucune stipulation du contrat ne permettait de retenir cette dernière date par dérogation à celle de la signature du contrat, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à demander l'annulation du jugement en tant que, dans ses articles 2 et 3, le tribunal administratif a retenu une date postérieure à celle du 5 juillet 2002 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a refusé de faire droit à sa demande en ce qu'elle tendait à la prise en compte, au titre du calcul de la rémunération contractuelle au maintien de laquelle l'article 10 du décret du 5 septembre 2001 lui ouvre droit, des augmentations salariales éventuellement accordées postérieurement à la date de signature de son contrat ; que, par suite, sa demande doit être rejetée en tant qu'elle porte sur une période postérieure à la date du 5 juillet 2002 ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du 13 avril 2010 du tribunal administratif de Bordeaux sont annulés en tant qu'ils retiennent une date postérieure à celle du 5 juillet 2002.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à Mme Patricia A.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 340585
Date de la décision : 26/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2011, n° 340585
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bernard Stirn
Rapporteur ?: M. Guillaume Prévost
Rapporteur public ?: M. Laurent Olléon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:340585.20110726
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