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28/07/2011 | FRANCE | N°319028

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 28 juillet 2011, 319028


Vu le pourvoi, enregistré le 31 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la SARL IMEXREP, dont le siège est 63 rue Condorcet à Paris (75009), représentée par son gérant ; la SARL IMEXREP demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 06PA01942 du 2 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0005748 du 28 mars 2006 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assi

gnés au titre de la période du 1er avril 1994 au 31 mars 1998, de la reten...

Vu le pourvoi, enregistré le 31 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la SARL IMEXREP, dont le siège est 63 rue Condorcet à Paris (75009), représentée par son gérant ; la SARL IMEXREP demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 06PA01942 du 2 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0005748 du 28 mars 2006 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 1994 au 31 mars 1998, de la retenue à la source mise à sa charge au titre des exercices clos les 31 mars 1996, 1997 et 1998 et des intérêts de retard correspondants ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 et notamment le B du II de son article 25 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Aladjidi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Odent, Poulet, avocat de la SARL IMEXREP,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Odent, Poulet, avocat de la SARL IMEXREP ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL IMEXREP, société de droit français ayant son siège à Paris, exerce une activité de négoce et d'import export de marchandises en lien notamment avec la Côte d'Ivoire ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er avril 1994 et le 31 mars 1998, ont été mis en recouvrement, le 13 août 1999, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 1er avril 1994 et le 31 mars 1998 et des cotisations de retenue à la source au titre des exercices clos les 31 mars 1996, 1997 et 1998, assortis des intérêts de retard ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal administratif de Paris du 28 mars 2006 rejetant sa demande de décharge des impositions et des intérêts de retard ainsi mis à sa charge ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que le B du II de l'article 25 de la loi du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999 a validé les avis de mise en recouvrement émis à la suite d'une notification de redressement effectuée avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés, comme en l'espèce, par le moyen tiré de ce qu'ils se référeraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressement ; que, hors le cas de pénalités à caractère de sanction, l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être utilement invoqué devant le juge de l'impôt, qui ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas des contestations sur des droits et obligations à caractère civil, quand bien même il fait application d'une législation ayant pour effet de priver rétroactivement le contribuable de la possibilité d'obtenir la décharge d'une imposition ; que, par suite, en écartant comme inopérant le moyen tiré de ce que les dispositions du B du II de l'article 25 de la loi du 30 décembre 1999 seraient contraires à l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il est constant qu'aucune pénalité à caractère de sanction n'est en cause dans la présente affaire, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'article 25 de la loi du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999 : A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57 le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements ; qu'en jugeant que les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales dans leur rédaction précitée, applicable à la présente procédure, ne faisaient nullement obligation à l'administration d'informer la société requérante d'une diminution du montant des rehaussements intervenant postérieurement à l'envoi de la notification de redressement, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle ; qu'aux termes de l'article 259 B du même code, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France lorsqu'elles sont effectuées par un prestataire établi hors de France et lorsque le preneur est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui a en France le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu ou, à défaut, qui y a son domicile ou sa résidence habituelle : / (...) 5° Traitement de données et fournitures d'information ; / 6° Opérations bancaires, financières et d'assurance ou de réassurance, à l'exception de la location de coffres-forts (...) / 10° Prestations de télécommunications. / Le lieu de ces prestations est réputé ne pas se situer en France même si le prestataire est établi en France lorsque le preneur est établi hors de la Communauté européenne ou qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la Communauté ;

Considérant que la SARL IMEXREP soutenait devant la cour que le lieu des prestations qu'elle accomplit pour le compte de la société de droit ivoirien SGCMB est réputé ne pas se situer en France, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 259 B du code général des impôts, dès lors qu'elles relèveraient, selon elle, par nature des dispositions du 5°, 6° et 10° du même article ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier soumis aux juges du fond que n'étaient en cause que des prestations de support et de gestion administrative et commerciale destinées à assurer le suivi du réseau de concessionnaires français dont disposait la société ivoirienne pour distribuer en France des cartes cadeaux, afin de renseigner les porteurs des cartes et les concessionnaires sur les formalités à accomplir et, le cas échéant, de les rembourser, selon les instructions de cette société ; qu'en estimant, ainsi, par adoption du motif retenu par les premiers juges, que ces prestations n'étaient pas au nombre de celles qui sont visées par les 5°, 6° et 10° de l'article 259 B du code général des impôts, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a commis ni erreur de droit, ni erreur de qualification juridique ;

En ce qui concerne la retenue à la source, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'arrêt :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. Un décret fixe les modalités et conditions d'application de cette disposition ; qu'en vertu du 2° du 1 de l'article 109 du même code, sont considérées comme revenus distribués toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ;

Considérant que, dès lors qu'elle avait jugé que les sommes regardées par l'administration comme distribuées, qui avaient été inscrites, dans les écritures de la société, au crédit du compte courant d'associé de son gérant M. Botey, étaient la contrepartie d'opérations de change effectuées par ce dernier, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit en estimant que ces sommes, qui ne pouvaient, en l'état de ses constatations, qu'être regardées comme une créance de M. Botey, devaient être imposées en tant que revenus distribués à ce dernier, en application des articles 109 et 119 bis du code général des impôts ; que la société IMEXREP est, dès lors, fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur la retenue à la source en cause ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SARL IMEXREP d'une somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 2 juin 2008 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il porte sur la retenue à la source mise à la charge de la SARL IMEXREP au titre des exercices clos les 31 mars 1996, 1997 et 1998 et sur les intérêts de retard correspondants.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la société IMEXREP une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la SOCIETE IMEXREP est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SARL IMEXREP et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 319028
Date de la décision : 28/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2011, n° 319028
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Frédéric Aladjidi
Rapporteur public ?: Mme Claire Legras
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:319028.20110728
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