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12/10/2011 | FRANCE | N°325849

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 12 octobre 2011, 325849


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 mars et 8 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND (Puy-de-Dôme), représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 05LY02084 du 30 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, d'une part, a rejeté son appel contre le jugement du 7 juillet 2005 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'avait condamnée à verser à l'organisme de gestion de l'école catholique (O

GEC) Les Francs Rosiers une indemnité de 337 902,17 euros au titre de l...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 mars et 8 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND (Puy-de-Dôme), représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 05LY02084 du 30 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, d'une part, a rejeté son appel contre le jugement du 7 juillet 2005 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'avait condamnée à verser à l'organisme de gestion de l'école catholique (OGEC) Les Francs Rosiers une indemnité de 337 902,17 euros au titre de la contribution communale aux dépenses de fonctionnement des classes élémentaires de cette école pour les années scolaires 1997-1998 à 2000-2001 sous déduction d'une provision de 257 262,87 euros déjà versée, d'autre part, réformant ce jugement sur appel incident de l'OGEC, l'a condamnée à verser à cet organisme une indemnité correspondant à la différence entre la contribution qu'il a perçue au titre des années scolaires en litige et celle qu'il aurait dû percevoir sur la base d'un coût moyen par élève devant être fixé, pour l'année 2001, à 6 166 francs (940 euros) et renvoyé l'OGEC devant elle aux fins de liquidation de cette créance, dans la limite des conclusions chiffrées présentées par cet organisme dans l'instance d'appel, la somme due portant intérêts et intérêts des intérêts ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'OGEC Les Francs Rosiers une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 septembre 2011, présentée pour la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 ;

Vu le décret n° 60-389 du 22 avril 1960 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Daumas, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND et de la SCP Gaschignard, avocat de l'organisme de gestion de l'école catholique (OGEC) Les Francs Rosiers,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Monod, Colin, avocat de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND et à la SCP Gaschignard, avocat de l'organisme de gestion de l'école catholique (OGEC) Les Francs Rosiers,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'organisme de gestion de l'école catholique (OGEC) Les Francs Rosiers, laquelle est sous contrat d'association avec l'Etat, a demandé à la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND, par lettre du 18 décembre 2001, de lui verser une somme de 605 539,24 euros en réparation du préjudice résultant, selon lui, de l'insuffisance de la contribution communale aux dépenses de fonctionnement des classes élémentaires de l'école Les Francs Rosiers pour les années scolaires 1997-1998 à 2000-2001 ; que, par un jugement du 7 juillet 2005, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir ordonné une expertise, a condamné la commune à verser à cet OGEC la somme de 337 902,17 euros, sous déduction d'une provision de 257 262,87 euros déjà versée ; que, par un arrêt du 30 décembre 2008, contre lequel la commune se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Lyon l'a condamnée à verser à l'OGEC Les Francs Rosiers une indemnité correspondant à la différence entre la contribution que cet organisme a perçue au titre des années scolaires 1997-1998 à 2000-2001 et celle qu'il aurait dû percevoir sur la base d'un coût moyen par élève devant être fixé, pour l'année 2001, à 6 166 francs (940 euros) et renvoyé l'OGEC devant la commune aux fins de liquidation de cette créance, dans la limite de ses conclusions, la somme due par la commune portant intérêts et intérêts des intérêts ;

Considérant qu'en vertu des premier et troisième alinéas de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés, dont les dispositions ont été reprises au quatrième alinéa de l'article L. 442-5 du code de l'éducation : Les établissements d'enseignement privés (...) peuvent (...) demander à passer avec l'Etat un contrat d'association à l'enseignement public (...) / Les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public ; qu'aux termes de l'article 7 du décret du 22 avril 1960 alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises en substance au premier alinéa de l'article R. 442-44 du code de l'éducation : En ce qui concerne les classes élémentaires, la commune siège de l'établissement est tenue d'assumer, pour les élèves domiciliés dans la commune et dans les mêmes conditions que pour les classes élémentaires publiques, les dépenses de fonctionnement (matériel) des classes sous contrat, sous réserve des charges afférentes aux personnels enseignants rémunérés directement par l'Etat ; qu'il résulte de ces dispositions que les communes, qui ont la charge des écoles élémentaires publiques, sont tenues de prendre en charge les dépenses de fonctionnement des classes des écoles élémentaires de l'enseignement privé sous contrat d'association ; que le calcul de la contribution due par les communes à ce titre s'opère par référence au coût moyen d'un élève d'une classe équivalente dans les établissements de l'enseignement public, lequel doit prendre en compte les dépenses effectivement supportées par les communes pour assurer le fonctionnement de leurs écoles ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 442-11 du code de l'éducation : Il est créé dans chaque académie, à titre provisoire, au moins une commission de concertation comprenant en nombre égal des représentants des collectivités territoriales, des représentants des établissements d'enseignement privés et des personnes désignées par l'Etat. Ces commissions peuvent, sous réserve des dispositions de l'article L. 442-10, être consultées sur toute question relative à l'instruction, à la passation, à l'exécution des contrats ainsi qu'à l'utilisation des fonds publics conformément à leur destination, dans le cadre de ces contrats. Aucun recours contentieux relatif à ces questions ne peut être introduit sans que l'objet du litige leur ait au préalable été soumis pour avis ; qu'il résulte de ces dispositions que les commissions de concertation qu'elles prévoient ne doivent être obligatoirement saisies, préalablement à un recours contentieux, que des litiges relatifs à l'instruction, à la passation et à l'exécution de contrats simples ou d'association entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés ainsi qu'à l'utilisation des fonds publics, conformément à leur destination, dans le cadre de ces contrats ; que, si elles peuvent être saisies des contestations nées entre les établissements d'enseignement privés et les collectivités territoriales, et notamment de celles qui portent sur les conditions de prise en charge par ces collectivités des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat simple ou d'association, cette saisine n'est pas, s'agissant de telles contestations, un préalable obligatoire à l'introduction d'un recours contentieux ; que, par suite, en jugeant que la commune n'était pas fondée à soutenir que la demande de l'OGEC était irrecevable, faute de saisine préalable de la commission de concertation prévue par l'article L. 442-11, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, que la cour a pu, sans erreur de droit, juger que les dépenses de la commune relatives au transport des élèves lors d'activités scolaires, à la médecine scolaire, en plus des dépenses assumées à ce titre par l'Etat, à la rémunération d'intervenants lors des séances d'activités physiques et sportives et aux classes de découverte, ayant été exposées dans le cadre de l'activité scolaire des classes élémentaires, devaient, alors même qu'il ne s'agirait pas de dépenses obligatoires de la commune, être prises en compte pour le calcul de la participation de cette dernière au titre des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires des établissements d'enseignement privés sous contrat d'association ;

Considérant, en troisième lieu, que s'il est loisible à une commune et à un organisme responsable de la gestion d'un établissement d'enseignement privé sous contrat d'association d'organiser par voie de convention leurs relations financières, notamment en ce qui concerne le versement par la commune de la contribution qu'elle doit au titre des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires de cet établissement, il incombe à la commune seule de fixer, conformément aux dispositions législatives et réglementaires rappelées ci-dessus, le coût moyen d'un élève d'une classe équivalente dans les établissements de l'enseignement public servant de référence au calcul de cette contribution ; que, par suite, la seule circonstance que la commune et l'organisme gestionnaire de l'établissement seraient engagés dans des relations contractuelles ayant pour objet ou pour effet de fixer ce coût moyen ou le montant de cette contribution ne saurait ni faire obstacle à leur détermination conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables, ni être regardée comme constitutive d'une faute de nature à atténuer la responsabilité de la commune dans le préjudice causé à l'organisme, dans l'hypothèse où ces montants seraient sous-évalués en méconnaissance de ces dispositions ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'une convention d'une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction, a été conclue le 6 février 1996 entre la commune et l'OGEC Les Francs Rosiers, fixant à 1 643,72 francs (250,58 euros) par élève la participation financière de la collectivité au fonctionnement des classes élémentaires de l'école Les Francs Rosiers et indexant ce montant sur l'inflation ; que la cour a relevé qu'en exécution de cette convention, la commune avait versé à l'OGEC Les Francs Rosiers, au titre des années en litige, des contributions par élève inférieures à celles qui auraient dû être versées en application de la loi ; qu'en jugeant que ni la signature de cette convention par l'OGEC, ni le fait qu'il se soit abstenu de la dénoncer ne constituaient des faits de nature à exonérer la commune, en tout ou partie, de sa responsabilité dans le préjudice subi par cet organisme en raison de l'illégalité commise dans la détermination du coût moyen d'un élève scolarisé dans les classes élémentaires de l'enseignement public de la commune, conformément aux dispositions des articles L. 442-5 et R. 442-44 du code de l'éducation précités, la cour n'a pas commis d'erreur de qualification juridique des faits ni d'erreur de droit, et n'a pas dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant, en quatrième lieu, que le classement en section d'investissement du budget communal d'une dépense exposée au profit des écoles publiques ne fait pas, par lui-même, obstacle à ce qu'elle soit regardée comme une dépense de fonctionnement, au sens des dispositions des articles L. 442-5 et R. 442-44 du code de l'éducation ; qu'en jugeant qu'il résultait de l'instruction qu'une partie des dépenses inscrites dans le budget de la commune en tant que dépenses d'investissement des écoles publiques correspondait à des dépenses de fonctionnement, au sens de ces dispositions, et en reprenant sur ce point, par une appréciation souveraine des pièces du dossier exempte de dénaturation, l'évaluation retenue par le rapport d'expertise versé au dossier, la cour a suffisamment motivé son arrêt et n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'expert sur le rapport duquel s'est principalement fondée la cour a soustrait des dépenses de fonctionnement exposées par la commune en faveur des écoles élémentaires de l'enseignement public les dépenses induites par l'organisation, au sein de ces écoles, d'activités périscolaires ou extrascolaires ; que l'expert a évalué la part de ces dernières dépenses dans le total des dépenses de la commune en faveur des écoles élémentaires publiques à partir d'une estimation de la part de la superficie des locaux scolaires affectés à ces activités non scolaires, en lui appliquant, selon qu'il s'agissait de dépenses de matériel ou de dépenses de personnel, des abattements forfaitaires justifiés par l'existence d'économies d'échelle ; que la cour, après avoir relevé que la commune se bornait à exprimer des doutes sur la méthode retenue par l'expert et s'abstenait d'apporter des éléments de nature à justifier les chiffres dont elle faisait état, a jugé qu'elle n'établissait pas l'inexactitude de l'estimation de la part de ses dépenses de fonctionnement en matériel affectées aux activités non scolaires accueillies par les écoles élémentaires publiques de la commune, évaluée à 18 %, non plus que celle de l'estimation de la part de ses dépenses de fonctionnement en personnel affectées à ces mêmes activités non scolaires, évaluée à 14%, et qu'il ne résultait pas de l'instruction que ces chiffres étaient inexacts ; que, ce faisant, la cour a suffisamment motivé son arrêt et n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en sixième lieu, que le moyen tiré de ce que l'arrêt serait entaché d'une inexactitude matérielle en ce qui concerne le nombre d'élèves à prendre en compte pour le calcul de la contribution communale n'est pas assorti des précisions de nature à permettre d'en apprécier le bien fondé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune la somme de 500 euros à verser à l'OGEC Les Francs Rosiers au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND est rejeté.

Article 2 : La COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND versera à l'OGEC Les Francs Rosiers une somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CLERMONT-FERRAND et à l'organisme de gestion de l'école catholique (OGEC) Les Francs Rosiers.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 325849
Date de la décision : 12/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 oct. 2011, n° 325849
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Daumas
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN ; SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:325849.20111012
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