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21/10/2011 | FRANCE | N°343416

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 21 octobre 2011, 343416


Vu le pourvoi, enregistré le 21 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 07LY01418 du 22 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé, à la demande de la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et du Syndicat national du contrôle technique automobile, le jugement n° 0504676 du 29 mai 2007 du tribunal administratif de Lyon et la décision du 7 juin 2005 par laquelle le

préfet de la Loire avait refusé d'autoriser cette société à...

Vu le pourvoi, enregistré le 21 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 07LY01418 du 22 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé, à la demande de la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et du Syndicat national du contrôle technique automobile, le jugement n° 0504676 du 29 mai 2007 du tribunal administratif de Lyon et la décision du 7 juin 2005 par laquelle le préfet de la Loire avait refusé d'autoriser cette société à effectuer les contrôles de trente véhicules appartenant à la Société de transports publics de l'agglomération stéphanoise (STAS) dans les locaux de cette dernière ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Raphaël Chambon, Auditeur,

- les observations de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et du Syndicat national du contrôle technique automobile,

- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et du Syndicat national du contrôle technique automobile ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de la route : Lorsqu'en application du présent code, des véhicules sont astreints à un contrôle technique, celui-ci est effectué par les services de l'Etat ou par des contrôleurs agréés par l'Etat. / Cet agrément peut être délivré soit à des contrôleurs indépendants, soit à des contrôleurs organisés en réseaux d'importance nationale (...) / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de fonctionnement du système de contrôle et en particulier les conditions d'agrément des contrôleurs, des installations nécessaires au contrôle et des réseaux visés au deuxième alinéa ; que, selon l'article R. 323-8 du même code : Les réseaux de contrôle sont les personnes morales de droit privé soumises à l'agrément du ministre chargé des transports. / Pour être agréé, un réseau doit comporter des centres de contrôle de véhicules légers répartis dans au moins quatre-vingt-dix départements. Pour être agréé pour le contrôle technique des véhicules lourds, un réseau doit comporter au moins trente centres de contrôle répartis dans au moins vingt régions et exploiter lui-même les centres de contrôle qui lui sont rattachés (...) ; que selon l'article R. 323-10 du même code : Le réseau de contrôle s'assure en permanence de la bonne exécution des contrôles techniques conformément aux dispositions de la présente section. Il transmet à l'organisme technique central les données relatives aux contrôles techniques transmises par les installations de contrôle qui lui sont rattachées ; qu'aux termes de l'article R. 323-11 du même code : Le réseau de contrôle doit respecter les modalités d'organisation fixées par arrêté du ministre chargé des transports destinées à assurer la disponibilité et la qualité des prestations et veiller à ce que les contrôleurs et toute personne physique ou morale exerçant des fonctions au sein du réseau n'aient pas d'activité dans la réparation ou le commerce automobile et ne soient pas salariés d'une entreprise ayant un lien avec une telle activité ;

Considérant, d'autre part, que le I de l'article R. 323-13 du même code dispose que : Les installations de contrôle doivent comporter les moyens matériels nécessaires aux catégories de contrôles techniques réalisés et les moyens techniques permettant de recueillir les données relatives à ces contrôles et de transmettre ces données dans le délai fixé par arrêté du ministre chargé des transports soit à la direction du réseau de contrôle auquel elles sont rattachées, soit à l'organisme technique central, selon qu'il s'agit d'installations rattachées ou non à un réseau (...) ; que selon le II de cet article : L'activité d'un centre de contrôle doit s'exercer dans des locaux n'abritant aucune activité de réparation ou de commerce automobile et ne communiquant avec aucun local abritant une telle activité. / Toutefois, afin d'assurer une meilleure couverture géographique, de répondre aux besoins des usagers ou, s'agissant des véhicules lourds, de réduire les déplacements, un réseau de contrôle agréé peut utiliser des installations auxiliaires situées dans des locaux abritant des activités de réparation ou de commerce automobile. Il doit pour cela obtenir un agrément particulier (...) ;

Considérant, enfin, que les dispositions de l'article R. 323-14 précisent les conditions dans lesquelles l'agrément des installations d'un centre de contrôle est délivré par le préfet du département, l'exploitant devant en particulier fournir un document par lequel il s'engage à respecter les prescriptions d'un cahier des charges en décrivant notamment l'organisation et les moyens techniques mis en oeuvre pour assurer la qualité et l'objectivité des contrôles techniques effectués et éviter que les installations soient utilisées par des personnes ayant une activité dans la réparation ou le commerce automobile ; que le IV de ce même article prévoit que l'agrément peut être suspendu ou retiré si les conditions de bon fonctionnement des installations ou si les prescriptions qui leur sont imposées ne sont plus respectées ;

Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ;

Considérant que, pour accueillir l'exception tirée de l'illégalité des dispositions du deuxième alinéa du II de l'article R. 323-13, selon lesquelles la faculté d'exploiter des installations auxiliaires situées dans des locaux abritant des activités de réparation ou de commerce automobile, par dérogation à la règle mentionnée en son premier alinéa, est réservée aux seuls centres rattachés aux réseaux de contrôle agréés, la cour a jugé qu'elle méconnaissaient le principe d'égalité, au motif que la différence de traitement ainsi instituée entre les deux catégories de centres était manifestement disproportionnée par rapport à leur différence de situation ;

Considérant que, si les réseaux de contrôle sont soumis à certaines contraintes spécifiques, d'ailleurs largement inhérentes à leur organisation collective, et notamment celles d'obtenir préalablement un agrément ministériel et de s'assurer en permanence de la bonne exécution des contrôles techniques par les centres qui leur sont rattachés, tous les centres, qu'ils soient indépendants ou rattachés à un réseau, exercent la même activité, doivent solliciter un agrément préfectoral et respecter des obligations semblables et sont assujettis à un dispositif de surveillance administrative commun ; que si le ministre se prévaut, pour justifier la différence de traitement opérée au profit des réseaux, du motif d'intérêt général de favoriser la couverture de l'ensemble du territoire, compte tenu des obligations de présence locale imposées aux seuls réseaux par le deuxième alinéa de l'article R. 323-8, il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond et il n'est au demeurant pas soutenu que certains départements ou régions seraient confrontés, que ce soit pour les véhicules légers ou les poids lourds, à une pénurie de centres de contrôle technique ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que cette différence de traitement, qui a pour effet d'attribuer un avantage substantiel aux centres organisés en réseau, était manifestement disproportionnée par rapport à leur différence de situation avec les autres centres et en en déduisant que les dispositions du II de l'article R. 323-13 du code de la route méconnaissaient le principe d'égalité ; que, dès lors, le pourvoi du ministre doit être rejeté ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et la somme de 1 500 euros à verser au Syndicat national du contrôle technique automobile, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi du ministre est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et au Syndicat national du contrôle technique automobile une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la société AB Auto Bilan 42 poids lourds et au Syndicat national du contrôle technique automobile.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 343416
Date de la décision : 21/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 2011, n° 343416
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Raphaël Chambon
Rapporteur public ?: M. Cyril Roger-Lacan
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:343416.20111021
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