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07/11/2011 | FRANCE | N°353727

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 07 novembre 2011, 353727


Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Etienne A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1109883 du 24 octobre 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à ce que soient ordonnées toutes mesures utiles en vue de son inscription et de celle de tous les personnels enseignants stagiaires du premier et s

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Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Etienne A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1109883 du 24 octobre 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à ce que soient ordonnées toutes mesures utiles en vue de son inscription et de celle de tous les personnels enseignants stagiaires du premier et second degré sur la liste des électeurs au conseil d'école de l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) des Pays de la Loire dont les membres seront élus le 14 novembre 2011 ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'ordonner toutes mesures utiles de sauvegarde afin de garantir l'exercice du droit de vote et d'éligibilité du personnel enseignant stagiaire, au titre du collège D des usagers, lors des élections du 14 novembre 2011 au conseil d'école de l'IUFM des Pays de la Loire ;

3°) de mettre à la charge de l'Université de Nantes le versement de la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que l'ordonnance attaquée est irrégulière au motif que le juge des référés a appelé à l'audience, en qualité de partie à l'instance, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, le recteur de l'académie de Nantes et le président de l'Université de Nantes ; que cette ordonnance est insuffisamment motivée ; que le juge des référés a dénaturé les faits et pièces du dossier en ce qu'il a analysé la requête comme étant dirigée contre le seul arrêté du 19 septembre 2011 par lequel le directeur de l'IUFM des Pays de la Loire a convoqué les électeurs du collège des usagers au scrutin du 14 novembre 2011 ; que le juge des référés ne pouvait, sans erreur de droit, déduire des dispositions législatives et réglementaires invoquées que les personnels enseignants stagiaires du second degré relevaient de la catégorie des personnes bénéficiant de la formation continue ; que le juge des référés ne pouvait retenir la circonstance selon laquelle le volume horaire de la formation théorique dispensée par l'IUFM dans l'académie de Nantes se limite à trente heures alors que la formation inclut nécessairement la formation pratique dans les établissements, pour un nombre d'heures supérieur aux cent heures exigées par les dispositions du décret du 18 janvier 1985 et alors que le ministre de l'éducation nationale a abrogé illégalement le cahier des charges de l'IUFM par un arrêté du 12 mai 2010 ; que le décret du 3 mai 2007 range les fonctionnaires stagiaires en formation à l'institut dans le collège des usagers de l'institut ; que la demande en référé liberté est recevable en dépit de l'existence d'une voie de recours à caractère électoral ; que la condition d'urgence est remplie, la date du scrutin étant fixée au 14 novembre 2011 et le dépôt des candidatures devant s'effectuer le 3 novembre 2011 ; que le directeur de l'IUFM a porté une atteinte grave et manifestement illégale au principe d'égalité entre les usagers du service public, à l'obligation faite par la loi de prévoir la participation des usagers au fonctionnement des organes délibérants des établissements publics, au libre exercice du droit de suffrage et au principe de sincérité des scrutins, en prenant une mesure de portée générale visant à exclure l'ensemble des enseignants stagiaires de tout droit à représentation et à participation au conseil d'école de l'institut ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 novembre 2011, présenté par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que l'ordonnance attaquée n'est pas irrégulière, le juge des référés pouvant appeler dans l'instance toute personne intéressée dont il souhaite obtenir les observations ; que le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, ministre intéressé dans l'instance a pu régulièrement produire un mémoire à la place du ministre appelé ; que le juge des référés de première instance, a répondu implicitement aux arguments du requérant tirés de la totalité de la durée du stage effectué par les enseignants stagiaires et de l'illégalité de l'arrêté du 12 mai 2010 ; que l'ordonnance attaquée n'est pas entachée de dénaturation des faits, l'arrêté du 19 septembre 2011 excluant implicitement des listes électorales les enseignants stagiaires ; que le directeur de l'IUFM n'a pas commis une illégalité manifeste au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative en considérant que les enseignants stagiaires ne pouvaient être inscrits sur les listes électorales pour le collège des usagers ; qu'ainsi, le juge des référés a estimé, à bon droit, que les enseignants stagiaires relèvent, pour l'élection dans les conseils des IUFM, de la catégorie des usagers de la formation continue, sous réserve qu'ils justifient pendant leur année de stage d'un nombre minimal d'heures, conformément aux dispositions de l'article 14 du décret du 18 janvier 1985 ; que l'article 4 du décret du 3 mai 2007 n'est pas de nature à créer une dérogation aux conditions générales de l'exercice du droit du suffrage ; que M. A n'est pas fondé à soutenir que l'article 14 du décret du 18 janvier 1985 ne lui est pas opposable dès lors que l'article L. 123-8 du code de l'éducation confie à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur, et non aux seuls IUFM, la responsabilité de la formation initiale et continue des maîtres de l'éducation nationale et que les décrets du 28 juillet 2009 ont modifié le statut des professeurs agrégés et des professeurs certifiés ; que le refus opposé à l'inscription sur les listes électorales ne porte pas atteinte au principe d'égalité, eu égard aux dispositions du décret du 18 janvier 1985 qui prend en compte l'existence de situations différentes ; que l'urgence n'est pas caractérisée, une inscription sur la liste électorale pouvant être obtenue jusqu'au 14 novembre 2011, jour du scrutin, et qu'à la date de dépôt de candidature, expirée au 3 novembre 2011, M. A n'établit pas avoir envisagé de se porter candidat ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2011, présenté par le président de l'Université de Nantes qui conclut au rejet de la requête, par des moyens identiques à ceux exposés par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le décret n°72-581 du 4 juillet 1972 ;

Vu le décret n° 85-59 du 18 janvier 1985 ;

Vu le décret n° 2007-694 du 3 mai 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A et, d'autre part, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ainsi que l'Université de Nantes ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du lundi 7 novembre 2011 à 10 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Chevallier, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A ;

- le représentant de l'Université de Nantes ;

- les représentantes du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

et à l'issue de laquelle l'instruction a été close ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale (...) ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant, d'une part, que l'Institut universitaire de formation des maîtres des Pays de la Loire étant une école interne de l'Université de Nantes, cette université avait la qualité de partie défenderesse dans le litige de référé engagé par M. A mettant en cause une décision du directeur de cet institut et se rapportant aux élections des représentants des usagers au conseil d'école de l'institut ; que, dès lors, la circonstance que le président de l'université a produit un mémoire en défense dans l'instance ne saurait affecter la régularité de la procédure suivie par le juge des référés du tribunal administratif de Nantes ;

Considérant, d'autre part, qu'il était loisible au juge des référés de communiquer la demande en référé présentée par M. A au recteur de l'académie de Nantes et au ministre compétent, ainsi que de les inviter à participer à l'audience publique, en vue de recueillir leurs observations ; que c'est, par suite, sans irrégularité que le ministre chargé de l'enseignement supérieur et le recteur ont déposé des observations dans l'instance et pris part à l'audience ;

Considérant, enfin, que le juge des référés ne s'est pas mépris sur l'objet du litige ; qu'en statuant sur les moyens non inopérants qui assortissaient la demande de M. A, le juge des référés, qui n'était pas tenu de se prononcer explicitement sur le détail de l'argumentation du requérant, a suffisamment motivé son ordonnance ;

Au fond :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-5 du code de l'éducation : Le service public de l'enseignement supérieur rassemble les usagers et les personnels qui assurent le fonctionnement des établissements et participent à l'accomplissement des missions de ceux-ci dans une communauté universitaire. / Il associe à sa gestion, outre ses usagers et son personnel, des représentants des intérêts publics et des activités économiques, culturelles et sociales ; qu'aux termes de l'article L. 811-1 du même code : Les usagers du service public de l'enseignement supérieur sont les bénéficiaires des services d'enseignement, de recherche et de diffusion des connaissances et, notamment, les étudiants inscrits en vue de la préparation d'un diplôme ou d'un concours, les personnes bénéficiant de la formation continue et les auditeurs ; que le décret du 18 janvier 1985 fixant les conditions d'exercice du droit de suffrage, la composition des collèges électoraux et les modalités d'assimilation et d'équivalence de niveau pour la représentation des personnels et des étudiants aux conseils des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ainsi que les modalités de recours contre les élections prévoit que sont électeurs dans le collège des usagers, pour l'élection des membres des conseils des écoles internes des universités, les étudiants régulièrement inscrits dans l'établissement ainsi que les personnes bénéficiant de la formation continue et des auditeurs ; qu'aux termes de l'article 14 de ce décret : Sont électeurs dans les collèges des usagers les personnes régulièrement inscrites en vue de la préparation d'un diplôme ou d'un concours, ayant la qualité d'étudiants. / Sont également électeurs dans ces collèges les personnes bénéficiant de la formation continue, sous réserve qu'elles soient inscrites à un cycle de formation d'une durée minimum de cent heures et se déroulant sur une période d'au moins six mois et qu'elles soient en cours de formation au moment des opérations électorales, et qu'elles en fassent la demande. / Sont également électeurs les auditeurs, sous réserve qu'ils soient régulièrement inscrits à ce titre, qu'ils suivent les mêmes formations que les étudiants et qu'ils en fassent la demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 625-1 du code de l'éducation : La formation des maîtres est assurée par les instituts universitaires de formation des maîtres. Ces instituts accueillent à cette fin des étudiants préparant les concours d'accès aux corps des personnels enseignants et les stagiaires admis à ces concours. / La formation dispensée dans les instituts universitaires de formation des maîtres répond à un cahier des charges fixé par arrêté des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de l'éducation nationale après avis du Haut Conseil de l'éducation. Elle fait alterner des périodes de formation théorique et des périodes de formation pratique ; qu'en vertu de l'article L. 721-1 du même code, les instituts universitaires de formation des maîtres sont régis par les dispositions de l'article L. 713-9 et assimilés à des écoles faisant partie des universités ; qu'ils conduisent les actions de formation professionnelle initiale des personnels enseignants et participent à la formation continue des personnels enseignants et à la recherche en éducation ; qu'en conséquence de l'article L. 713-9, ces instituts sont dirigés par un directeur et administrés par un conseil élu, qui comprend des personnalités extérieures, des représentants du personnel d'enseignement ainsi que des représentants des autres personnels et des étudiants ; que le décret du 3 mai 2007 a créé un institut universitaire de formation des maîtres dans l'Université de Nantes à compter du 1er juin 2007 ; que l'article 4 de ce décret prévoit que : Pour l'élection aux conseils de l'université mentionnée à l'article 2 et au conseil de l'institut universitaire de formation des maîtres de cette université, les fonctionnaires stagiaires en formation à l'institut sont électeurs et éligibles dans le collège des usagers ;

Considérant qu'aux termes de l'article 24 du décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés, modifié par le décret n°2009-915 du 28 juillet 2009 : Les candidats reçus aux concours prévus aux articles 6 et 11 ou ayant bénéficié d'une dispense en application du premier alinéa de l'article 23, et remplissant les conditions de nomination dans le corps, sont nommés fonctionnaires stagiaires et affectés pour la durée du stage dans une académie par le ministre chargé de l'éducation. / Le stage a une durée d'un an. Ses prolongations éventuelles sont prononcées par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle il est accompli. / Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation dispensée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, sous la forme d'actions organisées à l'université, d'un tutorat, ainsi que le cas échéant d'autres types d'actions d'accompagnement. Les modalités du stage et les conditions de son évaluation par un jury sont arrêtées par le ministre chargé de l'éducation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, professeur certifié stagiaire en sciences économiques et sociales, a été affecté à compter du 1er septembre 2011 au lycée Aristide Briand de Saint-Nazaire dans l'académie de Nantes et bénéficie d'une formation dispensée par l'Institut universitaire de formation des maîtres des Pays de la Loire, école interne de l'Université de Nantes, conformément à ce que prévoit l'article 24 du décret du 4 juillet 1972 modifié ; que la durée de la formation dispensée par cet institut aux professeurs stagiaires comme M. A est de trente heures ;

Considérant que si le décret du 3 mai 2007 a précisé, au titre de la répartition des électeurs entre les différents collèges pour l'élection aux conseils de l'Université de Nantes et au conseil de l'Institut universitaire de formation des maîtres des Pays de la Loire, que les fonctionnaires stagiaires en formation à l'institut sont électeurs et éligibles dans le collège des usagers, les dispositions de ce décret ne font pas échec à l'application des dispositions générales du décret du 18 janvier 1985 qui déterminent les conditions d'exercice du droit de suffrage et les conditions d'éligibilité pour les élections aux conseils des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ; qu'en vertu de l'article 14 de ce décret, sont électeurs dans le collège des usagers, outre les étudiants et, sous certaines conditions, les auditeurs, les personnes qui bénéficient de la formation continue à la condition, notamment, qu'elles soient inscrites à un cycle de formation d'une durée minimum de cent heures se déroulant sur une période d'au moins six mois ;

Considérant que M. A ne peut, à l'appui de sa demande en référé visant à ce qu'il puisse participer aux élections au collège des usagers de l'Institut universitaire de formation des maîtres des Pays de la Loire, utilement invoquer les dispositions relatives aux missions des instituts universitaires de formation des maîtres ou au contenu des formations dispensées par ces instituts ; que l'application des dispositions de l'article 14 du décret du 18 janvier 1985 dans le cas de M. A, qui n'est ni étudiant, ni auditeur mais fonctionnaire stagiaire bénéficiant d'une formation à l'institut universitaire de formation des maîtres, laquelle présente le caractère d'une formation continue au sens de ces dispositions et est d'une durée inférieure à cent heures, ne traduit aucune illégalité manifeste ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du même code ne peuvent qu'être rejetées en conséquence ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Étienne A, au président de l'Université de Nantes et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 353727
Date de la décision : 07/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 2011, n° 353727
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jacques-Henri Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:353727.20111107
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