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09/11/2011 | FRANCE | N°352029

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 09 novembre 2011, 352029


Vu l'ordonnance n° 1111715 du 16 août 2011, enregistrée le 19 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la troisième section du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de l'ASSOCIATION CERAF SOLIDARITES tendant à l'annulation de la décision du 14 juin 2011 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Ile-de-France refusant d'enregistrer un accord de réduction de temps de travail signé le 5 janvier 2011 entre l'association et ses sal

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Vu l'ordonnance n° 1111715 du 16 août 2011, enregistrée le 19 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la troisième section du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de l'ASSOCIATION CERAF SOLIDARITES tendant à l'annulation de la décision du 14 juin 2011 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Ile-de-France refusant d'enregistrer un accord de réduction de temps de travail signé le 5 janvier 2011 entre l'association et ses salariés, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions des articles L. 2232-21 à L. 2232-29 du code du travail ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 juillet 2011 au greffe du tribunal administratif de Paris, présenté par l'ASSOCIATION CERAF SOLIDARITES, dont le siège est 232, rue Marcadet à Paris (75018), représentée par son vice-président, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du novembre 1958 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu les articles L. 2232-23 à L. 2232-29 du code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant que l'ASSOCIATION CERAF SOLIDARITES soutient devant le tribunal administratif de Paris que les articles L. 2232-23 à L. 2232-29 du code du travail sont contraires au droit de tout travailleur de participer à la détermination collective de ses conditions de travail, garanti par le huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; qu'elle ne conteste pas, en revanche, la conformité à ce même principe constitutionnel des articles L. 2232-21 et L. 2232-22 du code du travail, également mentionnés dans l'ordonnance de transmission du président de la troisième section du tribunal administratif de Paris ; qu'il n'y a donc pas lieu, en tout état de cause, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de constitutionnalité transmise par cette ordonnance en tant qu'elle porte sur ces deux derniers articles ;

Considérant qu'aux termes du huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ; que l'ASSOCIATION CERAF SOLIDARITES soutient que les articles L. 2232-23 à L. 2232-29 du code du travail méconnaissent ces dispositions en ce qu'ils ne permettent pas, au sein d'une entreprise dépourvue de délégués syndicaux, et en l'absence de représentants élus du personnel et de salariés mandatés par un syndicat, la négociation d'accords collectifs de travail avec l'ensemble des salariés ou avec des mandataires extérieurs à l'entreprise ;

Considérant que les articles contestés du code du travail prévoient que dans les entreprises de moins de deux cents salariés, la négociation collective ne peut être conduite, en l'absence de délégué syndical et de délégué du personnel désigné comme délégué syndical, que par les représentants élus du personnel au sein du comité d'entreprise ou, à défaut, par les délégués du personnel ou, à défaut de représentants élus dans l'entreprise, par des salariés de l'entreprise mandatés par une organisation syndicale ; qu'en confiant ainsi, dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, le pouvoir de négociation collective à des délégués des salariés de l'entreprise élus ou mandatés, sans prévoir la possibilité d'une négociation directe avec l'ensemble des salariés de l'entreprise, le législateur n'a pas méconnu les dispositions du huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; qu'en réservant par ailleurs cette négociation à des délégués qui sont salariés de l'entreprise, et qui bénéficient, grâce à leur statut de salarié protégé ou aux droits conférés par l'article L. 2232-25 aux salariés mandatés, de garanties suffisantes d'indépendance à l'égard de l'employeur, le législateur n'a pas davantage méconnu ces dispositions ; que, par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le président de la troisième section du tribunal administratif de Paris ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le président de la troisième section du tribunal administratif de Paris.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION CERAF SOLIDARITES et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au tribunal administratif de Paris.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 352029
Date de la décision : 09/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 2011, n° 352029
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:352029.20111109
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