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28/11/2011 | FRANCE | N°350108

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 28 novembre 2011, 350108


Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 et 30 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET, représentée par son maire ; la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1102257 du 27 mai 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa requête tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution des décisions des 11 mar

s et 8 avril 2011, par lesquelles le syndicat mixte du SCOT Rovaltain D...

Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 et 30 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET, représentée par son maire ; la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1102257 du 27 mai 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa requête tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution des décisions des 11 mars et 8 avril 2011, par lesquelles le syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche a refusé de lui accorder la dérogation sollicitée en vue de l'ouverture à l'urbanisation du quartier Part-Dieu, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche, à titre principal, de lui délivrer la dérogation demandée dans un délai de deux mois suivant le jugement à intervenir et à titre subsidiaire, de procéder à une nouvelle instruction de la demande de dérogation, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

2°) de mettre à la charge du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche la somme de 6 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré enregistrée le 25 novembre 2011 pour le Syndicat mixte du SCOT Rovaltin Drôme Ardèche ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Raphaël Chambon, Auditeur,

- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du syndicat mixte SCOT Rovaltain Drôme Ardèche,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gaschignard, avocat de la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du syndicat mixte SCOT Rovaltain Drôme Ardèche ;

Considérant que par une décision du 11 mars 2011, confirmée le 8 avril 2011, le syndicat mixte SCOT Rovaltain Drôme Ardèche, sollicité sur le fondement du quatrième alinéa de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, a refusé de donner son accord à la révision simplifiée du plan local d'urbanisme de la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET afin de procéder à l'extension d'une zone d'activités visant à accueillir sur le territoire de la commune les activités du groupe Monique Piffaut ; que la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une requête tendant d'une part, à l'annulation des deux décisions du syndicat mixte, d'autre part, à la suspension de ces décisions sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ; que par une ordonnance du 27 mai 2011, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de suspension au motif que l'urgence n'était pas caractérisée ; que la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

Sur le pourvoi :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

Considérant que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il prétend défendre ; que l'urgence s'apprécie objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce ;

Considérant qu'en décidant, au motif que l'intérêt général de la commune ne se confondait pas avec celui de l'entreprise désireuse de s'installer sur son territoire, que la commune ne pouvait se prévaloir d'une atteinte à ses propres intérêts, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a exclu que le développement d'une entreprise privée puisse participer de l'intérêt général local ; qu'il a ce faisant entaché son ordonnance d'une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble du 27 mai 2011 ;

Sur le règlement au titre de la procédure de référé :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées par le syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche :

Considérant, en premier lieu, que la délibération du 11 mars 2011 par laquelle le bureau du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche indique qu' " il se prononce à la majorité pour l'instauration d'un débat " entre la commune, la communauté de communes du Canton de Bourg-de-Péage, le syndicat mixte Romans-Bourg-de-Péage expansion (RBE) et les communautés de communes concernées et qu' " il se prononcera sur la demande de dérogation une fois qu'il aura connaissance des conclusions de ces échanges " présente le caractère d'une mesure préparatoire ; qu'il suit de là que le recours pour excès de pouvoir formé contre cette délibération apparaît entaché d'une irrecevabilité insusceptible d'être couverte au cours de l'instance ; que, par suite, la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET n'est pas fondée à demander la suspension de l'exécution de cette délibération ;

Considérant, en second lieu, que le syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche soutient que la délibération du 8 avril 2011 par laquelle son bureau syndical a refusé de donner son accord à la dérogation demandée par la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET sur le fondement de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme n'est, en vertu des dispositions de son règlement intérieur qui prévoient qu'" en cas de désaccord de la commune sur tout avis formulé par le bureau du syndicat, la commune pourra formuler un recours auprès du syndicat dans un délai de quinze jours après notification. Dans ce cas, l'avis sera examiné par le comité syndical qui établira l'avis définitif après débat ", pas définitive et revêt ainsi le caractère d'une mesure préparatoire insusceptible de recours ; que, toutefois, aux termes de l'article L. 5211-6 du code général des collectivités territoriales, applicable au syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche en vertu de l'article L. 5711-1 du même code : " L'établissement public de coopération intercommunale est administré par un organe délibérant composé de délégués élus par les conseils municipaux des communes membres " ; qu'en vertu de l'article L. 5211-10 du même code, le bureau peut recevoir délégation d'une partie des attributions de l'organe délibérant ; qu'aux termes de l'article 3 du titre II du règlement intérieur du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche, le bureau examine les demandes de dérogations à l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme ; que si ce même article prévoit la possibilité pour la commune de former un recours dans un délai de quinze jours auprès du comité syndical, ce recours n'est que facultatif ; que par suite, la délibération du bureau du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche du 8 avril 2011 revêt le caractère d'une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir et est, comme telle, susceptible de faire l'objet d'une demande de suspension ;

En ce qui concerne la demande de suspension :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le rejet de la demande de la commune fait obstacle à la procédure de révision simplifiée du plan local d'urbanisme qu'elle avait engagée en vue de favoriser son développement économique et à l'implantation de l'industriel intéressé par le secteur en cause, qui sera ainsi incité à chercher une implantation dans une autre commune ; que l'impossibilité d'accueillir cet industriel sur le territoire de la commune porte atteinte aux intérêts de cette dernière ; qu'ainsi, il est satisfait à la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme : " La dérogation ne peut être refusée que si les inconvénients éventuels de l'urbanisation envisagée pour les communes voisines, pour l'environnement ou pour les activités agricoles sont excessifs au regard de l'intérêt que représente pour la commune la modification ou la révision du plan " ; que pour motiver son refus, le bureau du syndicat mixte s'est fondé sur la circonstance que le projet pouvait être accueilli dans les zones d'activités existantes sur le territoire de la communauté de communes du canton de Bourg-de-Péage ; qu'en ne procédant pas à la comparaison entre les inconvénients de l'urbanisation envisagée et l'intérêt que représente pour la commune la révision du plan, il a méconnu les dispositions de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la délibération du 8 avril 2011 est entachée d'une erreur de droit est de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette délibération ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET est fondée à demander la suspension de l'exécution de la délibération du 8 avril 2011 du bureau du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que l'exécution de la présente décision implique que la demande de dérogation sur le fondement des dispositions de l'article L. 122-2 du code d'urbanisme présentée par la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche de procéder à ce réexamen dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche une somme de 5 000 euros à verser à la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 27 mai 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble est annulée.

Article 2 : L'exécution de la délibération du bureau du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche de procéder au réexamen de la demande de la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : Le syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche versera à la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET est rejeté.

Article 6 : Les conclusions du syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CHATUZANGE-LE-GOUBET et au syndicat mixte du SCOT Rovaltain Drôme-Ardèche.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 350108
Date de la décision : 28/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2011, n° 350108
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Christine Maugüé
Rapporteur ?: M. Raphaël Chambon
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:350108.20111128
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