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07/12/2011 | FRANCE | N°328283

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 07 décembre 2011, 328283


Vu, 1°) sous le n° 328283, la requête, enregistrée le 26 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par M. Philippe Rudyard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté son recours gracieux contre la décision fixant le montant de la cotisation due par les personnes inscrites au tableau de l'ordre pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre au conseil national de produire l'ensemble des documents comptables et fiscaux pertinents pou

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Vu, 1°) sous le n° 328283, la requête, enregistrée le 26 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par M. Philippe Rudyard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté son recours gracieux contre la décision fixant le montant de la cotisation due par les personnes inscrites au tableau de l'ordre pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre au conseil national de produire l'ensemble des documents comptables et fiscaux pertinents pour les exercices 2005 à 2008 et de désigner un expert afin qu'il fixe contradictoirement le montant de la cotisation pour l'exercice 2009 conforme aux prescriptions légales ;

3°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 328284, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mai 2009 et 25 janvier 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS, dont le siège est ... ; le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté son recours gracieux contre la décision fixant le montant de la cotisation due par les personnes inscrites au tableau de l'ordre pour l'année 2009 ;

2°) d'enjoindre au conseil national de produire l'ensemble des documents comptables et fiscaux pertinents pour les exercices 2005 à 2008 et de désigner un expert afin qu'il fixe contradictoirement le montant de la cotisation pour l'exercice 2009 conforme aux prescriptions légales ;

3°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 3°) sous le n° 336781, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 février et 10 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Philippe Rudyard A, demeurant ... et le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS, dont le siège est à la même adresse ; M. A et le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes fixant le montant de la cotisation due par les personnes inscrites au tableau de l'ordre pour l'année 2010 ;

2°) d'enjoindre au conseil national de produire l'ensemble des documents comptables et fiscaux pertinents pour l'exercice 2009 et de désigner un expert afin qu'il fixe contradictoirement le montant de la cotisation pour l'exercice 2010 conforme aux prescriptions légales ;

3°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 7 000 euros à verser à M. A et la même somme à verser au SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la décision du 16 juillet 2010 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A et le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS au soutien de leurs requêtes n° 328283, 328284 et 336781 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Ranquet, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes ;

Considérant que les requêtes visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant que M. A et le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS demandent l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, du rejet implicite, par le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, de leur recours gracieux contre sa délibération fixant le montant de la cotisation due par les personnes inscrites au tableau de l'ordre pour l'année 2009 et, d'autre part, de la délibération du même conseil fixant le montant de la cotisation pour l'année 2010 ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes à la requête n° 328284 et à la requête n° 336781 en tant qu'elle est présentée par le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS ;

Sur la régularité de la procédure de fixation du montant de la cotisation :

Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, non plus que d'aucun principe, que les comptes et le budget prévisionnels du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes doivent être soumis, à peine d'illégalité de la décision fixant le montant de la cotisation, à l'avis d'une commission ne comportant aucun membre du conseil national ; que doit par suite être écarté le moyen tiré de ce que les décisions contestées seraient intervenues au terme d'une procédure irrégulière du fait que la commission des finances, de contrôle des comptes et placements de fonds instituée par le règlement intérieur du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes soit composée de membres de ce conseil, lesquels au demeurant ne peuvent être membres de son bureau ;

Sur les charges couvertes par la cotisation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 4121-1 du code de la santé publique : L'ordre des médecins, celui des chirurgiens-dentistes et celui des sages-femmes veillent au maintien des principes de moralité, de probité, de compétence et de dévouement indispensables à l'exercice de la médecine, de l'art dentaire, ou de la profession de sage-femme et à l'observation, par tous leurs membres, des devoirs professionnels, ainsi que des règles édictées par le code de déontologie prévu à l'article L. 4127-1. / Ils assurent la défense de l'honneur et de l'indépendance de la profession médicale, de la profession de chirurgien-dentiste ou de celle de sage-femme. / Ils peuvent organiser toutes oeuvres d'entraide et de retraite au bénéfice de leurs membres et de leurs ayants droit. / Ils accomplissent leur mission par l'intermédiaire des conseils départementaux, des conseils régionaux ou interrégionaux et du conseil national de l'ordre. ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 4122-2 du même code, dont les dispositions sont applicables à l'ensemble des ordres nationaux des professions médicales : Le conseil national fixe le montant de la cotisation versée à chaque ordre par toute personne inscrite au tableau, qu'elle soit physique ou morale. ; que la cotisation ainsi levée a pour objet de procurer à l'ordre les ressources nécessaires à son fonctionnement comme à l'accomplissement des missions que le législateur lui a confiées ;

Considérant, en premier lieu, que même si, jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions de l'article L. 4125-3-1 du code de la santé publique issues de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires et de leurs mesures d'application, le versement d'indemnités aux membres des conseils de l'ordre des chirurgiens-dentistes à raison de leur participation aux travaux de ces conseils ne faisait l'objet d'aucun encadrement législatif ou réglementaire, le versement de telles indemnités ne constitue pas, par lui-même, une dépense étrangère aux missions de l'ordre qui ferait peser une charge indue sur les personnes inscrites à son tableau ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'Union française de santé bucco-dentaire, association qui a notamment pour objet de susciter, animer, coordonner et développer tous les efforts entrepris en faveur de la santé bucco-dentaire , est au nombre des oeuvres intéressant la profession auxquelles le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes peut verser des financements sans outrepasser ses missions ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'activité commerciale accessoire de cette association soit de nature à remettre en cause cette qualité ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres dépenses que les requérants qualifient de charges indues, notamment celles liées à l'édition du bulletin de l'ordre et à la rémunération de divers prestataires de services libéraux, soient étrangères à l'accomplissement par l'ordre des missions qu'il doit ou peut légalement poursuivre ;

Sur le montant de la cotisation due par les personnes morales inscrites au tableau de l'ordre :

Considérant que, pour l'application des dispositions du premier alinéa de l'article L. 4122-2 du code de la santé publique, les décisions fixant le montant des cotisations pour les années 2009 et 2010 ont retenu un montant forfaitaire unique pour toutes les personnes physiques ou morales inscrites au tableau de l'ordre ; qu'il en résulterait selon les requérants une différence de traitement, contraire au principe d'égalité, entre les chirurgiens-dentistes exerçant en leur nom propre et ceux qui, exerçant comme associés d'une société, doivent la cotisation en qualité de personne physique alors que leur société doit la même cotisation et acquittent, de ce fait, une contribution plus élevée aux charges de l'ordre ;

Considérant que l'assujettissement à cotisation des personnes physiques et des personnes morales inscrites au tableau de l'ordre est prescrit par les dispositions législatives mentionnées ci-dessus ; que si elles ne font pas obstacle à ce que le conseil national fixe des modalités de calcul de la cotisation tenant compte de ce qu'une personne physique inscrite au tableau est associée d'une société elle-même soumise à cotisation, elles n'interdisent pas non plus, par elles-mêmes, la fixation d'une cotisation d'un montant identique pour la société d'une part et chacun des associés d'autre part ; que compte tenu des charges particulières que représente pour l'ordre l'exercice de ses missions à l'égard des sociétés inscrites à son tableau, les chirurgiens-dentistes exerçant en leur nom propre et ceux exerçant comme associés d'une société ne se trouvent pas dans la même situation ; que la différence de traitement qui résulte, entre eux, de ce que le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes n'a pas prévu de modulation de la cotisation due par les personnes morales n'est pas manifestement disproportionnée au regard de cette différence de situation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise demandée, que M. A et le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions attaquées ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A et du SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS une somme de 1 000 euros chacun au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de M. A et du SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS sont rejetées.

Article 2 : M. A et le SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS verseront chacun la somme de 1 000 euros au Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe Rudyard A, au SYNDICAT DENTISTES SOLIDAIRES ET INDEPENDANTS et au Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 328283
Date de la décision : 07/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2011, n° 328283
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bernard Stirn
Rapporteur ?: M. Philippe Ranquet
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:328283.20111207
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