La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2011 | FRANCE | N°343128

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 07 décembre 2011, 343128


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre et 8 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE COFINFO, dont le siège est 23 boulevard Poissonnière à Paris (75002) ; la SOCIETE COFINFO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA02500 du 8 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0508142/6-3 du 2 mars 2009 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande d'annulation du titre de perception ém

is à son encontre le 22 octobre 2004 par le préfet de Paris pour le rec...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre et 8 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE COFINFO, dont le siège est 23 boulevard Poissonnière à Paris (75002) ; la SOCIETE COFINFO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA02500 du 8 juillet 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0508142/6-3 du 2 mars 2009 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande d'annulation du titre de perception émis à son encontre le 22 octobre 2004 par le préfet de Paris pour le recouvrement de 152 812,64 euros correspondant au montant des travaux réalisés d'office dans un immeuble situé 5 rue Godefroy Cavaignac à Paris pour faire supprimer un risque d'exposition au plomb ainsi que de la décision du préfet du 11 mars 2005 rejetant sa réclamation dirigée contre ce titre de perception ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2004-806 du 9 août 2004, notamment le III de son article 77 ;

Vu le décret n° 2006-474 du 25 avril 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la SOCIETE COFINFO,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la SOCIETE COFINFO ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 1334-1 à L. 1334-4 du code de la santé publique dans leur rédaction antérieure aux modifications issues de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique que, lorsque le diagnostic qu'elles prévoient établit l'existence d'un risque d'intoxication au plomb des occupants d'un immeuble, le préfet notifie au propriétaire son intention de faire exécuter, aux frais de celui-ci, les travaux nécessaires pour supprimer le risque constaté et que, si le propriétaire, dans le délai de dix jours, n'exerce pas le recours qui lui est ouvert devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme du référé et ne s'engage pas à procéder dans le délai d'un mois aux travaux prescrits, le préfet fait exécuter ceux-ci aux frais du propriétaire et que la créance de l'Etat est recouvrée comme en matière de contributions directes ;

Considérant qu'aux termes du 4ème alinéa ajouté à l'article L. 1334-4 du même code par la loi du 9 août 2004, entré en vigueur, en application des dispositions du III de l'article 77 de cette loi, lorsqu'a été publié au Journal officiel de la République française du 26 avril 2006 le décret du 25 avril 2006 relatif à la lutte contre le saturnisme et modifiant les articles R. 1334-1 à R. 1334-13 du code de la santé publique : " Lorsque les locaux sont occupés par des personnes entrées par voie de fait ayant fait l'objet d'un jugement d'expulsion devenu définitif et que le propriétaire ou l'exploitant du local d'hébergement s'est vu refuser le concours de la force publique pour que ce jugement soit mis à exécution, le propriétaire ou l'exploitant du local d'hébergement peut demander au tribunal administratif que tout ou partie de la créance dont il est redevable soit mis à la charge de l'Etat ; cette somme vient en déduction de l'indemnité à laquelle peut prétendre le propriétaire en application de l'article 16 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution. " ; qu'eu égard à leur objet et en l'absence de dispositions prévoyant une application différée , ces dispositions législatives étaient d'application immédiate, y compris aux instances en cours n'ayant pas fait l'objet d'une décision passée en force de chose jugée et notamment aux procédures en cours relatives à des créances émises antérieurement à la loi ; que, lorsque le juge administratif est saisi d'un litige dans le cadre duquel il est soutenu qu'un refus de concours de la force publique en vue de l'exécution d'un jugement d'expulsion doit entraîner la mise à la charge de l'Etat du coût des travaux exécutés d'office en application des dispositions L. 1334-1 à L. 1334-4 du code de la santé publique, il lui appartient en conséquence d'examiner ce moyen en faisant application de ces nouvelles dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, après avoir notifié le 17 juin 2003 à la société Kentucky, propriétaire d'un immeuble situé 5 rue Godefroy Cavaignac à Paris, son intention de faire exécuter aux frais de celle-ci les travaux nécessaires pour supprimer le risque constaté d'intoxication au plomb des occupants de l'immeuble, le préfet de Paris a décidé le 17 mars 2004 de faire exécuter ces travaux d'office, a émis le 22 octobre 2004 un titre de perception en vue du recouvrement du coût des travaux, chiffré à 152 812,64 euros, et a rejeté par une décision du 11 mars 2005 le recours gracieux formé par la société contre le titre de perception ; que, par un arrêt du 8 juillet 2010, la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du 2 mars 2009 du tribunal administratif de Paris rejetant la demande de la SOCIETE COFINFO, venant aux droits de la société Kentucky, tendant à l'annulation du titre de perception et de la décision de rejet du recours gracieux, en écartant notamment le moyen que la société tirait des dispositions du 4ème alinéa de l'article L. 1334-4 du code de la santé publique au motif que ces dispositions n'étaient pas applicables au litige dès lors qu'elles n'étaient en vigueur ni à la date du 22 octobre 2004 à laquelle a été émis le titre de perception ni à celle du 11 mars 2005 à laquelle a été rejeté le recours gracieux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en jugeant ainsi que les dispositions du 4ème alinéa de l'article L. 1334-4 du code de la santé publique n'étaient pas applicables au litige alors qu'elles étaient en vigueur à la date à laquelle elle a statué, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, la SOCIETE COFINFO est fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 8 juillet 2010 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que demande la SOCIETE COFINFO au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 8 juillet 2010 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE COFINFO la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE COFINFO et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 343128
Date de la décision : 07/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - APPLICATION DANS LE TEMPS - TEXTE APPLICABLE - APPLICATION IMMÉDIATE DES TEXTES DE PROCÉDURE - 4ÈME ALINÉA DE L'ARTICLE L - 1334-4 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE - INCLUSION [RJ1].

01-08-03 Eu égard à leur objet et en l'absence de dispositions prévoyant une application différée, les dispositions du quatrième alinéa ajouté à l'article L. 1334-4 du code de la santé publique par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004, entrées en vigueur le 26 avril 2006 et prévoyant la possibilité pour les bénéficiaires d'un jugement d'expulsion s'étant vu refuser le concours de la force publique de demander au tribunal administratif que tout ou partie de leur créance soit mis à la charge de l'Etat, étaient d'application immédiate, y compris aux instances en cours n'ayant pas fait l'objet d'une décision passée en force de chose jugée et notamment aux procédures en cours relatives à des créances émises antérieurement à la loi.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - EXÉCUTION DES JUGEMENTS - CONCOURS DE LA FORCE PUBLIQUE - REFUS DE CONCOURS POUR UN JUGEMENT D'EXPULSION - POSSIBILITÉ - POUR SON BÉNÉFICIAIRE - DE DEMANDER AU TA QUE TOUT OU PARTIE DE LA CRÉANCE DONT IL EST REDEVABLE SOIT MIS À LA CHARGE DE L'ETAT (ART - L - 1334-4 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE - 4ÈME AL - ) - APPLICATION IMMÉDIATE Y COMPRIS AUX INSTANCES EN COURS - EXISTENCE [RJ1].

37-05-01 Eu égard à leur objet et en l'absence de dispositions prévoyant une application différée, les dispositions du quatrième alinéa ajouté à l'article L. 1334-4 du code de la santé publique par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004, entrées en vigueur le 26 avril 2006 et prévoyant la possibilité pour les bénéficiaires d'un jugement d'expulsion s'étant vu refuser le concours de la force publique de demander au tribunal administratif que tout ou partie de leur créance soit mis à la charge de l'Etat, étaient d'application immédiate, y compris aux instances en cours n'ayant pas fait l'objet d'une décision passée en force de chose jugée et notamment aux procédures en cours relatives à des créances émises antérieurement à la loi.


Références :

[RJ1]

Cf., s'agissant de la règle selon laquelle le juge de plein contentieux prend en compte les dispositions législatives postérieures au fait générateur uniquement si le législateur a entendu leur donner une telle portée, CE, Section, 7 février 2008, Mme Baomar, n° 267744, p. 30 ;

CE, 11 décembre 2009, Mme Hamsi veuve Laidani, n° 304723, T. pp. 620-857-862-916.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2011, n° 343128
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:343128.20111207
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award