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13/12/2011 | FRANCE | N°354530

France | France, Conseil d'État, 13 décembre 2011, 354530


Vu la requête, enregistrée le 2 décembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Manuel Da Costa A, domicilié ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1103129 en date du 17 novembre 2011, par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Oise de lui indiquer un centre d'accueil ou, à défaut, le centre d'hébe

rgement et de réinsertion sociale susceptible de l'accueillir dans un déla...

Vu la requête, enregistrée le 2 décembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Manuel Da Costa A, domicilié ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1103129 en date du 17 novembre 2011, par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Oise de lui indiquer un centre d'accueil ou, à défaut, le centre d'hébergement et de réinsertion sociale susceptible de l'accueillir dans un délai de vingt-quatre heures, sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au directeur territorial de l'office français de l'immigration et de l'intégration de lui fournir une aide matérielle complémentaire ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui assurer sans délai et de façon durable des conditions d'accueil qui couvrent ses besoins en matière d'hébergement, de nourriture et d'habillement, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'ordonnance à venir ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 ;

il soutient que, malgré l'acceptation de l'offre de prise en charge et le dépôt d'une demande d'admission dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile, l'autorité administrative n'établit ni qu'elle a recherché dans le département ou dans d'autres régions un centre d'accueil ou d'hébergement ni qu'elle a assuré d'autres modalités d'accueil qui répondent aux exigences de la dignité humaine ; que la durée anormalement longue de sa situation précaire constitue une atteinte suffisamment grave et immédiate au droit d'asile ; qu'il ne s'est pas vu proposer un hébergement d'urgence ni de colis alimentaires par la plateforme d'accueil des demandeurs d'asile ; que le suivi de son état de santé par un pôle infirmier et l'octroi d'une aide alimentaire ne sont pas suffisants pour assurer les besoins fondamentaux définis par les dispositions de l'article 2 de la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 ; qu'en l'absence d'accomplissement de l'ensemble des diligences qui incombent à l'administration pour assurer les besoins fondamentaux des demandeurs d'asile, le préfet a porté une atteinte manifeste au droit d'asile ; que le fait de le laisser dormir sans abri constitue un traitement inhumain et dégradant ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en intervention, enregistré le 7 décembre 2011, présenté par la Cimade, dont le siège est situé au 64 rue Clisson à Paris (75013), représentée par son président en exercice, qui tend aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ; elle soutient en outre qu'elle a intérêt à agir dès lors qu'elle apporte son soutien aux demandeurs d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2003/9 (CE) du Conseil du 27 janvier 2003 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant que la Cimade a intérêt à l'annulation de l'ordonnance attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en compte les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

Considérant, d'une part, que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que, d'autre part, l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative est subordonné à la condition qu'une autorité administrative ait porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ; que la méconnaissance des obligations prévues par le droit de l'Union européenne comme par le droit national en matière d'accueil des demandeurs d'asile peut faire apparaître une telle atteinte lorsqu'elle est manifeste et qu'elle comporte en outre des conséquences graves pour le demandeur d'asile concerné , compte tenu de son âge, de son état de santé ou de sa situation familiale ; que cette méconnaissance s'apprécie compte tenu des diligences accomplies par l'administration au regard des moyens dont elle dispose ;

Considérant que M. A, ressortissant angolais, né le 30 juin 1977, est entré en France le 16 mai 2011 pour y solliciter le statut de réfugié ; qu'une autorisation provisoire de séjour lui a été délivrée par la préfecture de l'Oise afin qu'il puisse déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que l'intéressé a accepté un accueil en centre d'accueil pour demandeurs d'asile ; que, dans l'attente d'une place disponible, il a été orienté vers une plate-forme d'accueil et qu'il a ainsi pu bénéficier du dispositif de veille sociale, d'aides alimentaires et d'un suivi infirmier ; que l'intéressé a obtenu une adresse de domiciliation auprès d'une association agréée chargée de l'accueil des refugiés et a perçu l'allocation temporaire d'attente ; que son cas personnel a été examinée par l'administration, au regard notamment de son âge, de sa situation familiale et de son état de santé ;

Considérant que, pour les motifs retenus par le juge des référés de première instance, le dossier ne fait, dans ces conditions, pas apparaître, compte tenu des diligences accomplies par l'administration au regard des moyens dont elle dispose, de méconnaissance grave et manifeste des obligations qui découlent du respect du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel de M. A ne peut être accueilli ; que, par suite, sans qu'il y ait lieu de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle, la requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

O R D O N N E :

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Article 1er : L'intervention de la Cimade est admise.

Article 2 : La requête de M. A est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Manuel Da Costa A et à la Cimade.

Copie en sera adressée au préfet de l'Oise et au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 13 déc. 2011, n° 354530
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Avocat(s) : SPINOSI

Origine de la décision
Date de la décision : 13/12/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 354530
Numéro NOR : CETATEXT000025162178 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-12-13;354530 ?
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