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20/12/2011 | FRANCE | N°321586

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 20 décembre 2011, 321586


Vu l'ordonnance n° 08NC01453 du 9 octobre 2008, enregistrée le 14 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par l'ASSOCATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE ;

Vu le pourvoi, enregistré le 24 septembre 2008 au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, et le mémoire de régularisation, enregistré le 19 novembre 2008 au secrétariat

du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCATION FON...

Vu l'ordonnance n° 08NC01453 du 9 octobre 2008, enregistrée le 14 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par l'ASSOCATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE ;

Vu le pourvoi, enregistré le 24 septembre 2008 au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, et le mémoire de régularisation, enregistré le 19 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE, dont le siège est Hôtel de Ville 10 rue Royale au Pavillon-Sainte-Julie (10350) ; l'ASSOCATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0502275 du 28 juillet 2008 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, d'une part, déchargé M. Czeslaw Jean A des sommes dues au titre des redevances pour travaux connexes au remembrement pour les années 1999 et 2000 et, d'autre part, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa demande relative à la redevance pour l'année 2004 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A ;

3°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret du 18 décembre 1927 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matthieu Schlesinger, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON SAINTE-JULIE et de la SCP Gaschignard, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON SAINTE-JULIE et à la SCP Gaschignard, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté n° 93-32227 du 6 octobre 1993, le préfet de l'Aube a engagé un remembrement commun aux communes de Fontaine-les-Grès, du Pavillon-Sainte-Julie et de Savière, avec extensions sur les communes de Echemines, Payns, Saint-Lye, Saint-Mesmin et Villeloup, et participation financière des intéressés ; que M. Czeslaw Jean A, qui exerce la profession d'agriculteur, est propriétaire de terres situées au Pavillon-Sainte-Julie et à Villeloup dans le périmètre du remembrement ; qu'à ce titre, l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE a mis à sa charge, depuis l'année 1997, une redevance pour travaux connexes afin de financer les travaux qu'elle a réalisés lors du remembrement ; que, par un jugement du 28 juillet 2008, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a, d'une part, déchargé du paiement des sommes réclamées au titre des années 1999 et 2000 par le commandement de payer du 26 septembre 2005 au motif que ces sommes avaient déjà été recouvrées par une saisie-attribution du 12 mai 2005 ; que ce tribunal a, d'autre part, prononcé un non-lieu à statuer sur la demande dirigée contre ce même commandement de payer en ce qu'il concernait l'année 2004 ; que l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE se pourvoit en cassation contre ce jugement ; que M. A conteste également, par le biais d'un pourvoi incident, ce jugement en tant qu'il a prononcé un non-lieu à statuer sur sa demande relative à l'année 2004 ;

Sur les conclusions du pourvoi principal relatives aux années 1999 et 2000 :

Considérant, en premier lieu, que l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt n° 05NC00865 du 14 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a réduit le montant de la redevance pour travaux connexes dues selon un commandement de payer du 9 octobre 2001 par M. A au titre des années 1999 et 2000 ne faisait pas obstacle à ce que M. A, qui avait intérêt à agir, saisisse le tribunal administratif de conclusions dirigées contre le commandement de payer du 26 septembre 2005 poursuivant le recouvrement des sommes que l'association requérante estimait comme restant à sa charge ; qu'il s'ensuit que le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en écartant la fin de non-recevoir soulevée par l'association requérante et tirée de l'exception de chose jugée et du défaut d'intérêt à agir ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment du procès-verbal de la saisie-attribution du 12 mai 2005 qui fait référence aux factures impayées des années 1999 et 2000, que les sommes dues au titre de la redevance des années 1999 et 2000 ont été prélevées à cette occasion ; que, par suite, le moyen tiré de la dénaturation des pièces du dossier ne peut qu'être écarté ;

Sur les conclusions relatives à l'année 2004 :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir soulevée par M. A :

Considérant que lorsque le juge du premier degré décide qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande dont il a été saisi par suite de la disparition de l'objet de cette dernière, l'intérêt à se pourvoir en cassation contre un tel jugement doit être apprécié au regard des conclusions des parties à l'instance ; que si la partie ayant elle-même conclu en cours d'instance à ce qu'il n'y ait lieu de statuer sur la demande est sans intérêt à contester un tel jugement, il en va différemment pour la partie qui n'a pas présenté de conclusions en ce sens ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE a conclu, devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, à titre principal, à l'incompétence du tribunal et à l'irrecevabilité de la requête, à titre subsidiaire, au rejet de la demande ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient M. A, l'association requérante est recevable à se pourvoir en cassation contre le jugement attaqué en tant qu'il prononce un non-lieu à statuer sur la demande relative à l'année 2004 ;

En ce qui concerne les moyens relatifs à l'année 2004 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a payé à l'association requérante la somme de 500,88 euros au titre de l'année 2004 alors que l'association lui avait adressé une facture de 665,04 euros pour cette année ; que le commandement de payer du 26 septembre 2005 poursuit, au titre de 2004, le recouvrement de la somme de 164,16 euros qui correspond à la différence entre le montant réclamé par l'association et celui payé par M. A ; que, par suite, en estimant que le litige concernait, au titre de cette année, la somme de 175,64 euros correspondant à une surface de 16 hectares et 5 ares située sur la commune du Pavillon-Sainte-Julie dont M. A était devenu propriétaire en 2003, pour juger que ce litige était devenu sans objet à la suite d'une délibération de l'association du 23 septembre 2006 relative à cette surface, le tribunal a dénaturé les pièces du dossier ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, il y a lieu de faire droit tant aux conclusions de ce pourvoi qu'à celles du pourvoi incident présentées par M. A relatives à l'année 2004 et d'annuler l'article 2 du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur le fond :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevé par l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE ;

Considérant, en premier lieu, que la circonstance que le commandement de payer en litige ne mentionne pas les voies et délais de recours est, en tout état de cause, sans incidence sur sa légalité ;

Considérant, en second lieu, que l'article 43 du décret du 18 décembre 1927, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que le recours "contre les opérations qui ont fixé les bases de répartition des dépenses cesse d'être recevable trois mois après la mise en recouvrement du premier rôle ayant fait application de ces bases" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A a contesté les bases de répartition de la redevance pour la première fois en 1999 à l'occasion du troisième rôle en faisant application, alors qu'il avait reçu notification préalablement du premier rôle en faisant application au titre de l'année 1997 ; que son recours a ainsi été présenté après le délai de 3 mois prévu à l'article 43 du décret du 18 décembre 1927 ; que, contrairement à ce que soutient M. A, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt du 14 mai 2007 de la cour administrative d'appel de Nancy qui a fait droit à sa demande de décharge des sommes dues au titre des redevances pour travaux connexes au remembrement pour les années 1999 et 2000 ne fait pas obstacle à ce que puisse lui être opposé le délai de l'article 43 du décret du 18 décembre 1927 ; qu'il suit de là qu'est irrecevable son moyen tiré de ce que l'association requérante ne pouvait légalement calculer le montant de la redevance pour travaux connexes au remembrement en tenant compte de la surface de ses terres comprises dans le périmètre du remembrement mais situées à l'extérieur du périmètre de compétence de l'association de remembrement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. A tendant à ce qu'il soit déchargé du montant des sommes restant à sa charge au titre de l'année 2004 et dont le recouvrement est poursuivi par le commandement de payer en litige doit être rejetée ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE au titre des dispositions de cet article ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 du jugement du 28 juillet 2008 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : La demande de M. A tendant à ce que soit prononcée la décharge des sommes relatives à l'année 2004 dont le recouvrement est poursuivi par le commandement de payer du 26 septembre 2005 et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT SAINTE-JULIE est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION FONCIERE DE REMEMBREMENT DU PAVILLON-SAINTE-JULIE et à M. Czeslaw Jean A.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 321586
Date de la décision : 20/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-08-02-004 PROCÉDURE. VOIES DE RECOURS. CASSATION. RECEVABILITÉ. - JUGEMENT DE NON-LIEU - APPRÉCIATION DE L'INTÉRÊT DES PARTIES À SE POURVOIR EN CASSATION AU REGARD DE LEURS CONCLUSIONS DEVANT LES JUGES DU FOND.

54-08-02-004 Lorsque le juge du premier degré décide qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande dont il a été saisi par suite de la disparition de l'objet de cette dernière, l'intérêt à se pourvoir en cassation contre un tel jugement doit être apprécié au regard des conclusions des parties à l'instance. Si la partie ayant elle-même conclu en cours d'instance à ce qu'il n'y ait pas lieu de statuer sur la demande est sans intérêt à contester un tel jugement, il en va différemment pour la partie qui n'a pas présenté de conclusions en ce sens.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 déc. 2011, n° 321586
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Matthieu Schlesinger
Rapporteur public ?: M. Pierre Collin
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU, BAUER-VIOLAS ; SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:321586.20111220
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