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30/01/2012 | FRANCE | N°334869

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 30 janvier 2012, 334869


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE QUINTO AVENIO, dont le siège est 37 bis rue Greneta à Paris (75002), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE QUINTO AVENIO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les décisions des 5 février et 11 mars 2008 par lesquelles le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature en vue de l'exploitation du service de radio Skyrock par voie hertzienne terrestre dans les zones de Menton, Arles, Cavaillon et Orange du ressort du c

omité technique radiophonique de Marseille ;

2°) d'enjoindre au Cons...

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE QUINTO AVENIO, dont le siège est 37 bis rue Greneta à Paris (75002), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE QUINTO AVENIO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les décisions des 5 février et 11 mars 2008 par lesquelles le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature en vue de l'exploitation du service de radio Skyrock par voie hertzienne terrestre dans les zones de Menton, Arles, Cavaillon et Orange du ressort du comité technique radiophonique de Marseille ;

2°) d'enjoindre au Conseil supérieur de l'audiovisuel de lui délivrer les autorisations demandées sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

Considérant que la société QUINTO AVENIO demande l'annulation des décisions des 5 février et 11 mars 2008 par lesquelles le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté sa candidature en vue de l'exploitation d'un service de radio par voie hertzienne dénommé Skyrock et relevant de la catégorie C pour les zones de Menton, Arles, Cavaillon et Orange du ressort du comité technique radiophonique de Marseille ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'afin d'être en mesure d'apprécier l'intérêt respectif des différents projets de service de radio par voie hertzienne qui lui sont présentés dans une zone, le Conseil supérieur de l'audiovisuel est tenu de statuer sur l'ensemble des candidatures dont il est saisi pour cette zone et de décider de leur acceptation ou de leur rejet au cours d'une même séance ; que la circonstance qu'une décision de refus soit notifiée au-delà du délai d'un mois après la publication au Journal officiel des autorisations accordées pour cette zone, prévu à l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986, est sans incidence sur la légalité de cette décision ; qu'il résulte de ce qui précède que la circonstance que les décisions de rejet des candidatures de la SOCIETE QUINTO AVENIO, prises par le Conseil supérieur de l'audiovisuel lors de ses séances des 5 février et 11 mars 2008, lui aient été notifiées par une lettre du 20 octobre 2009, alors que les décisions d'autorisation prises lors des mêmes séances, et que cette société n'a pas contestées, avaient été publiées au Journal officiel du 14 mai 2008, est sans incidence sur leur légalité ;

Sur la légalité interne :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, dans sa rédaction applicable à la date des décisions attaquées, le Conseil supérieur de l'audiovisuel accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. / Il tient également compte : (...) 5° de la contribution à la production de programmes réalisés localement. / (...) Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission sociale de proximité (...) / Le Conseil veille également au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d'une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d'autre part. / Il s'assure que le public bénéficie de services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale ;

Considérant, d'autre part, que, par deux communiqués n° 34 du 29 août 1989 et n° 281 du 10 novembre 1994, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, faisant usage de la compétence qui lui a été conférée par l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, a déterminé cinq catégories de services en vue de l'appel à candidatures pour l'exploitation de services de radio par voie hertzienne terrestre ; que ces cinq catégories sont ainsi définies : services associatifs éligibles au fonds de soutien, mentionnés à l'article 80 (catégorie A), services locaux ou régionaux indépendants ne diffusant pas de programme national identifié (B), services locaux ou régionaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale (C), services thématiques à vocation nationale (D), et services généralistes à vocation nationale (E) ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en statuant sur l'ensemble des candidatures au cours des deux mêmes séances, le Conseil supérieur de l'audiovisuel ait omis d'examiner l'intérêt particulier de chaque projet ;

Considérant, que le moyen tiré de ce que les décisions attaquées, méconnaîtraient les stipulations de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

En ce qui concerne la zone de Menton :

Considérant que, dans cette zone où le service Virgin Radio Côte d'Azur était déjà autorisé en catégorie C et où cinq fréquences étaient disponibles, le Conseil a retenu un service en catégorie B, Emotion FM, deux services en catégorie C, Alpazur NRJ et RTL 2 Sud, un service en catégorie D, BFM, et un service en catégorie E, Europe 1 ; qu'il a attribué une fréquence à RTL 2 Sud en catégorie C au motif que cette fréquence était très proche de celle attribuée au même service dans la zone de voisine de Nice et que son affectation à la diffusion d'un autre programme aurait entraîné des phénomènes de brouillage ; que, pour écarter la candidature de Skyrock en catégorie C, il a retenu que ce service, qui s'adresse en partie au même public que le service Alpazur NRJ choisi dans la même catégorie, ne comportait qu'un programme d'intérêt local de trois heures alors que le service Alpazur NRJ comportait un tel programme de cinq heures et treize minutes ; qu'il ne s'est pas ainsi fondé sur des faits matériellement inexacts en ce qui concerne le caractère partiellement commun du public visé et n'a pas davantage fait ainsi une inexacte application des dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ; que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui doit, en application du dernier alinéa de l'article 29, s'assurer que le public bénéficie de services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale, n'a pas davantage fait une inexacte application de ces dispositions en retenant le service Europe 1 en catégorie E, nonobstant la présence dans la zone des radios de service public, ainsi que du service RTL, autorisé dans la même catégorie, eu égard à l'intérêt qui s'attache à ce que le public puisse bénéficier du traitement différencié de l'actualité politique et générale assurée par ces différents services ; que, s'il a au contraire écarté les candidatures de RTL et d'Europe 1 présentées en catégorie E dans la zone d'Arles, où une seule fréquence était disponible, une telle circonstance n'est pas de nature à faire apparaître comme illégale l'appréciation différente à laquelle il s'est livré pour la zone de Menton, où cinq fréquences étaient disponibles ; qu'en catégorie D, dans laquelle n'étaient autorisés que deux services à thématique musicale, RFM et MFM, il n'a pas davantage fait une inexacte application de ces dispositions en retenant le service BFM au motif que son format, inédit dans la zone, était consacré à l'information économique ;

Considérant, par ailleurs, que la seule circonstance que le groupe Orbus, auquel appartient la société QUINTO AVENIO, dispose dans le ressort du comité technique radiophonique de Marseille d'un nombre de fréquences sensiblement inférieur à celui dont disposent certains des groupes auxquels appartiennent les services autorisés n'est pas à elle seule de nature à établir que le Conseil supérieur de l'audiovisuel aurait méconnu l'impératif de diversification des opérateurs ;

En ce qui concerne la zone d'Arles :

Considérant que dans cette zone, où étaient autorisés avant l'appel à candidatures un service en catégorie A, Radio Camargue, et un service en catégorie E, RMC, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a retenu, pour la seule fréquence disponible, un service en catégorie A, Soleil FM, au motif que ce service, qui s'adressait spécifiquement au public de la zone et remplissait une mission de communication sociale et de proximité par un programme d'information et d'émissions thématiques d'une durée de dix heures par jour, répondait mieux à l'impératif prioritaire de sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et au critère de la contribution à la production de programmes réalisés localement que le service Skyrock dont le programme ne comportait que treize minutes d'informations et rubriques locales ; que le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a pas commis d'erreur de fait en estimant que le service Soleil FM répondait mieux au critère de la contribution à la production de programmes réalisés localement que le service Skyrock ; qu'eu égard à la circonstance particulière qu'une seule fréquence était disponible, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, en faisant le choix de retenir une seconde radio associative présentant les caractéristiques décrites ci-dessus plutôt que la radio à thématique musicale Skyrock, n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ;

En ce qui concerne la zone de Cavaillon :

Considérant que dans cette zone où aucune radio n'était autorisée avant l'appel à candidatures et où une seule fréquence était disponible, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a retenu un service en catégorie C, RFM Vaucluse ; que, pour écarter la candidature de Skyrock dans la même catégorie, il a retenu que ce service, qui visait principalement le public de quinze à vingt-cinq ans et qui proposait seulement treize minutes d'informations et rubriques locales, correspondait moins bien aux attentes du public que RFM Vaucluse, qui proposait un programme musical à destination des adultes de 35 à 49 ans avec trois heures trente quotidiennes de programme local en semaine, dont vingt-et-une d'informations et rubriques locales ; qu'il n'a ainsi ni commis une erreur de droit, ni fait une inexacte application des dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ; que la circonstance que l'autorisation accordée au service RFM Vaucluse constituait le renouvellement d'une autorisation accordée antérieurement n'est pas de nature à faire apparaître, par elle-même, comme entaché d'illégalité le choix de ce service ;

En ce qui concerne la zone d'Orange :

Considérant que, dans cette zone où étaient autorisés avant l'appel à candidatures un service en catégorie A et deux services en catégorie D, Rire et Chansons et Fun Radio, et où trois fréquences étaient disponibles, le Conseil a retenu un service en catégorie B, Radio Star, un service en catégorie C, RTL2 Méditerranée et un service en catégorie E, RMC ; qu'il ressort des mentions de la décision attaquée qu'il a écarté la candidature de la société requérante au motif que le service Skyrock visait un même public jeune que le service Fun Radio, déjà autorisé dans la zone ; que le moyen tiré de ce que le rejet de la candidature de Skyrock ne serait pas motivé manque par suite en fait ; que ce motif n'est pas entaché d'erreur d'appréciation au regard des critères énoncés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ; que le Conseil n'a pas davantage méconnu ces dispositions en accordant une autorisation en catégorie B au service Radio Star, qui diffuse un programme destiné à un public de vingt-cinq à quarante-neuf ans et qui propose quotidiennement une heure et cinq minutes d'informations et rubriques spécifiques à la zone, en se fondant sur le motif que la catégorie B n'était pas encore représentée dans la zone ;

Considérant, par ailleurs, que la seule circonstance que le groupe Orbus, auquel appartient la société QUINTO AVENIO, dispose dans le ressort du comité technique radiophonique de Marseille d'un nombre de fréquences sensiblement inférieur à celui dont disposent certains des groupes auxquels appartiennent les services autorisés n'est pas à elle seule de nature à établir que le Conseil aurait méconnu l'impératif de diversification des opérateurs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE QUINTO AVENIO n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions qu'elle attaque ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE QUINTO AVENIO est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE QUINTO AVENIO et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Copie pour information en sera adressée au ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 334869
Date de la décision : 30/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2012, n° 334869
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Sylvie Hubac
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:334869.20120130
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