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05/03/2012 | FRANCE | N°331327

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 05 mars 2012, 331327


Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 31 août 2009 et 26 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS, venant aux droits et obligations de la société PROCTER ET GAMBLE ORLEANS SAS, dont le siège est au 163/165 quai Aulagnier à Asnières-sur-Seine (92600), représentée par son président ; la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS demande au Conseil d'Etat :

1°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fisca

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Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 31 août 2009 et 26 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS, venant aux droits et obligations de la société PROCTER ET GAMBLE ORLEANS SAS, dont le siège est au 163/165 quai Aulagnier à Asnières-sur-Seine (92600), représentée par son président ; la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS demande au Conseil d'Etat :

1°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, la somme de 33 987 euros à titre d'intérêts moratoires afférents à la somme de 249 108 euros qui lui a été remboursée en conséquence du plafonnement de la contribution au service public de l'électricité acquittée en 2006 et, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement de l'article 1153 du code civil, la somme de 13 090 euros à titre d'intérêts moratoires afférents à la même somme ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code civil ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

Vu la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 2004-90 du 28 janvier 2004 ;

Vu l'arrêté du 25 octobre 2006 fixant les modalités de remboursement partiel de la contribution aux charges de service public de l'électricité ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Isidoro, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS ;

Considérant que la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE ORLEANS SAS, aux droits de laquelle est venue la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS, a, en application des dispositions de l'article 67 de la loi du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique et de l'article 12 bis du décret du 28 janvier 2004 relatif à la compensation des charges de service public de l'électricité, instituant un plafonnement de la contribution au service public de l'électricité due par certaines sociétés pour la partie excédant 0,5 % de leur valeur ajoutée, demandé le 17 décembre 2007 à la Commission de régulation de l'énergie le remboursement partiel de la contribution qu'elle avait acquittée au titre de l'année 2006 pour un montant de 249 108 euros ; que, par lettre du 8 février 2008, le président de cette commission a rejeté sa demande au motif qu'elle était tardive ; qu'au cours de l'instance contentieuse introduite par la société devant le Conseil d'Etat, la Commission de régulation de l'énergie a cependant accordé le dégrèvement de la somme de 249 108 euros, qui a été remboursée le 13 mars 2009 à la société requérante ; que, par lettre du 26 juin 2009 adressée à la Commission de régulation de l'énergie, la société a demandé, sur le fondement des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, le paiement de la somme de 33 987 euros au titre des intérêts moratoires afférents à la somme remboursée et, à titre subsidiaire, le versement de la somme de 13 090 euros sur le fondement des dispositions de l'article 1153 du code civil ; que le président de la Commission de régulation de l'énergie ayant rejeté cette demande, la société PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS demande la condamnation de l'Etat au versement, à titre principal, de la somme de 33 987 euros et, à titre subsidiaire, de la somme de 13 090 euros ;

Sur les conclusions principales :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : "Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés" ; qu'à défaut de réclamation régulière de la part du contribuable, l'administration n'est pas tenue de verser des intérêts moratoires sur les dégrèvements qu'elle a prononcés, même lorsque ces dégrèvements sont accordés au cours d'une instance contentieuse ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis du décret du 28 janvier 2004 relatif à la compensation des charges de service public de l'électricité : "Une société industrielle dont la consommation, pour une année civile, est supérieure à 7 millions de kilowattheures peut demander le remboursement partiel de la contribution acquittée au titre de cette même année par l'ensemble de ses établissements, dès lors que cette contribution excède 0,5 % de la valeur ajoutée de la société, au sens du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts. Le droit à remboursement porte sur la différence entre le montant de la contribution acquittée et la valeur que représente 0,5 % de la valeur ajoutée de la société. / La société présente sa demande de remboursement à la Commission de régulation de l'énergie selon des modalités définies par arrêté du ministre chargé de l'énergie. Dans les quatre mois suivant le dépôt de la demande, la Commission de régulation de l'énergie arrête les droits à remboursement et transmet sa décision à la Caisse des dépôts et consignations qui procède au remboursement dans un délai n'excédant pas deux mois (...)" ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 25 octobre 2006 fixant les modalités de remboursement partiel de la contribution aux charges de service public de l'électricité, dans sa rédaction alors applicable : "Pour obtenir le remboursement partiel de sa contribution aux charges de service public de l'électricité mentionné à l'article 12 bis du décret du 28 janvier 2004 (...), la société concernée adresse une demande à la Commission de régulation de l'énergie avant le 30 avril de l'année qui suit celle au cours de laquelle la contribution a été recouvrée (...)" ; que la contribution au service public de l'électricité étant une imposition et n'entrant pas dans le champ des droits à caractère civil ou pénal, le moyen tiré de ce que l'article 1er de l'arrêté du 25 octobre 2006 relatif au délai pour en obtenir le remboursement méconnaîtrait l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ; que les moyens tirés de la méconnaissance par cet article de l'article 14 de la même convention et de l'article 1er de son premier protocole additionnel ne sont pas assortis des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la réclamation tendant au remboursement de la somme de 249 108 euros portant sur la contribution aux charges de service public de l'électricité supportée au titre de l'année 2006 a été présentée par la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE ORLEANS SAS le 17 décembre 2007, soit postérieurement au 30 avril 2007 ; qu'elle était ainsi tardive ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à demander le versement d'intérêts moratoires sur le fondement des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, alors même que la Commission de régulation de l'énergie lui a remboursé la somme de 249 108 euros au titre du plafonnement de la contribution au service public de l'électricité ;

Sur les conclusions subsidiaires :

Considérant qu'aux termes de l'article 1153 du code civil : "Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement. / Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte (...)" ;

Considérant que ces dispositions s'appliquent, sauf disposition législative spéciale, en cas de retard pris par une personne publique dans le paiement d'une somme d'argent ; que, toutefois, le remboursement partiel de la contribution aux charges de service public de l'électricité mentionné à l'article 12 bis du décret du 28 janvier 2004 précité entrant dans le champ des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, un contribuable ne peut utilement se prévaloir, dans cette hypothèse, des dispositions de l'article 1153 du code civil ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à demander le versement d'intérêts moratoires sur le fondement de l'article 1153 du code civil ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat (Commission de régulation de l'énergie), qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette société la somme que la Commission de régulation de l'énergie demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Commission de régulation de l'énergie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE PROCTER ET GAMBLE HOLDING FRANCE SAS et à la Commission de régulation de l'énergie.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 331327
Date de la décision : 05/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mar. 2012, n° 331327
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: Mme Cécile Isidoro
Rapporteur public ?: M. Pierre Collin
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:331327.20120305
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