La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2012 | FRANCE | N°332091

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 12 mars 2012, 332091


Vu l'arrêt n° 07MA01695-07MA01752 du 30 juin 2009, enregistré le 17 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat les conclusions de l'HOPITAL SAINT-JEAN dirigées contre les articles 1er et 2 du jugement n° 0202058 - 0202059 du 20 décembre 2006 du tribunal administratif de Montpellier ;

Vu le pourvoi, enregistré le 11 mai 2007 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et le mémoire complémentaire, enregistré le 28 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Cons

eil d'Etat, présentés pour l'HOPITAL SAINT-JEAN, dont le siège es...

Vu l'arrêt n° 07MA01695-07MA01752 du 30 juin 2009, enregistré le 17 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat les conclusions de l'HOPITAL SAINT-JEAN dirigées contre les articles 1er et 2 du jugement n° 0202058 - 0202059 du 20 décembre 2006 du tribunal administratif de Montpellier ;

Vu le pourvoi, enregistré le 11 mai 2007 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et le mémoire complémentaire, enregistré le 28 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'HOPITAL SAINT-JEAN, dont le siège est 20 avenue du Languedoc à Perpignan (66046), représenté par son directeur en exercice ; l'HOPITAL SAINT-JEAN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0202058 - 0202059 du 20 décembre 2006 par lesquels le tribunal administratif de Montpellier a annulé ses décisions des 21 janvier 2000 et 5 avril 2002 refusant de réintégrer Mme Danielle A à l'issue d'une période de disponibilité et lui a enjoint de procéder à cette réintégration dans le premier poste vacant correspondant au grade de l'intéressée ainsi que de reconstituer sa carrière à compter du 13 octobre 1997 dans le délai de trois mois à compter de la notification de ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions présentées par Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier, auxquelles celui-ci a fait droit par les articles 1er et 2 de son jugement du 20 décembre 2006 ;

3°) de mettre à la charge de Mme A le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

Vu le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Gautier-Melleray, Chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Foussard, avocat de l'HOPITAL SAINT JEAN et de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme Danielle A,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de l'HOPITAL SAINT JEAN et à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme Danielle A ;

Considérant qu'aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son établissement, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office (...). Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés en vue de sa réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. / Un décret en Conseil d'Etat détermine les cas et conditions de mise en disponibilité, sa durée ainsi que les modalités de réintégration des fonctionnaires intéressés à l'expiration de la période de disponibilité. " ; qu'aux termes de l'article 37 du décret du 13 octobre 1988 relatif à certaines positions des fonctionnaires hospitaliers : " Deux mois au moins avant l'expiration de la période de disponibilité en cours, le fonctionnaire doit solliciter soit le renouvellement de sa disponibilité soit sa réintégration. (...) / (...) la réintégration est de droit à la première vacance lorsque la disponibilité n'a pas excédé trois ans. (...) / Le fonctionnaire qui ne peut être réintégré faute de poste vacant est maintenu en disponibilité jusqu'à sa réintégration et au plus tard jusqu'à ce que trois postes lui aient été proposés. " ;

Considérant que, si le fonctionnaire hospitalier en disponibilité depuis plus de trois ans ne bénéficie pas du droit à la réintégration dès la première vacance, prévu par les dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 du décret du 13 octobre 1988, il a toutefois droit à ce que des mesures soient prises dans un délai raisonnable, courant du jour à compter duquel il a demandé sa réintégration, pour que trois postes lui soient proposés comme le prévoient les dispositions du troisième alinéa du même article ; qu'à l'expiration de ce délai, le fonctionnaire a droit à ce que les emplois vacants correspondant à son grade lui soient proposés ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A, adjoint des cadres hospitaliers au centre hospitalier Maréchal-Joffre de Perpignan ultérieurement dénommé l'HOPITAL SAINT-JEAN, a été mise en disponibilité sur sa demande à compter du 7 juin 1983 pour élever ses enfants puis pour suivre son conjoint ; que, par les articles 1er et 2 d'un jugement du 20 décembre 2006 contre lesquels l'HOPITAL SAINT-JEAN se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé deux décisions du centre hospitalier des 21 janvier 2000 et 5 avril 2002 refusant de réintégrer Mme A à l'issue de sa disponibilité et a, d'autre part, enjoint au centre hospitalier de réintégrer l'intéressée dans le premier poste vacant correspondant à son grade et de reconstituer sa carrière à compter du 13 octobre 1997 ;

Considérant que, pour prononcer ces annulations et injonctions, le tribunal administratif s'est fondé sur ce que, alors que Mme A avait demandé le 4 mars 1996 sa réintégration à compter du 7 juin 1996 et avait renouvelé sa demande le 2 avril 1996, le centre hospitalier, qui n'avait pas fait droit à ces demandes, avait ensuite affecté le 13 octobre 1997 un autre agent dans un emploi vacant correspondant au grade d'adjoint des cadres hospitaliers et équivalent à celui qu'occupait Mme A antérieurement à sa disponibilité ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en jugeant ainsi que cette fonctionnaire dont la disponibilité avait excédé trois ans avait droit à être nommée dans un emploi vacant, sans rechercher si le centre hospitalier avait, à la date de la vacance, disposé d'un délai raisonnable pour prendre des mesures afin de permettre la réintégration demandée par l'intéressée, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'HOPITAL SAINT-JEAN est fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 20 décembre 2006 du tribunal administratif de Montpellier ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, dans les limites de la cassation prononcée, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'emploi au bureau d'accueil dans lequel le centre hospitalier a affecté un autre agent le 13 octobre 1997, et qui constituait par suite un emploi vacant, correspondait au grade d'adjoint des cadres hospitaliers détenu par Mme A ; qu'à cette date, eu égard à l'importance de l'établissement et à la nature des fonctions pouvant être exercées par l'intéressée, le délai raisonnable dont disposait le centre hospitalier pour prendre des mesures afin de permettre la réintégration de Mme A et qui courait depuis la date du 7 juin 1996 à compter de laquelle l'intéressée avait demandé sa réintégration, était expiré sans qu'aucune proposition ne lui ait été faite ; que c'est dès lors en méconnaissance du droit de Mme A à être réintégrée dans un délai raisonnable que le centre hospitalier ne lui a pas proposé cet emploi ; que, dès lors que Mme A était ainsi maintenue illégalement hors de la position d'activité à laquelle elle avait droit, il s'ensuit que les décisions des 21 janvier 2000 et 5 avril 2002 par lesquelles le centre hospitalier a refusé à nouveau de la réintégrer sont entachées de la même illégalité ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, Mme A est fondée à demander l'annulation de ces deux décisions ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, postérieurement à l'introduction de la demande, l'HOPITAL SAINT-JEAN a réintégré Mme A et a procédé à la reconstitution de sa carrière à compter du 13 octobre 1997 ; que, par suite, les conclusions de Mme A tendant à ce qu'il soit enjoint à cet établissement de procéder à sa réintégration et à la reconstitution de sa carrière à compter de cette date sont devenues sans objet ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que réclame l'HOPITAL SAINT-JEAN soit mise à la charge de Mme A qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ; qu'il y a lieu, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'HOPITAL SAINT-JEAN le versement d'une somme de 3 000 euros à Mme A au titre des frais exposés par elle devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il n'appartient pas au Conseil d'Etat de statuer sur les conclusions de Mme A tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'HOPITAL SAINT-JEAN au titre des frais exposés par elle devant la cour administrative d'appel de Marseille ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 décembre 2006 sont annulés.

Article 2 : Les décisions du centre hospitalier de Perpignan des 21 janvier 2000 et 5 avril 2002 sont annulées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A.

Article 4 : L'HOPITAL SAINT-JEAN versera une somme de 3 000 euros à Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l'HOPITAL SAINT-JEAN présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à l'HOPITAL SAINT-JEAN et à Mme Danielle A.

Copie en sera adressée à la cour administrative d'appel de Marseille.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - DISPONIBILITÉ - RÉINTÉGRATION - 1) FONCTIONNAIRE HOSPITALIER EN DISPONIBILITÉ DEPUIS PLUS DE TROIS ANS DEMANDANT SA RÉINTÉGRATION - DROIT À CE QUE DES MESURES SOIENT PRISES DANS UN DÉLAI RAISONNABLE POUR QUE TROIS POSTES LUI SOIENT PROPOSÉS (ART - 37 DU DÉCRET DU 13 OCTOBRE 1988) - EXISTENCE - DROIT - À L'EXPIRATION DE CE DÉLAI - À CE QUE LES EMPLOIS VACANTS CORRESPONDANT À SON GRADE LUI SOIENT PROPOSÉS - EXISTENCE [RJ1] - 2) APPLICATION EN L'ESPÈCE - DÉLAI RAISONNABLE EXPIRÉ - EU ÉGARD À L'IMPORTANCE DE L'ÉTABLISSEMENT ET À LA NATURE DES FONCTIONS POUVANT ÊTRE EXERCÉES PAR L'INTÉRESSÉ.

36-05-02-01 1) Si le fonctionnaire hospitalier en disponibilité depuis plus de trois ans ne bénéficie pas du droit à la réintégration dès la première vacance, prévu par les dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 du décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 relatif à certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, il a toutefois droit à ce que des mesures soient prises dans un délai raisonnable, courant du jour à compter duquel il a demandé sa réintégration, pour que trois postes lui soient proposés comme le prévoient les dispositions du troisième alinéa du même article. A l'expiration de ce délai, le fonctionnaire a droit à ce que les emplois vacants correspondant à son grade lui soient proposés. 2) En l'espèce, fonctionnaire hospitalier mis en disponibilité à compter du 7 juin 1983 et ayant demandé sa réintégration le 7 juin 1996. Eu égard à l'importance de l'établissement et à la nature des fonctions pouvant être exercées par l'intéressé, le délai raisonnable dont disposait l'établissement pour prendre des mesures afin de permettre la réintégration était expiré au 13 octobre 1997, date à laquelle il a affecté un autre agent à un emploi vacant qui correspondait au grade de l'intéressé. L'intéressé étant ainsi maintenu illégalement hors de la position d'activité à laquelle il avait droit, les décisions ultérieures par lesquelles l'établissement a refusé à nouveau de le réintégrer sont entachées de la même illégalité.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISPOSITIONS PROPRES AUX PERSONNELS HOSPITALIERS - 1) FONCTIONNAIRE HOSPITALIER EN DISPONIBILITÉ DEPUIS PLUS DE TROIS ANS DEMANDANT SA RÉINTÉGRATION - DROIT À CE QUE DES MESURES SOIENT PRISES DANS UN DÉLAI RAISONNABLE POUR QUE TROIS POSTES LUI SOIENT PROPOSÉS (ART - 37 DU DÉCRET DU 13 OCTOBRE 1988) - EXISTENCE - DROIT - À L'EXPIRATION DE CE DÉLAI - À CE QUE LES EMPLOIS VACANTS CORRESPONDANT À SON GRADE LUI SOIENT PROPOSÉS - EXISTENCE [RJ1] - 2) APPLICATION EN L'ESPÈCE - DÉLAI RAISONNABLE EXPIRÉ - EU ÉGARD À L'IMPORTANCE DE L'ÉTABLISSEMENT ET À LA NATURE DES FONCTIONS POUVANT ÊTRE EXERCÉES PAR L'INTÉRESSÉ.

36-11 1) Si le fonctionnaire hospitalier en disponibilité depuis plus de trois ans ne bénéficie pas du droit à la réintégration dès la première vacance, prévu par les dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 du décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 relatif à certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, il a toutefois droit à ce que des mesures soient prises dans un délai raisonnable, courant du jour à compter duquel il a demandé sa réintégration, pour que trois postes lui soient proposés comme le prévoient les dispositions du troisième alinéa du même article. A l'expiration de ce délai, le fonctionnaire a droit à ce que les emplois vacants correspondant à son grade lui soient proposés. 2) En l'espèce, fonctionnaire hospitalier mis en disponibilité à compter du 7 juin 1983 et ayant demandé sa réintégration le 7 juin 1996. Eu égard à l'importance de l'établissement et à la nature des fonctions pouvant être exercées par l'intéressé, le délai raisonnable dont disposait l'établissement pour prendre des mesures afin de permettre la réintégration était expiré au 13 octobre 1997, date à laquelle il a affecté un autre agent à un emploi vacant qui correspondait au grade de l'intéressé. L'intéressé étant ainsi maintenu illégalement hors de la position d'activité à laquelle il avait droit, les décisions ultérieures par lesquelles l'établissement a refusé à nouveau de le réintégrer sont entachées de la même illégalité.


Références :

[RJ1]

Rappr. CE, 17 novembre 1999, Commune de Port-Saint-Louis du Rhône, n° 188818, T. p. 844, pour un fonctionnaire territorial ;

CE, Assemblée, 11 juillet 1975, Ministre de l'éducation nationale c/ Mme Said, n° 95293, p. 424, pour un agent de l'Etat.


Publications
Proposition de citation: CE, 12 mar. 2012, n° 332091
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Christian Vigouroux
Rapporteur ?: Mme Marie Gautier-Melleray
Rapporteur public ?: M. Jean-Philippe Thiellay
Avocat(s) : SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD ; FOUSSARD

Origine de la décision
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Date de la décision : 12/03/2012
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 332091
Numéro NOR : CETATEXT000025528928 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2012-03-12;332091 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award