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21/03/2012 | FRANCE | N°341347

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 21 mars 2012, 341347


Vu le pourvoi et le nouveau mémoire, enregistrés les 9 juillet et 3 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme Béatrice A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0712372 du 11 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mai 2007 par lequel le maire de Les Clayes-sous-Bois a mis fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services de cette commune et de la décision implicite rejetant son rec

ours gracieux contre cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, ...

Vu le pourvoi et le nouveau mémoire, enregistrés les 9 juillet et 3 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme Béatrice A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0712372 du 11 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mai 2007 par lequel le maire de Les Clayes-sous-Bois a mis fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services de cette commune et de la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Les Clayes-sous-Bois le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 78-53 du 17 juillet 1978 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, Auditeur,

- les observations de Me Foussard, avocat de Mme A et de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune de Les Clayes-sous-Bois,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de Mme A et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune de Les Clayes-sous-Bois ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A, attachée territoriale, a été détachée sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services de la commune de Les Clayes-sous-Bois par un arrêté du 21 mai 2001 ; que, par une lettre du 14 mars 2007, le maire de cette commune a informé Mme A qu'il envisageait de mettre fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services et l'a convoquée à un entretien, qui a eu lieu le 26 mars 2007 ; que le maire a ensuite informé le conseil municipal, lors de sa séance du 3 avril 2007, de sa décision de mettre fin au détachement de Mme A ; qu'il a pris, le 31 mai 2007, un arrêté mettant fin au détachement de l'intéressée à compter du 1er juillet 2007 ; que cet arrêté n'a été notifié à l'intéressé, par une lettre du 6 juillet 2007, que le 30 juillet suivant ; que Mme A a saisi le tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mai 2007 du maire de Clayes-sous-Bois mettant fin à ses fonctions à compter du 1er juillet 2007 ; qu'elle se pourvoit en cassation contre le jugement du 11 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel (...) et que la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l'article 98./ Ces dispositions s'appliquent aux emplois : (...) - de directeur général des services (...) des communes de plus de 2 000 habitants (...)./ Il ne peut être mis fin aux fonctions des agents occupant les emplois mentionnés ci-dessus, sauf s'ils ont été recrutés directement en application de l'article 47, qu'après un délai de six mois suivant soit leur nomination dans l'emploi, soit la désignation de l'autorité territoriale. La fin des fonctions de ces agents est précédée d'un entretien de l'autorité territoriale avec les intéressés et fait l'objet d'une information de l'assemblée délibérante et du Centre national de la fonction publique territoriale ; elle prend effet le premier jour du troisième mois suivant l'information de l'assemblée délibérante. " ;

Sur la légalité de l'arrêté du 31 mai 2007 en tant qu'il met fin aux fonctions de Mme A :

Considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif de Versailles n'a pas commis d'erreur de droit et a suffisamment motivé son jugement en jugeant que, dès lors qu'il ressortait du procès-verbal de la séance du conseil municipal de Les Clayes-sous-Bois du 3 avril 2007 que le maire avait informé l'assemblée délibérante de son intention de mettre fin aux fonctions de Mme A, la formalité prescrite par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 n'avait pas été méconnue, alors même que le maire n'aurait pas porté à la connaissance du conseil l'ensemble des motifs et circonstances de fait fondant sa décision ;

Considérant, en second lieu, qu'il peut être mis fin au détachement des agents occupant les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 précité pour des motifs tirés de l'intérêt du service ; qu'eu égard à l'importance du rôle des titulaires de ces emplois et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, le fait pour le directeur général des services d'une commune de s'être trouvé placé dans une situation ne lui permettant plus de bénéficier de la confiance de l'autorité territoriale peut légalement justifier qu'il soit, pour ce motif, déchargé de ses fonctions ; que, dès lors, en relevant que le maire de Les Clayes-sous-Bois invoquait la perte de confiance résultant d'une " insuffisante communication ayant engendré des dysfonctionnements importants " en ce qui concerne la gestion des affaires communales et les relations avec les élus et que ce motif n'était entaché ni d'erreur de fait, ni d'erreur manifeste d'appréciation, et en déduisant que la décision de mettre fin aux fonctions de l'intéressée était fondée sur un motif légal, le tribunal administratif de Versailles a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'il a pu, sans entacher son jugement d'insuffisance de motivation, se borner à mentionner que le dossier contenait des " attestations circonstanciées " établies par certains élus municipaux, sans indiquer la teneur précise de celles-ci ;

Sur la rétroactivité de l'arrêté du 31 mai 2007 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi sur ce point ;

Considérant qu'une décision administrative ne peut légalement comporter une date d'effet antérieure à celle de sa notification, sous réserve du cas où la loi l'aurait explicitement prévu et de l'hypothèse dans laquelle cette décision aurait un caractère purement recognitif ; que, par suite, en jugeant qu'en fixant au 1er juillet 2007 la date d'effet de son arrêté du 31 mai 2007 mettant fin au détachement de Mme A dans l'emploi de directeur général des services de la commune de Les Clayes-sous-Bois, le maire de cette commune s'était borné à tirer les conséquences de ce que, dès lors que le conseil municipal avait été informé le 3 avril précédent de son intention de mettre fin aux fonctions de l'intéressée, cette fin de fonctions prendrait effet au 1er juillet par application des dispositions de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, et que son arrêté du 31 mai 2007 n'avait ainsi qu'un caractère confirmatif, alors que ces dispositions législatives ont seulement pour objet d'imposer au maire l'obligation d'informer le conseil municipal avant de prendre, dans les conditions qu'elles fixent, sa décision, le tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque qu'en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mai 2007 en tant qu'il prend effet à une date antérieure à celle de sa notification et de la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le maire sur son recours gracieux en tant qu'elle concerne cette même date d'effet ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, une décision administrative ne peut légalement comporter une date d'effet antérieure à celle de sa notification ; que l'arrêté du maire de la commune de Les Clayes-sous-Bois du 31 mai 2007 mettant fin au détachement de Mme A dans l'emploi de directeur général des services de la commune, qui a été notifié à l'intéressée le 30 juillet 2007, doit donc être annulé en tant qu'il comporte une date d'effet antérieure à celle de sa notification ; que doit, de même, être annulée la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le maire sur le recours gracieux de Mme A en tant qu'elle concerne la date d'effet de la fin de son détachement ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Les Clayes-sous-Bois, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas davantage lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A une somme au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 11 mai 2010 du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il se prononce sur la légalité de la date d'effet de l'arrêté du 31 mai 2007 du maire de la commune de Les Clayes-sous-Bois et sur la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le maire de cette commune sur le recours gracieux de Mme A en tant qu'elle concerne cette même date d'effet.

Article 2 : L'arrêté du 31 mai 2007 du maire de Les Clayes-sous-Bois, en tant qu'il prévoit une date d'effet antérieure au 30 juillet 2007, et la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le maire de cette commune sur le recours gracieux de Mme A, en tant qu'elle concerne cette même date d'effet, sont annulés.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de Mme A est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Les Clayes-sous-Bois au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Béatrice A et à la commune de Les Clayes-sous-Bois.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 341347
Date de la décision : 21/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 mar. 2012, n° 341347
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Alain Ménéménis
Rapporteur ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:341347.20120321
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