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28/03/2012 | FRANCE | N°347169

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 28 mars 2012, 347169


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars et 1er juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA SAINT LOUIS SUCRE, venant aux droits de la SNC Saint Louis Sucre dont le siège est 23-25, rue Franklin D. Roosevelt à Paris (75008), représentée par son président-directeur général ; la SA SAINT LOUIS SUCRE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09VE03828 du 30 décembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 050

3883 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 octobre 2009 rejetan...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars et 1er juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA SAINT LOUIS SUCRE, venant aux droits de la SNC Saint Louis Sucre dont le siège est 23-25, rue Franklin D. Roosevelt à Paris (75008), représentée par son président-directeur général ; la SA SAINT LOUIS SUCRE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09VE03828 du 30 décembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0503883 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 octobre 2009 rejetant sa demande tendant à la réduction, à hauteur de 362 700 euros, de la cotisation de taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2003 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des impôts, notamment son article 1647 B sexies ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SA SAINT LOUIS SUCRE,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SA SAINT LOUIS SUCRE ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SNC Saint Louis Sucre, aux droits de laquelle vient la SA SAINT LOUIS SUCRE a, par courrier du 29 décembre 2004, sollicité un dégrèvement complémentaire, à hauteur de la somme de 362 700 euros, de la cotisation de taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2003 au titre du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée institué par l'article 1647 B sexies du code général des impôts ; qu'après le rejet de sa réclamation, elle a porté le litige devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui, par jugement du 6 octobre 2009, a rejeté sa demande ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 30 décembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête dirigée contre ce jugement ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance, par les dispositions du I de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, des droits et libertés garantis par la Constitution :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : "Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...)" ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en 2003 : "I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que la valeur ajoutée en fonction de laquelle la taxe professionnelle est plafonnée est celle qui a été produite au cours de l'année civile d'imposition ; qu'il n'est dérogé à cette règle que lorsque l'entreprise a clos, au cours de cette année, un exercice comptable de douze mois ne coïncidant pas avec l'année civile, auquel cas la valeur ajoutée servant au calcul du plafonnement est la valeur ajoutée produite au cours de cet exercice ;

Considérant que l'ensemble des entreprises étant, ainsi, quelle que soit la date de clôture et la durée de leur exercice, susceptibles de bénéficier de la mesure de plafonnement instituée par le législateur, la SA SAINT LOUIS SUCRE n'est pas fondée à soutenir que les dispositions précitées de l'article 1647 B sexies du code général des impôts méconnaissent les principes d'égalité devant la loi fiscale et d'égalité devant les charges publiques en ce qu'elles institueraient une discrimination injustifiée entre les entreprises en fonction de la durée de leur exercice ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions du I précité de l'article 1647 B sexies du code général des impôts portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;

Sur les autres moyens du pourvoi :

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'en jugeant qu'il résultait des dispositions du I de l'article 1647 B sexies du code général des impôts qu'un contribuable ne pouvait bénéficier du plafonnement de la taxe professionnelle prévu par cet article que si l'exercice comptable coïncidait avec l'année civile de référence, ou, par exception, si au cours de cette année un exercice de douze mois avait été clos, la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit ; que, par suite, la SA SAINT LOUIS SUCRE est fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions présentées par la SOCIETE SAINT LOUIS SUCRE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SA SAINT LOUIS SUCRE, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la SA SAINT LOUIS SUCRE.

Article 2 : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 30 décembre 2010 est annulé.

Article 3 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 4 : L'Etat versera à la SA SAINT LOUIS SUCRE une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SA SAINT LOUIS SUCRE et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - QUESTIONS RELATIVES AU PLAFONNEMENT - VALEUR AJOUTÉE PRISE EN COMPTE AU TITRE DU PLAFONNEMENT (ARTICLE 1647 B SEXIES DU CGI) - 1) VALEUR AJOUTÉE PRODUITE AU COURS DE L'ANNÉE D'IMPOSITION - EXERCICE COMPTABLE DE DOUZE MOIS NE COÏNCIDANT PAS AVEC L'ANNÉE CIVILE - CONSÉQUENCE - PRISE EN COMPTE DE LA VALEUR AJOUTÉE PRODUITE AU COURS DE CET EXERCICE - 2) QPC - MÉCONNAISSANCE DU PRINCIPE D'ÉGALITÉ - ABSENCE - NON-RENVOI.

19-03-04-05 1) Il résulte des dispositions l'article 1647 B sexies du code général des impôts (CGI) que la valeur ajoutée en fonction de laquelle la taxe professionnelle est plafonnée est celle qui a été produite au cours de l'année civile d'imposition. Il n'est dérogé à cette règle que lorsque l'entreprise a clos, au cours de cette année, un exercice comptable de douze mois ne coïncidant pas avec l'année civile, auquel cas la valeur ajoutée servant au calcul du plafonnement est la valeur ajoutée produite au cours de cet exercice. 2) L'ensemble des entreprises étant, ainsi, quelle que soit la date de clôture et la durée de leur exercice, susceptibles de bénéficier de la mesure de plafonnement instituée par le législateur, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 1647 B sexies du CGI méconnaîtraient les principes d'égalité devant la loi fiscale et d'égalité devant les charges publiques en ce qu'elles institueraient une discrimination injustifiée entre les entreprises en fonction de la durée de leur exercice ne présente pas un caractère sérieux.

PROCÉDURE - PLAFONNEMENT DE LA TAXE PROFESSIONNELLE EN FONCTION DE LA VALEUR AJOUTÉE (ARTICLE 1647 B SEXIES DU CGI) - VALEUR AJOUTÉE PRODUITE AU COURS DE L'ANNÉE D'IMPOSITION - EXERCICE COMPTABLE DE DOUZE MOIS NE COÏNCIDANT PAS AVEC L'ANNÉE CIVILE - CONSÉQUENCE - PRISE EN COMPTE DE LA VALEUR AJOUTÉE PRODUITE AU COURS DE CET EXERCICE - MÉCONNAISSANCE DU PRINCIPE D'ÉGALITÉ - ABSENCE.

54-10-05-04-02 Il résulte des dispositions l'article 1647 B sexies du code général des impôts (CGI) que la valeur ajoutée en fonction de laquelle la taxe professionnelle est plafonnée est celle qui a été produite au cours de l'année civile d'imposition. Il n'est dérogé à cette règle que lorsque l'entreprise a clos, au cours de cette année, un exercice comptable de douze mois ne coïncidant pas avec l'année civile, auquel cas la valeur ajoutée servant au calcul du plafonnement est la valeur ajoutée produite au cours de cet exercice. L'ensemble des entreprises étant, ainsi, quelle que soit la date de clôture et la durée de leur exercice, susceptibles de bénéficier de la mesure de plafonnement instituée par le législateur, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 1647 B sexies du CGI méconnaissent les principes d'égalité devant la loi fiscale et d'égalité devant les charges publiques en ce qu'elles institueraient une discrimination injustifiée entre les entreprises en fonction de la durée de leur exercice ne présente pas un caractère sérieux.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 mar. 2012, n° 347169
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: Mme Séverine Larere
Rapporteur public ?: M. Pierre Collin
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 28/03/2012
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 347169
Numéro NOR : CETATEXT000025587319 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2012-03-28;347169 ?
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