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11/04/2012 | FRANCE | N°353480

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 11 avril 2012, 353480


Vu le pourvoi, enregistré le 19 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme Noura C, demeurant ... ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1115761 du 4 octobre 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la suspension de la décision du 16 juin 2011 du ministre de l'éducation nationale prononçant son affectation dans l'académie de Nice et de la décision du 20

juillet 2011 rejetant son recours gracieux tendant à ce qu'elle soit...

Vu le pourvoi, enregistré le 19 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme Noura C, demeurant ... ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1115761 du 4 octobre 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la suspension de la décision du 16 juin 2011 du ministre de l'éducation nationale prononçant son affectation dans l'académie de Nice et de la décision du 20 juillet 2011 rejetant son recours gracieux tendant à ce qu'elle soit affectée dans l'académie de Guyane, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de ces décisions, d'autre part, à la suspension, en tant que de besoin, des affectations de M. A et de M. B dans l'académie de Guyane et, enfin, à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de l'affecter à titre provisoire et sans délai dans l'académie de Guyane et de réexaminer sa demande d'affectation ;

2°) statuant en référé, de faire droit aux conclusions de sa demande présentée devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Anton, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Foussard, avocat de Mme C,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de Mme C ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que Mme C, professeur certifiée de lettres modernes, a été reçue en avril 2011 au concours de recrutement des personnels de direction d'établissement ou de formation relevant du ministère de l'éducation nationale ; que par une décision du 16 juin 2011, elle a été avisée de son affectation dans l'académie de Nice à compter de la rentrée scolaire de septembre 2011 ; que, par une décision du 20 juillet 2011, le ministre de l'éducation nationale a rejeté son recours gracieux tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'elle soit affectée dans l'académie de Guyane ; que l'intéressée a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris de demandes tendant à la suspension de ces décisions et à la suspension des décisions affectant dans cette académie M. A, lauréat du même concours, et M. B, figurant sur la liste d'aptitude ; que, par une ordonnance du 4 octobre 2011, contre laquelle elle se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté ces demandes au motif qu'il n'était pas compétent pour en connaître ;

Sur les conclusions du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative tendant à ce que le Conseil d'Etat constate qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi :

Considérant que, lors de l'audience devant le juge des référés du tribunal administratif, Mme C a pris connaissance des extraits des arrêtés ministériels des 29 juin et 14 septembre 2011 relatifs à son affectation dans l'académie de Nice et aux affectations de MM. A et B dans l'académie de Guyane ; qu'après cette audience, elle a formé deux nouvelles demandes tendant à la suspension, d'une part, de ces arrêtés ministériels collectifs en tant qu'ils prononçaient son affectation dans l'académie de Nice et celles de MM. A et B dans l'académie de Guyane, et, d'autre part, des décisions des 16 juin et 20 juillet 2011 relatives à son affectation dans l'académie de Nice ; que le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté ces demandes, pour défaut d'urgence, par des ordonnances du 2 novembre 2011 ; que la circonstance que, par des décisions du 13 février 2012, le Conseil d'Etat a refusé d'admettre, sur le fondement de l'article L. 822-1 du code de justice administrative, les pourvois en cassation introduits par Mme C contre ces dernières ordonnances n'a pas pour effet de priver d'objet le présent pourvoi qu'elle a formé contre l'ordonnance du 4 octobre 2011 ; que les conclusions du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative tendant à ce que le Conseil d'Etat constate un non-lieu à statuer ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Sur le pourvoi de Mme C :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 312-12 du code de justice administrative : " Tous les litiges d'ordre individuel (...) intéressant les fonctionnaires ou agents de l'Etat (...) relèvent du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le lieu d'affectation du fonctionnaire ou agent que la décision attaquée concerne. / Si cette décision prononce une nomination ou entraîne un changement d'affectation, la compétence est déterminée par le lieu de la nouvelle affectation. / (...) Si cette décision a un caractère collectif (tels notamment les tableaux d'avancement, les listes d'aptitude, les procès-verbaux de jurys d'examens ou de concours, les nominations, promotions ou mutations présentant entre elles un lien de connexité) et si elle concerne des agents affectés ou des emplois situés dans le ressort de plusieurs tribunaux administratifs, l'affaire relève de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel siège l'auteur de la décision attaquée. " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que Mme C demandait la suspension des décisions des 16 juin et 20 juillet 2011 l'avisant de son affectation dans l'académie de Nice et rejetant son recours gracieux tendant à être affectée dans l'académie de Guyane ; que ces actes, qui annoncent le contenu de l'arrêté ministériel collectif du 14 septembre 2011 procédant à cette affectation, n'en sont pas dissociables ; que les arrêtés ministériels des 29 juin et 14 septembre 2011, qui avaient pour objet d'affecter dans les différentes académies les lauréats issus du concours de recrutement des personnels de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministère de l'éducation nationale ainsi que les agents inscrits sur la liste d'aptitude à l'exercice de ces fonctions, et ont été prises après comparaison des situations respectives des intéressés, ont un caractère collectif au sens des dispositions précitées de l'article R. 312-12 du code de justice administrative ; que, dès lors, les conclusions de Mme C tendant à la suspension de l'exécution des décisions des 16 juin et 20 juillet 2011 ainsi que des arrêtés ministériels collectifs en tant qu'ils la concernent et MM. A et B relevaient, dans leur ensemble, de la compétence du juge des référés du tribunal administratif de Paris, dans le ressort duquel se trouve le siège de l'auteur de ces actes ; qu'en déclinant sa compétence, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que, par suite, Mme C est fondée, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ;

Considérant que, pour justifier de l'urgence qui s'attacherait à ce que soit ordonnée la suspension des décisions du ministre de l'éducation nationale des 16 juin et 20 juillet 2011 ainsi que des arrêtés ministériels collectifs des 29 juin et 14 septembre 2011, Mme C fait valoir que son affectation dans l'académie de Nice préjudicie de manière grave et immédiate à sa situation, dès lors qu'elle ne lui permet pas de se rapprocher de son compagnon, installé en Guyane, qui souffre d'une maladie chronique nécessitant la présence de proches à ses côtés ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'académie de Nice correspond au deuxième choix exprimé par l'intéressée en vue de son affectation, ses six choix, à l'exception du premier portant sur la Guyane, désignant d'ailleurs des académies situées en métropole, alors qu'il lui était loisible d'effectuer des choix dans l'aire géographique voisine de la Guyane ; qu'elle n'a porté sa situation personnelle à la connaissance de l'administration que tardivement, après avoir émis ses voeux, par une lettre du 24 mai 2011 dans laquelle elle avait indiqué qu'elle accepterait en tout état de cause l'académie qui lui serait proposée, alors qu'il ressort de son recours gracieux en date du 18 juin 2011 que son compagnon résidait déjà en Guyane depuis un an ; qu'au demeurant, eu égard à la complexité de l'affectation de plusieurs centaines de candidats, l'administration est fondée à invoquer l'intérêt public présenté par la stabilité de ces affectations ; que, dans les circonstances de l'espèce, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C n'est pas fondée à demander la suspension de l'exécution des décisions qu'elle attaque ; que ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris du 4 octobre 2011 est annulée.

Article 2 : Les demandes de suspension de l'exécution des décisions du ministre de l'éducation nationale des 16 juin et 20 juillet 2011 et des arrêtés ministériels collectifs des 29 juin et 14 septembre 2011 présentées par Mme C, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Noura C et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 avr. 2012, n° 353480
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Gilles Bachelier
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Anton
Rapporteur public ?: Mme Nathalie Escaut
Avocat(s) : FOUSSARD

Origine de la décision
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 11/04/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 353480
Numéro NOR : CETATEXT000025678449 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2012-04-11;353480 ?
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