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16/05/2012 | FRANCE | N°340278

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 16 mai 2012, 340278


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 7 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Henri A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0700223 du 8 avril 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa requête tendant, en premier lieu, à l'annulation de la décision du 19 septembre 2006 du recteur de l'académie de la Réunion refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonc

tionnelle ainsi que la décision implicite de rejet du ministre de l'éducat...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 7 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Henri A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0700223 du 8 avril 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa requête tendant, en premier lieu, à l'annulation de la décision du 19 septembre 2006 du recteur de l'académie de la Réunion refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ainsi que la décision implicite de rejet du ministre de l'éducation nationale, en deuxième lieu, à enjoindre au recteur de faire droit à ses écritures et, en dernier lieu, à ce que les décisions à venir interviennent dans les trois mois au titre de l'article R. 921-1 du code de justice administrative ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes mesures appropriées et notamment de prendre en charge tous ses frais de justice dans le cadre de sa plainte pour harcèlement moral ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son bénéfice de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, notamment ses articles 6 quinquies et 11 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Hassan, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Le Prado, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A, conseiller principal d'éducation, a sollicité du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, par courrier du 6 juillet 2006, le bénéfice de la protection fonctionnelle prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires contre les agissements de harcèlement moral dont il affirmait être la victime ; que cette protection lui a été refusée par décision du recteur de l'académie de la Réunion du 19 septembre 2006 ; que M. A se pourvoit en cassation contre le jugement en date du 8 avril 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de la décision du 19 septembre 2006 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public " ; qu'aux termes de l'article 11 de cette loi : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. / (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / (...) La collectivité publique est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé. Elle dispose, en outre, aux mêmes fins, d'une action directe qu'elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale. Les dispositions du présent article sont applicables aux agents publics non titulaires " ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi ;

Considérant qu'en jugeant que la circonstance que M. A se trouvait en congé de longue durée lors de la présentation de sa demande tendant à l'obtention de la protection fonctionnelle prévue par ces dispositions ainsi qu'à la date des agissements dont il affirme avoir été victime excluait qu'il fût fait droit à cette demande, sans rechercher si ces agissements étaient en lien avec l'exercice passé de ses fonctions, le jugement attaqué a commis une erreur de droit ; que ce jugement doit, pour ce motif, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en date du 8 avril 2010 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Henri A et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 16 mai. 2012, n° 340278
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Claude Hassan
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 16/05/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 340278
Numéro NOR : CETATEXT000025893501 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2012-05-16;340278 ?
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