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06/06/2012 | FRANCE | N°327303

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 06 juin 2012, 327303


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 avril et 22 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION, dont le siège est au 6, Le Ruisseau A, Rue du Bois des Nèfles à Saint-Denis (97400) ; la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08BX00033 du 22 janvier 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur appel de la commune de l'Etang Salé, après avoir annulé le jugement n°0402104 du 2

5 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 avril et 22 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION, dont le siège est au 6, Le Ruisseau A, Rue du Bois des Nèfles à Saint-Denis (97400) ; la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08BX00033 du 22 janvier 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur appel de la commune de l'Etang Salé, après avoir annulé le jugement n°0402104 du 25 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a considéré que la commune intéressée avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité envers la société requérante en délivrant, le 14 novembre 1990, un certificat d'urbanisme comportant des mentions erronées et a ordonné une expertise afin de déterminer le préjudice subi par cet organisme, a rejeté sa demande présentée devant ledit tribunal ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la commune de l'Etang Salé ;

3°) de mettre à la charge de la commune de l'Etang Salé le versement de la somme de 4000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nadia Bergouniou-Gournay, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION et à la SCP Monod, Colin, avocat de la commune de l'Etang Salé,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Defrenois, Levis, avocat de la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION et à la SCP Monod, Colin, avocat de la commune de l'Etang Salé,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION s'est portée acquéreur le 3 janvier 1991 d'un terrain classé en zone naturelle NAU du plan d'occupation des sols de la commune de l'Etang Salé, qui avait fait antérieurement l'objet, le 14 novembre 1990, d'un certificat d'urbanisme expressément " négatif " délivré au vu d'une demande concernant, selon ses termes, la construction à usage d'habitation ; qu'un autre certificat d'urbanisme " négatif " a été délivré le 5 novembre 1996 à la société, déclarant les terrains acquis totalement inconstructibles au motif qu'ils faisaient parties des espaces à préserver en application de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ; qu'en 1999, ces terrains ont fait l'objet d'un classement en zone ND, inconstructible, du plan d'occupation des sols ; que par un arrêt du 26 février 2004 la cour administrative d'appel de Bordeaux a toutefois annulé ce classement ; qu'à la suite de cet arrêt la société a obtenu une autorisation de lotir et a cédé les lots qu'elle a fait construire ; que la société a alors recherché la responsabilité fautive de la commune, en excipant du caractère qu'elle estimait erroné du premier certificat d'urbanisme, dont elle soutient qu'il lui avait fait croire à tort que les terrains qu'elle avait acquis étaient constructibles ; que par un jugement avant dire droit du 25 octobre 2007, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a retenu la responsabilité fautive de la commune, ordonné une expertise pour évaluer le préjudice subi par la société et réservé les droits et moyens des parties sur lesquels il n'avait pas été statué dans son jugement jusqu'à la fin de l'instance ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 janvier 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur l'appel de la commune de l'Etang Salé, après avoir annulé le jugement du 25 octobre 2007 précité, a rejeté les conclusions de la société au motif que les préjudices allégués trouvaient exclusivement leur origine dans son comportement imprudent ;

Considérant que, pour juger que les préjudices allégués trouvaient leur origine exclusive dans le comportement imprudent de la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION, la cour administrative d'appel de Bordeaux a relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier, que la société s'était portée acquéreur de terrains situés en zone naturelle du plan d'occupation des sols, faisant l'objet d'un certificat d'urbanisme expressément " négatif " et sur lesquels les possibilités de construire étaient subordonnées à l'obtention préalable d'une autorisation de lotissement, que si la société soutenait que les mentions du certificat attestaient le caractère constructible des terrains, elle n'avait pas mis en oeuvre le droit de construire dont elle prétendait qu'elle bénéficiait dans le délai de validité du certificat et avait attendu six ans avant de solliciter un nouveau certificat d'urbanisme et qu'en laissant s'écouler un tel délai, la société ne pouvait ignorer, en sa qualité de professionnel de l'immobilier, qu'elle s'exposait à une modification des possibilités de construire sur ces terrains ;

Considérant, en premier lieu, que c'est sans entacher son arrêt d'une erreur de droit que la cour a tenu compte, pour caractériser l'imprudence de la société, de sa qualité de professionnel de l'immobilier et de son comportement passif durant plusieurs années à la suite de la délivrance du premier certificat d'urbanisme; qu'en déduisant des éléments rappelés ci-dessus que le préjudice allégué trouvait son origine exclusive dans le comportement de la société et en écartant par suite, implicitement mais nécessairement, toute responsabilité de la commune, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique ;

Considérant, en deuxième lieu, que dès lors qu'elle a jugé que la société avait fait preuve d'imprudence en décidant d'acquérir un terrain dans les conditions incertaines ci-dessus rappelées et au vu d'un certificat d'urbanisme " négatif ", la cour n'était pas tenue de répondre à l'argument inopérant tiré de ce que la commune aurait commis une faute en ne mentionnant pas dans ce certificat que les terrains dont s'agit étaient en outre inconstructibles au regard des dispositions de l'article L.146-6 du code de l'urbanisme; que son arrêt n'est dès lors entaché sur ce point d'aucune insuffisance de motivation ;

Considérant, en dernier lieu, qu'en estimant que le certificat d'urbanisme était " négatif ", alors pourtant qu'il indiquait que le lot B était situé en zone naturelle du plan d'occupation des sols, où certaines constructions pouvaient être autorisées, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui étaient soumises ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de l'Etang Salé, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION le versement à la commune de l'Etang Salé de la somme de 4 000 euros, au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION est rejeté.

Article 2 : La SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION versera une somme de 4 000 euros à la commune de l'Etang Salé au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE D'HABITATION A LOYER MODERE DE LA REUNION et à la commune de l'Etang Salé.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 327303
Date de la décision : 06/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 jui. 2012, n° 327303
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nadia Bergouniou-Gournay
Avocat(s) : SCP DEFRENOIS, LEVIS ; SCP MONOD, COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:327303.20120606
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