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20/06/2012 | FRANCE | N°343203

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 20 juin 2012, 343203


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre et 10 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE, dont le siège est 2, rue de la Bride à Tulle (19000) ; la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10NT00259-10NT00260-10NT00277-10NT00278 du 28 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, faisant droit à la requête du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et du ministre de l'alimentation, de

l'agriculture et de la pêche, a annulé le jugement du 26 novembre 20...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre et 10 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE, dont le siège est 2, rue de la Bride à Tulle (19000) ; la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10NT00259-10NT00260-10NT00277-10NT00278 du 28 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, faisant droit à la requête du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, a annulé le jugement du 26 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du préfet de la Corrèze du 28 juin 2007 en tant qu'il a habilité le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " à siéger dans les commissions et organismes mentionnés au I de l'article 2 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999, notamment son article 2 ;

Vu le décret n° 90-187 du 28 février 1990, notamment son article 1er ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Pourreau, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze ",

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, à l'issue des élections à la chambre d'agriculture de la Corrèze, pour le collège des chefs d'exploitation et assimilés, dont le scrutin a été clôturé le 31 janvier 2007, la " liste pour l'union professionnelle ", qui était présentée par la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) de la Corrèze et par le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et qui était soutenue par la confédération départementale de la mutualité, de la coopération et du crédit agricole, a obtenu 61,73 % des suffrages exprimés, la liste présentée par la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE et le Mouvement de défense des exploitants familiaux de la Corrèze obtenant 38,27 % des suffrages exprimés ; que, par un arrêté du 8 juin 2007 pris sur le fondement du I de l'article 2 de la loi du 9 juillet 1999 d'orientation agricole et de l'article 1er du décret du 28 février 1990 relatif à la représentation des organisations syndicales d'exploitants agricoles au sein de certains organismes ou commissions, le préfet de la Corrèze a habilité le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze ", la FDSEA de la Corrèze, la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE et le Mouvement de défense des exploitants familiaux de la Corrèze à siéger dans les commissions et organismes départementaux énumérés au I de l'article 2 de la loi du 9 juillet 1999 d'orientation agricole ; que la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, faisant droit à la requête du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze ", a annulé le jugement du 26 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du préfet de la Corrèze du 8 juin 2007 en tant qu'il a habilité le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " à siéger dans ces commissions et organismes ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 9 juillet 1999 : " I. L'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles qui remplissent les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ont vocation à être représentées au sein des commissions ainsi que dans les comités professionnels ou organismes de toute nature investis d'une mission de service public, ou assurant la gestion de fonds publics ou assimilés, où siègent des représentants des exploitants agricoles (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 28 février 1990, dans sa version issue du décret n° 2000-139 du 16 février 2000 : " Dans les départements, sont habilitées à siéger dans les commissions, comités professionnels ou organismes mentionnés au I de l'article 2 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole, selon les modalités fixées par les dispositions régissant ces structures, les organisations syndicales à vocation générale d'exploitants agricoles qui satisfont aux conditions suivantes : / 1° Justifier d'un fonctionnement indépendant, régulier et effectif depuis cinq ans au moins ; / 2° Avoir obtenu dans le département plus de 15% des suffrages exprimés lors des élections à la chambre d'agriculture (collège des chefs d'exploitation et assimilés) ; lorsque deux organisations syndicales ont constitué une liste d'union ayant obtenu plus de 30% des suffrages, elles sont réputées satisfaire l'une et l'autre à cette condition. (...) / La liste des organisations répondant à ces conditions est établie et tenue à jour par le préfet. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 511-33 du code rural et de la pêche maritime : " (...) Chaque liste [pour les élections à la chambre d'agriculture] fait l'objet d'une déclaration effectuée par un mandataire muni d'une procuration écrite signée de chaque candidat figurant sur la liste. Elle doit mentionner le département, le collège, la date de clôture du scrutin et pour chaque candidat la commune où il est inscrit sur la liste électorale. / Elle peut mentionner également les organisations syndicales ou professionnelles au nom desquelles les candidats se présentent. Elle ne doit comporter aucune autre mention. " ;

Considérant, en premier lieu, que les dispositions du 1° de l'article 1er du décret du 28 février 1990 relatives à la condition d'indépendance des organisations syndicales, ont pour objet de garantir et imposent par suite de vérifier que les conditions d'organisation, de financement et de fonctionnement de l'organisation syndicale lui permettent d'assurer effectivement la défense des intérêts professionnels des exploitants agricoles qu'elle entend représenter, notamment dans le cadre des négociations avec les pouvoirs publics ;

Considérant que, s'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en vertu des statuts du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et de la FDSEA de la Corrèze, le premier est affilié à la seconde, tout membre du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " devant être également membre de la FDSEA de la Corrèze et les recettes du premier se composant pour partie du reversement d'une quote-part des cotisations d'exploitants collectées par la seconde, la cour administrative d'appel de Nantes n'a entaché son arrêt ni d'erreur de qualification juridique, ni d'insuffisance de motivation en jugeant qu'en dépit de ces circonstances, le syndicat " Jeune Agriculteurs de la Corrèze " était une organisation syndicale indépendante au sens des dispositions du 1° de l'article 1er du décret du 28 février 1990, après avoir relevé qu'il était régulièrement constitué, qu'il disposait d'organes représentatifs propres, qu'il comptait un nombre significatif d'adhérents à jour de leurs cotisations, assurant son indépendance financière, et qu'il justifiait d'actions effectives depuis plus de cinq ans en faveur des intérêts qu'il s'était donné pour mission de défendre ;

Considérant, en second lieu, que la condition d'audience fixée par le 2° de l'article 1er du décret du 28 février 1990 exige que la liste qui a été soutenue par une organisation syndicale d'exploitants agricoles ait obtenu plus de 15 % des suffrages exprimés ou, dans le cas d'une liste d'union soutenue par deux organisations syndicales d'exploitants agricoles, qu'elle ait obtenu plus de 30 % des suffrages exprimés lors des élections à la chambre d'agriculture pour le collège des chefs d'exploitation et assimilés ; que la circonstance qu'une liste soutenue par une ou par deux organisations syndicales d'exploitants agricoles ait en outre bénéficié de l'appui d'autres organisations est sans incidence sur l'application de ces dispositions ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la " liste pour l'union professionnelle ", qui a obtenu 61,73 % des suffrages exprimés aux élections à la chambre d'agriculture de la Corrèze, pour le collège des chefs d'exploitation et assimilés, dont le scrutin a été clôturé le 31 janvier 2007, était soutenue par deux organisations syndicales d'exploitants agricoles, le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et la FDSEA de la Corrèze, ainsi que par la confédération départementale de la mutualité, de la coopération et du crédit agricole de la Corrèze ; qu'en jugeant que le tribunal administratif de Nantes avait à tort annulé l'arrêté du préfet de la Corrèze du 28 juin 2007 au motif que la " liste pour l'union professionnelle " regroupait trois et non deux organisations professionnelles et qu'il en résultait que le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et la FDSEA de la Corrèze ne remplissaient pas la condition fixée au 2° de l'article 1er du décret du 28 février 1990, la cour administrative d'appel de Nantes n'a commis aucune erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de ce syndicat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE est rejeté.

Article 2 : Les conclusions du syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CONFEDERATION PAYSANNE DE LA CORREZE, au syndicat " Jeunes agriculteurs de la Corrèze " et au ministre de l'agriculture et de l'agroalimentaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-01 AGRICULTURE, CHASSE ET PÊCHE. INSTITUTIONS AGRICOLES. - SYNDICATS AGRICOLES - DÉCRET DU 28 FÉVRIER 1990 - 1) CONDITION D'INDÉPENDANCE (1° DE L'ART. 1ER) - CRITÈRES [RJ1] - 2) CONDITION D'AUDIENCE (2° DE L'ART. 1ER) - SOUTIEN D'ORGANISATIONS SYNDICALES NON AGRICOLES - INCIDENCE - ABSENCE.

03-01 1) Les dispositions du 1° de l'article 1er du décret n° 90-187 du 28 février 1990 relatives à la condition d'indépendance des organisations syndicales, ont pour objet de garantir et imposent par suite de vérifier que les conditions d'organisation, de financement et de fonctionnement de l'organisation syndicale lui permettent d'assurer effectivement la défense des intérêts professionnels des exploitants agricoles qu'elle entend représenter, notamment dans le cadre des négociations avec les pouvoirs publics.,,2) La condition d'audience fixée par le 2° de l'article 1er du même décret exige que la liste qui a été soutenue par une organisation syndicale d'exploitants agricoles ait obtenu plus de 15 % des suffrages exprimés ou, dans le cas d'une liste d'union soutenue par deux organisations syndicales d'exploitants agricoles, qu'elle ait obtenu plus de 30 % des suffrages exprimés lors des élections à la chambre d'agriculture pour le collège des chefs d'exploitation et assimilés. Pour l'appréciation du respect de cette condition, la circonstance qu'une liste soutenue par une ou par deux organisations syndicales d'exploitants agricoles ait en outre bénéficié de l'appui d'autres organisations est sans incidence.


Références :

[RJ1]

Rappr. CE, 2 mars 2011, Syndicat national des entreprises du secteur privé marchand de la filière équestre des loisirs et du tourisme (SNEFELT), n° 313189, p. 77.


Publications
Proposition de citation: CE, 20 jui. 2012, n° 343203
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Christophe Pourreau
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU, BAUER-VIOLAS ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Date de la décision : 20/06/2012
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 343203
Numéro NOR : CETATEXT000026048741 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2012-06-20;343203 ?
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