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29/06/2012 | FRANCE | N°344704

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 29 juin 2012, 344704


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 décembre 2010 et 17 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Jacques A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA3903 du 22 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'ils ont interjeté du jugement n° 0312440 du 20 mai 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribut

ions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 1993 ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 décembre 2010 et 17 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Jacques A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA3903 du 22 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'ils ont interjeté du jugement n° 0312440 du 20 mai 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 1993 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune modifiée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Odinet, Auditeur,

- les observations de la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. et Mme A,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. et Mme A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 1993, l'administration fiscale a notifié à M. et Mme A l'imposition de plus-values non déclarées qu'ils avaient réalisées à l'occasion de la cession, le 15 février 1993, de titres de participation détenues par M. Jacques A et ses filles mineures ; que M. et Mme A se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 22 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'ils ont interjeté du jugement du 20 mai 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélèvement social de 1 % et de contribution sociale généralisée ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1993, à raison de ces redressements ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant que si la réponse du 20 janvier 1998 aux observations du contribuable ne mentionnait pas les modalités d'obtention du protocole de levée d'option du 4 décembre 1992 par lequel M. A, agissant tant en son nom personnel qu'au nom et comme mandataire de ses deux filles mineures, s'était engagé à céder à la société Garon la propriété de la totalité des actions détenues par eux dans le capital des sociétés Callet industries et Callet frères, qui avait été utilisé pour fonder les impositions en litige, M. A ne pouvait, eu égard à sa qualité de signataire de cet acte, être regardé comme ayant été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement en cause, de la possibilité de demander et d'obtenir, avant la mise en recouvrement, la communication des documents consultés par l'administration, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant, après avoir souverainement apprécié, sans les dénaturer, les pièces du dossier, que le défaut de communication par l'administration fiscale du contrat d'approvisionnement de matériaux mentionné dans la notification de redressements adressée aux contribuables n'avait pas entaché la régularité de la procédure dès lors que ce document n'avait pas été utilisé pour fonder les impositions litigieuses, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en troisième lieu, que la cour a relevé que la notification de redressements adressée aux contribuables mentionnait que les participations détenues par M. A et ses deux filles dans la société Callet Industries, ajoutées à celles que détenait son père au cours des cinq années précédant la cession, excédaient le seuil de 25 % à partir duquel les plus-values étaient alors imposées selon le régime prévu par l'article 160 du code général des impôts, mais ne précisait pas le pourcentage de titres détenues par le père du contribuable ni les modalités d'obtention de cette information ; qu'en jugeant que M. et Mme A n'avaient cependant pas été privés de la possibilité de discuter utilement le redressement litigieux, dès lors qu'eu égard à la précision du renseignement en cause, ils pouvaient demander et obtenir, avant la mise en recouvrement, la communication des documents consultés par l'administration, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Sur le bien-fondé des redressements :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 9 septembre 1966 entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression "résident d'un Etat contractant" désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. / 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles suivantes : / a) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites ; / b) Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; / c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme résident de l' Etat contractant dont elle possède la nationalité (...) / 4. Lorsqu'une personne physique a transféré définitivement son domicile d'un Etat contractant dans l'autre, elle cesse d'être assujettie dans le premier Etat aux impôts pour lesquels le domicile fait règle dès l'expiration du jour où s'est accompli le transfert du domicile. L'assujettissement aux impôts pour lesquels le domicile fait règle commence dans l'autre Etat à compter de la même date. (...) " ; que la notion de foyer d'habitation permanent mentionné à cet article doit être définie en fonction d'éléments d'appréciation relatifs à la personne du contribuable ; que, si des éléments patrimoniaux peuvent éventuellement être pris en compte, ils ne peuvent l'être qu'à titre accessoire ;

Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêt attaqué qu'après avoir jugé que M. et Mme A avaient leur domicile fiscal en France, au sens des dispositions de l'article 4 B du code général des impôts alors que les autorités helvétiques leur avaient reconnu, en Suisse, la qualité de résident fiscal, la cour a examiné la situation des contribuables afin de déterminer, en application des stipulations du a du paragraphe 2 de l'article 4 de la convention franco-suisse, l'Etat dans lequel était situé leur foyer d'habitation permanent ; qu'en jugeant que les intéressés avaient des liens plus étroits avec la France dès lors qu'ils y disposaient de plusieurs résidences, dont leur résidence principale, qu'ils y déployaient l'essentiel de leurs activité professionnelle, et qu'ils y utilisaient plusieurs véhicules, pour en déduire que leur foyer d'habitation permanent était situé en France, la cour, qui n'a retenu que des éléments d'appréciation relatifs à la personne des contribuables, n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'après avoir relevé que les deux enfants mineurs de M. et Mme A étaient scolarisés en Suisse depuis le mois de septembre 1991, que M. A avait obtenu des autorités helvétiques le 14 février 1992 un permis de séjour temporaire en Suisse puis, en 1997, un permis d'établissement C attribué aux personnes résidant en permanence depuis plus de 5 ans en Suisse mentionnant une date d'entrée le 1er mars 1992, ainsi qu'un permis de conduire suisse à compter du 10 mars 1993, la cour a exactement qualifié, sans les dénaturer, les faits qui lui étaient soumis en ne regardant pas ces circonstances comme de nature à établir que le foyer d'habitation permanent des contribuables était en Suisse, dès lors qu'elle avait également relevé, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'ils disposaient en France de plusieurs résidences, dont leur résidence principale à Paris, déclarée comme telle dans la déclaration au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune qu'ils avaient souscrite le 15 juin 1993, qu'ils y déployaient l'essentiel de leurs activités professionnelles, et qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis qu'ils n'établissaient pas leur présence effective en Suisse aux côtés de leurs enfants ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir relevé qu'aux termes de l'article 2 du protocole de levée d'option du 4 décembre 1992, le transfert de propriété des titres de participation en cause à la société Garon devait intervenir " irrévocablement et intégralement le 15 février 1993, par la seule signature par les vendeurs des ordres de mouvement portant sur les actions, et la remise, par l'acheteur, de l'ensemble des billets à ordre aux échéances convenues ", la cour n'a pas commis d'erreur de droit au regard des règles de dévolution de la charge de la preuve en jugeant qu'à défaut pour les requérants d'établir que les conditions prévues par les stipulations contractuelles n'avaient pas été remplies, la cession de ces titres devait être regardée comme étant intervenue à la date convenue du 15 février 1993 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en écartant le moyen tiré de ce que la plus-value de cession des actions de la société Callet Industrie ne pouvait pas être imposée sur le fondement des dispositions de l'article 160 du code général des impôts, au motif que les contribuables ne contestaient pas les indications détaillées de la notification de redressements selon lesquelles M. A et ses filles avaient, dans les cinq années précédant cette cession, détenus conjointement avec le père de ce dernier une participation supérieure à 25 % dans le capital de cette société, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en dernier lieu, que la cour a relevé que par lettre du 15 février 1993, M. A avait choisi de se présenter comme résident suisse à compter de cette date ; que toutefois, par une appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis exempte de dénaturation, elle a rappelé que ce transfert de domiciliation fiscale ne correspondait pas à la réalité et estimé que l'intéressé ne pouvait ignorer que cette date était celle du fait générateur de l'imposition de la plus value en litige ; qu'en déduisant de ces constatations que l'administration devait être regardée comme apportant la preuve de l'absence de bonne foi des contribuables justifiant l'application de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts, elle a exactement qualifié les faits de la cause ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme A est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 344704
Date de la décision : 29/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2012, n° 344704
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Alain Ménéménis
Rapporteur ?: M. Guillaume Odinet
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:344704.20120629
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