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04/07/2012 | FRANCE | N°338829

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 04 juillet 2012, 338829


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS, dont le siège est au tribunal administratif de Paris, 7 rue de Jouy à Paris (75004), représentée par son président ; le syndicat requérant demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 21 du décret n° 2010-164 du 22 février 2010 relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en applicati

on des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ...

Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS, dont le siège est au tribunal administratif de Paris, 7 rue de Jouy à Paris (75004), représentée par son président ; le syndicat requérant demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 21 du décret n° 2010-164 du 22 février 2010 relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision du 16 juillet 2010 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS ;

Vu la décision n° 2010-54 QPC du Conseil constitutionnel du 14 octobre 2010 statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, Auditeur,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 222-34 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue de l'article 21 du décret attaqué du 22 février 2010, et désormais reprises à l'article R. 776-9 du même code, les présidents des cours administratives d'appel ou les magistrats qu'ils désignent à cette fin peuvent statuer par ordonnance sur les appels des litiges relatifs aux décisions portant obligation de quitter le territoire français et concernant les étrangers qui n'ont pas fait l'objet d'un placement en rétention administrative, dans les cas limitativement énumérés à l'article R. 222-1 du code de justice administrative ainsi que dans le cas où la requête d'appel n'est manifestement pas susceptible d'entraîner l'infirmation de la décision attaquée ;

Considérant, en premier lieu, que, par la décision n° 2010-54 QPC du 14 octobre 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions de l'article L. 222-1 du code de justice administrative conformes à la Constitution ; que le moyen tiré par le syndicat requérant de ce que ces dispositions, base légale du décret attaqué, portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit donc être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que le fait de statuer par ordonnance, s'il permet à un juge administratif de trancher seul un litige, ne dispense pas par lui-même la juridiction de mener une instruction contradictoire en application de l'article L. 5 du code de justice administrative ; que si l'article R. 611-8 permet de dispenser certaines affaires d'instruction lorsque la solution est d'ores et déjà certaine, les dispositions attaquées n'ont, par suite, pas en elles-mêmes pour effet de dispenser les litiges en cause d'une instruction contradictoire ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'elles porteraient pour ce motif atteinte au principe constitutionnel des droits de la défense ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que, si ces dispositions, prises notamment aux fins d'éviter, s'agissant d'un contentieux où les appels sont nombreux, l'encombrement des cours administratives d'appels et de garantir le respect du droit à un jugement dans un délai raisonnable, permettent de statuer sur les litiges en cause sans que soient organisés des débats publics, elles restreignent cette faculté aux hypothèses prévues à l'article R. 222-1 du code de justice administrative et au cas où la requête d'appel n'est manifestement pas susceptible d'entraîner l'infirmation de la décision attaquée ; qu'en effet, d'une part, dans les cas où des débats publics ont été organisés en première instance, la possibilité de statuer en appel sans audience publique est réservée aux hypothèses ne présentant pas de difficultés particulières, d'autre part, les cas où il est possible de ne tenir d'audience publique ni en première instance, ni en appel, sont ceux limitativement énumérés à l'article R. 222-1 du code de justice administrative, qui correspondent aux cas exceptionnels pour lesquels la tenue d'une audience publique en première instance n'apporterait aucun élément utile à la solution de l'affaire, au nombre desquels ne figurent pas les demandes qui ne sont manifestement pas susceptibles d'entraîner l'annulation de la décision attaquée ; que, par suite, eu égard aux fins poursuivies par les auteurs du décret et aux critères posés par les dispositions attaquées, le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que le décret attaqué est incompatible avec les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui garantissent le droit à un procès équitable ;

Considérant, en quatrième lieu, que les cas dans lesquels, en vertu des dispositions attaquées, il peut être statué par ordonnance, reposent sur des critères objectifs en rapport direct et proportionné avec la finalité d'une bonne administration de la justice ; que, par suite, les auteurs des dispositions attaquées n'ont pas méconnu le principe d'égalité ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de tout ce qui précède que les auteurs du décret attaqué n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en édictant la possibilité de rejeter par ordonnance les requêtes d'appel dans les hypothèses rappelées ci-dessus ; que la circonstance alléguée que ces dispositions ne seraient pas appliquées légalement est sans incidence sur la légalité du décret attaqué, dont le syndicat requérant n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS, au Premier ministre et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 338829
Date de la décision : 04/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 jui. 2012, n° 338829
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Edmond Honorat
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:338829.20120704
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