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09/07/2012 | FRANCE | N°358550

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 09 juillet 2012, 358550


Vu le mémoire, enregistré le 22 mai 2012, présenté pour la société SMP Technologie, dont le siège est 30 rue Pergolèse à Paris (75116), en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; la société demande au Conseil d'Etat, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus du Premier ministre d'abroger les décrets n° 2011-618 du 31 mai 2011 et n° 2011-1253 du 7 octobre 2011, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 2331-1

du code de la défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la ...

Vu le mémoire, enregistré le 22 mai 2012, présenté pour la société SMP Technologie, dont le siège est 30 rue Pergolèse à Paris (75116), en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; la société demande au Conseil d'Etat, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus du Premier ministre d'abroger les décrets n° 2011-618 du 31 mai 2011 et n° 2011-1253 du 7 octobre 2011, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 2331-1 du code de la défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code de la défense, notamment son article L. 2331-1 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Leïla Derouich, Auditeur,

- les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler avocat de la société SMP Technologie ;

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Fabiani, Luc-Thaler avocat de la société SMP Technologie ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2331-1 du code de la défense, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle le Premier ministre a refusé d'abroger les décrets des 31 mai et 7 octobre 2011 : " Les matériels de guerre, armes et munitions et éléments désignés par les dispositions du présent titre et relatives au régime des matériels de guerre, armes et munitions sont classés dans les catégories ci- après : / I.- Matériels de guerre : / 1re catégorie : armes à feu et leurs munitions conçues pour ou destinées à la guerre terrestre, navale ou aérienne. / 2e catégorie : matériels destinés à porter ou à utiliser au combat les armes à feu. / 3e catégorie : matériels de protection contre les gaz de combat. / II.- Armes et munitions non considérées comme matériels de guerre : / 4e catégorie : armes à feu dites de défense et leurs munitions. / 5e catégorie : armes de chasse et leurs munitions. / 6e catégorie : armes blanches. / 7e catégorie : Armes de tir, de foire ou de salon et leurs munitions. / 8e catégorie : Armes et munitions historiques et de collection. / III.- Les matériels, appartenant ou non aux précédentes catégories, qui sont soumis à des restrictions ou à une procédure spéciale pour l' importation ou l'exportation sont définis aux articles L. 2335- 1 et L. 2335- 3. / Les armes de toute espèce qui peuvent tirer des munitions utilisables dans des armes classées matériel de guerre, et les munitions de toute espèce qui peuvent être tirées dans des armes classées matériel de guerre sont considérées comme des matériels de guerre. / Un décret énumère les matériels ou éléments de chaque catégorie et les opérations industrielles y afférentes rentrant dans le champ d'application du présent titre " ;

3. Considérant que, pour contester la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 2331-1 du code de la défense, la société SMP Technologie soutient qu'en renvoyant à un décret l'énumération des armes et matériels entrant dans chacune des catégories qu'il a prévues, sans donner de ces catégories une définition claire, le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'il en résulte, selon elle, une méconnaissance, d'une part, du principe d'égalité et, d'autre part, des dispositions des articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dès lors que l'atteinte portée, par le régime d'acquisition et de détention des matériels de guerre, des armes et des munitions, à l'exercice du droit de propriété et à la liberté d'entreprendre n'est pas entourée par la loi des garanties nécessaires ;

4. Considérant, toutefois, qu'en définissant, en fonction de leur finalité et de leurs caractéristiques techniques, huit catégories de matériels de guerre, armes et munitions, le législateur a fixé des critères précis et objectifs encadrant le renvoi au pouvoir réglementaire pour la répartition de l'ensemble des matériels de guerre, armes et munitions existants entre ces catégories, auxquelles s'attachent des régimes juridiques différents ; qu'il ne peut donc pas être soutenu que le législateur serait resté en deçà de sa compétence définie à l'article 34 de la Constitution ; que si, du fait notamment d'innovations technologiques, des difficultés ont pu apparaître dans la mise en oeuvre de ces dispositions, il appartient au pouvoir réglementaire, sous le contrôle du juge administratif, d'interpréter les critères posés par la loi à la lumière de son objet ; que, dans ces conditions, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article L. 2331-1 du code de la défense porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société SMP Technologie.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société SMP Technologie, au ministre de la défense et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 358550
Date de la décision : 09/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2012, n° 358550
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Leïla Derouich
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:358550.20120709
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