La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/2012 | FRANCE | N°336492

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 10 juillet 2012, 336492


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février et 7 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme C... A...néeB..., demeurant... ; Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07VE03243 du 5 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0611260 du 6 novembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Versailles a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 164 620

euros résultant de l'avis à tiers détenteur notifié le 30 août 2006 par...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février et 7 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme C... A...néeB..., demeurant... ; Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07VE03243 du 5 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0611260 du 6 novembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Versailles a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 164 620 euros résultant de l'avis à tiers détenteur notifié le 30 août 2006 par le comptable de Maisons-Laffitte et à ce que soit ordonné le sursis de toutes mesures d'exécution ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matthieu Schlesinger, Auditeur,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme A...,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme A... ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'afin de poursuivre le paiement de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2001 à 2004 et de contributions sociales au titre de l'année 2003, ainsi que d'amendes fiscales prononcées sur le fondement de l'article 1768 bis du code général des impôts au titre des années 2002 et 2003, mises en recouvrement les 31 mai, 15 juin et 30 juin 2006, le comptable du Trésor a adressé le 30 août 2006 à l'employeur de Mme A... un avis à tiers détenteur pour obtenir la saisie de ses rémunérations à hauteur de la somme de 164 620 euros, correspondant au montant des cotisations et amendes précitées, assorties d'une majoration de 10 % pour retard de paiement ; que Mme A..., après avoir présenté une réclamation contre cet acte, rejetée par l'administration le 16 octobre 2006, a saisi le tribunal administratif de Versailles d'une demande de décharge de l'obligation de payer les sommes dont le paiement était ainsi poursuivi ; que par un jugement du 6 novembre 2007, ce tribunal a prononcé la décharge de l'obligation de payer les seules amendes et a rejeté le surplus de sa demande ; que Mme A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel tendant à la décharge de l'obligation de payer les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et à la réformation dans cette mesure du jugement du tribunal administratif ;

2. Considérant, en premier lieu, que le moyen soulevé par Mme A... devant la cour et tiré de ce qu'elle n'était pas tenue au paiement des amendes prévues à l'article 1768 bis du code général des impôts, faute de dispositions prévoyant la solidarité entre époux, était inopérant à l'appui de sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, restant seule en litige en appel ; que, dès lors, la cour n'a pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation en ne répondant pas à ce moyen ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : / 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les moyens relatifs à la régularité ou au bien-fondé des impositions dont le recouvrement est poursuivi par l'administration ne sont pas recevables à l'appui de la contestation de recouvrement formée dans les conditions prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales à laquelle la requérante a expressément borné les conclusions de sa demande devant le tribunal administratif ; qu'il résulte des écritures de la requérante devant la cour, telles que cette dernière les a souverainement interprétées sans les dénaturer, que Mme A... entendait reprendre à son compte les moyens soulevés par son époux à l'appui de la contestation d'assiette que celui-ci avait formée et non demander le bénéfice de la décharge d'impositions susceptible d'être prononcée, laquelle aurait d'ailleurs entraîné le non-lieu à statuer sur sa propre contestation ; que, dès lors, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit en écartant comme irrecevables les moyens soulevés par Mme A... et dirigés contre la régularité et le bien-fondé des impositions dont le recouvrement était poursuivi ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 2 de l'article 1685 du code général des impôts, alors en vigueur : " Chacun des époux est tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu. (...) " ; que la solidarité instituée par ces dispositions n'est pas subordonnée à la condition que les époux vivent sous le même toit ; qu'il suit de là que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que Mme A... était tenue au paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge du foyer fiscal alors même qu'elle ne vivait plus sous le même toit que son mari au cours des années en litige ;

6. Considérant, en revanche, qu'aux termes du III de l'article 1600-0 C du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions recouvrées : " La contribution portant sur les revenus mentionnés aux I et II est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu. (...) " ; qu'en renvoyant de façon générale aux règles de recouvrement applicables à l'impôt sur le revenu, le législateur n'a pas expressément étendu à la contribution sociale généralisée portant sur les revenus mentionnés au I et II de l'article 1600-0 C les dispositions relatives à la solidarité alors prévue entre époux et spécifiquement pour l'impôt sur le revenu par le 2 précité de l'article 1685 du code général des impôts ; qu'il suit de là qu'en jugeant que Mme A... était tenue, en vertu des dispositions combinées des articles 1600-0 C et 1685 du code général des impôts, au paiement solidaire des cotisations supplémentaires de contributions sociales dont le recouvrement était poursuivi, alors que celles-ci avaient été établies sur des revenus d'origine indéterminée perçus par M. A..., la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que dès lors, son arrêt doit être annulé en tant qu'il rejette les conclusions en décharge de l'obligation de payer les sommes dues au titre des cotisations supplémentaires de contributions sociales de l'année 2003 et la majoration pour retard de paiement dont elles sont assorties ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme A... ne pouvait être poursuivie en paiement solidaire de la contribution sociale généralisée dont le recouvrement était poursuivi par l'administration au titre de l'année 2003, et de la majoration correspondante ; qu'il en est de même, ces impositions étant assises sur les revenus d'origine indéterminée perçus par M. A...en 2003, du paiement de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, à laquelle s'appliquent, en vertu de l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, les dispositions du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale rédigées dans les mêmes termes que le III précité de l'article 1600-0 C du code général des impôts, et du paiement du prélèvement social prévu par l'article 1600-0 F bis de ce code, dont les dispositions renvoient au même III de l'article 1600-0 C, ainsi que, par voie de conséquence, des majorations pour retard de paiement dont les cotisations supplémentaires ont été assorties ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions en décharge de l'obligation de payer les sommes dues au titre des cotisations supplémentaires de contributions sociales de l'année 2003 et les majorations correspondantes ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à Mme A..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 5 juin 2009 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de Mme A... tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme due au titre des cotisations supplémentaires de contributions sociales de l'année 2003 et les majorations correspondantes.

Article 2 : Mme A... est déchargée de l'obligation de payer la somme due au titre des cotisations supplémentaires de contributions sociales de l'année 2003 et les majorations correspondantes.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 6 novembre 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Mme A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme C... A...et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 336492
Date de la décision : 10/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RECOUVREMENT - PAIEMENT DE L'IMPÔT - SOLIDARITÉ ENTRE ÉPOUX - CHAMP D'APPLICATION - EXCLUSION - CSG SUR LES REVENUS DU PATRIMOINE.

19-01-05-02-01 En vertu du III de l'article 1600-0 C du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2006, la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du patrimoine « est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu ». En renvoyant ainsi de façon générale aux règles de recouvrement applicables à l'impôt sur le revenu, le législateur n'a pas expressément étendu à cette contribution les dispositions relatives à la solidarité prévue entre époux et spécifiquement pour l'impôt sur le revenu par le 2 de l'article 1685 du code général des impôts.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - CSG SUR LES REVENUS DU PATRIMOINE - PAIEMENT - SOLIDARITÉ ENTRE ÉPOUX - ABSENCE.

19-04 En vertu du III de l'article 1600-0 C du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2006, la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du patrimoine « est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu ». En renvoyant ainsi de façon générale aux règles de recouvrement applicables à l'impôt sur le revenu, le législateur n'a pas expressément étendu à cette contribution les dispositions relatives à la solidarité prévue entre époux et spécifiquement pour l'impôt sur le revenu par le 2 de l'article 1685 du code général des impôts.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2012, n° 336492
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Matthieu Schlesinger
Rapporteur public ?: Mme Claire Legras
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:336492.20120710
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award