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13/07/2012 | FRANCE | N°348654

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 13 juillet 2012, 348654


Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 20 avril, 9 juin et 29 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Batipro logement intermédiaire, dont le siège est 190 rue des Deux Canons à Sainte-Clotilde (97490) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0800237 du 10 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis, avant de statuer sur les conclusions de sa demande tendant à la réduction de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laq

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Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 20 avril, 9 juin et 29 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Batipro logement intermédiaire, dont le siège est 190 rue des Deux Canons à Sainte-Clotilde (97490) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0800237 du 10 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis, avant de statuer sur les conclusions de sa demande tendant à la réduction de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2006, a ordonné un supplément d'instruction à l'effet de procéder à l'évaluation par voie d'appréciation directe de la valeur locative des immeubles à usage d'habitation composant la résidence Paradisier dont elle est propriétaire sur le territoire de la commune de Sainte-Marie (Réunion) ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande, ou, à titre subsidiaire, d'ordonner un supplément d'instruction aux fins de rechercher des locaux de référence pouvant être retenus comme termes de comparaison ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de la société Batipro logement intermédiaire,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Defrenois, Levis, avocat de la société Batipro logement intermédiaire ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration a, au titre de l'année 2006, évalué, selon la méthode par comparaison prévue à l'article 1496 du code général des impôts, la valeur locative des immeubles à usage d'habitation composant la résidence Paradisier dont la société Batipro logement intermédiaire est propriétaire à Sainte-Marie (Réunion), en retenant un local de référence figurant au procès-verbal des opérations de révision des évaluations foncières de cette commune ; que la société a contesté la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie en application de cette méthode ; qu'elle se pourvoit en cassation contre le jugement avant-dire droit du 11 février 2011 par lequel, après avoir écarté le nouveau local de référence proposé par l'administration au cours de l'instance contentieuse, le tribunal administratif de Saint-Denis a ordonné un nouveau supplément d'instruction afin de procéder à l'évaluation par voie d'appréciation directe de la valeur locative de cette résidence sur le fondement du 3° de l'article 1498 du code général des impôts ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision du 6 juin 2012, postérieure à l'introduction du pourvoi, l'administration a prononcé le dégrèvement de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties en litige à concurrence de la somme de 1 391 euros ; que, par suite, les conclusions du pourvoi sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le surplus des conclusions du pourvoi :

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions du I de l'article 1496 du code général des impôts, la valeur locative des locaux affectés à l'habitation est déterminée par comparaison avec celle de locaux de référence choisis, dans la commune, pour chaque nature et catégorie de locaux ;

Considérant, en deuxième lieu, que, selon l'article 1497 du même code, par dérogation à la méthode d'évaluation prévue au I de l'article 1496, les locaux d'habitation qui présentent un caractère exceptionnel sont évalués dans les conditions prévues à l'article 1498 ; que, pour l'application de l'article 1497, présente un caractère exceptionnel le local d'habitation qui ne peut être comparé, compte tenu de ses caractéristiques et eu égard à sa nature ainsi qu'à la catégorie dont il relève, à aucun local de référence situé dans la commune ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu du 2° de l'article 1498 du même code, la valeur locative d'un bien, qui n'est pas donné en location, est déterminée par comparaison et, dans le cas où il présente un caractère exceptionnel, le terme de comparaison peut être choisi en dehors de la commune pour procéder à son évaluation ; que ce n'est qu'à défaut d'un tel terme de comparaison que l'administration est fondée, en application du 3° du même article, à déterminer la valeur locative de ce bien par voie d'appréciation directe ;

Considérant qu'après avoir relevé que le local de référence n° 21 du procès-verbal des opérations de révision foncière de la commune de Sainte-Marie, retenu initialement par l'administration, avait changé de destination avant l'année d'imposition en litige et constaté que les parties ne proposaient aucun autre terme de comparaison, le tribunal administratif a ordonné, par un jugement avant-dire droit du 5 mars 2009, un supplément d'instruction aux fins pour l'administration de produire les éléments de nature à établir que l'immeuble à évaluer était comparable à ce local et, à défaut, de rechercher un autre local de référence pouvant être retenu comme terme de comparaison en application de l'article 1496 du code général des impôts ; qu'après avoir écarté le nouveau local de référence n° 30 proposé par l'administration, en exécution de ce jugement, le tribunal a jugé qu'il y avait lieu de procéder à l'évaluation de la valeur locative de l'immeuble par voie d'appréciation directe en application du 3° de l'article 1498 du même code et a ordonné un nouveau supplément d'instruction ;

Considérant, d'une part, qu'en statuant ainsi, sans se prononcer préalablement sur la question de savoir si l'immeuble présentait un caractère exceptionnel au sens de l'article 1497 du code général des impôts, alors qu'il ne ressort pas du dossier qui lui était soumis que les parties avaient exprimé leur accord sur son caractère exceptionnel et que la mise en oeuvre de la méthode par comparaison ou, à défaut, de la méthode par voie d'appréciation directe, prévue à l'article 1498 de ce code est subordonnée à cette qualification, le tribunal a commis une erreur de droit ;

Considérant, d'autre part, que le tribunal a également commis une erreur de droit en ordonnant un supplément d'instruction limité à l'application de la méthode d'appréciation directe prévue au 3° de l'article 1498 de ce code et en ne prévoyant pas, antérieurement, de le faire porter sur l'application de la méthode par comparaison prévue au 2° du même article, alors que cette méthode doit être mise en oeuvre de manière prioritaire et qu'il n'était pas soutenu par les parties que, sur ce fondement, aucun terme de comparaison ne pouvait être identifié ;

Considérant que la société Batipro logement intermédiaire est, par suite, fondée à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Batipro logement intermédiaire au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de la société Batipro logement intermédiaire à concurrence de la somme de 1 391 euros dégrevée en cours d'instance.

Article 2 : Le jugement du 10 février 2011 du tribunal administratif de Saint-Denis est annulé en tant qu'il concerne le surplus des impositions restant en litige.

Article 3 : L'affaire est, dans la même limite, renvoyée au tribunal administratif de Saint-Denis.

Article 4 : L'Etat versera à la société Batipro logement intermédiaire la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Batipro logement intermédiaire et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 348654
Date de la décision : 13/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2012, n° 348654
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bernard Stirn
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:348654.20120713
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