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30/07/2014 | FRANCE | N°369148

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 30 juillet 2014, 369148


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 26 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais, dont le siège est à La Fosse aux Loups, rue Victor Gressier, BP 80091, à Saint-Laurent-Blangy Cedex (62053), représentée par son président ; la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 8 avril 2013 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 26 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais, dont le siège est à La Fosse aux Loups, rue Victor Gressier, BP 80091, à Saint-Laurent-Blangy Cedex (62053), représentée par son président ; la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 8 avril 2013 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a rejeté sa demande tendant à l'abrogation du décret n° 2012-1492 du 27 décembre 2012 relatif à la trame verte et bleue, ainsi que ce décret ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Justine Lieber, maître des requetes,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais, de la fédération départementale des chasseurs de Loire-Atlantique et de la fédération départementale des chasseurs de Seine-Maritime ;

Sur les interventions de la fédération départementale des chasseurs de Loire-Atlantique et de la fédération départementale des chasseurs de Seine-Maritime :

1. Considérant que la fédération départementale des chasseurs de Loire-Atlantique et la fédération départementale des chasseurs de Seine-Maritime ont intérêt à l'annulation des décisions attaquées ; qu'ainsi, leur intervention est recevable ;

Sur les décisions attaquées, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions de la requête en tant qu'elle concerne le décret du 27 décembre 2012 :

2. Considérant que le décret du 27 décembre 2012 relatif à la trame verte et bleue a pour objet de préciser les conditions d'application des articles L. 371-1 à L. 371-6 du code de l'environnement, créés par la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, relatifs à la trame verte et bleue ; que, par une décision du 8 avril 2013, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a rejeté la demande de la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais tendant à l'abrogation des articles R. 371-25 et R. 371-26 du code de l'environnement, tels qu'ils résultent de ce décret ; que, par le présent recours, la fédération requérante demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision de rejet ainsi que de ce décret ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : " Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution " ; que le décret attaqué n'appelle aucune mesure d'exécution que le ministre de l'agriculture aurait compétence pour signer ou contresigner ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que ce ministre aurait dû contresigner le décret attaqué doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 371-1 du code de l'environnement : " I - La trame verte et la trame bleue ont pour objectif d'enrayer la perte de biodiversité en participant à la préservation, à la gestion et à la remise en bon état des milieux nécessaires aux continuités écologiques, tout en prenant en compte les activités humaines, et notamment agricoles, en milieu rural " ; qu'aux termes de l'article L. 371-3 du même code : " Un document-cadre intitulé " Schéma régional de cohérence écologique " est élaboré, mis à jour et suivi conjointement par la région et l'Etat en association avec un comité régional " trames verte et bleue " créé dans chaque région. (...) / Le schéma régional de cohérence écologique prend en compte les orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques mentionnées à l'article L. 371-2 ainsi que les éléments pertinents des schémas directeurs d'aménagement et de gestion de l'eau mentionnés à l'article L. 212-1. (...) / Le schéma régional de cohérence écologique, fondé en particulier sur les connaissances scientifiques disponibles, l'inventaire national du patrimoine naturel et les inventaires locaux et régionaux mentionnés à l'article L. 411-5 du présent code, des avis d'experts et du conseil scientifique régional du patrimoine naturel, comprend notamment, outre un résumé non technique : / a) Une présentation et une analyse des enjeux régionaux relatifs à la préservation et à la remise en bon état des continuités écologiques ; / b) Un volet identifiant les espaces naturels, les corridors écologiques, ainsi que les cours d'eau, parties de cours d'eau, canaux ou zones humides mentionnés respectivement aux 1° et 2° du II et aux 2° et 3° du III de l'article L. 371-1 ; / c) Une cartographie comportant la trame verte et la trame bleue mentionnées à l'article L. 371-1 ; / d) Les mesures contractuelles permettant, de façon privilégiée, d'assurer la préservation et, en tant que de besoin, la remise en bon état de la fonctionnalité des continuités écologiques ; / e) Les mesures prévues pour accompagner la mise en oeuvre des continuités écologiques pour les communes concernées par le projet de schéma (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 371-25 du même code, dans sa rédaction issue du décret attaqué : " Le schéma régional de cohérence écologique, conformément à l'article L. 371-3, comporte notamment : / - un diagnostic du territoire régional et une présentation des enjeux relatifs à la préservation et à la remise en bon état des continuités écologiques à l'échelle régionale ; / - un volet présentant les continuités écologiques retenues pour constituer la trame verte et bleue régionale et identifiant les réservoirs de biodiversité et les corridors qu'elles comprennent ; / - un plan d'action stratégique ; / - un atlas cartographique ; / - un dispositif de suivi et d'évaluation ; / - un résumé non technique. / Le contenu de ces composantes est précisé par les articles R. 371-26 à R. 371-31 et prend en compte les indications et recommandations du volet relatif à l'élaboration du schéma régional de cohérence écologique du document-cadre adopté en application de l'article L. 371-2 " ; qu'aux termes de l'article R. 371-26 du même code, dans sa rédaction issue du décret attaqué : " I. - Le diagnostic du territoire régional porte, d'une part, sur la biodiversité du territoire, en particulier les continuités écologiques identifiées à l'échelle régionale, et, d'autre part, sur les interactions entre la biodiversité et les activités humaines. / II. - Les enjeux relatifs à la préservation et à la remise en bon état des continuités écologiques traduisent les atouts du territoire régional en termes de continuités écologiques, les menaces pesant sur celles-ci, ainsi que les avantages procurés par ces continuités pour le territoire et les activités qu'il abrite. Les enjeux régionaux sont hiérarchisés et spatialisés et intègrent ceux partagés avec les territoires limitrophes " ;

5. Considérant que la fédération requérante soutient que les dispositions du décret attaqué citées ci-dessus méconnaissent le premier alinéa de l'article L. 371-1 du code de l'environnement dans la mesure où les schémas régionaux de cohérence écologique, dont elles ont pour objet de préciser le contenu, ne prennent pas suffisamment en compte les activités humaines, notamment agricoles, en milieu rural ; que, d'une part, les dispositions de l'article L. 371-3 ont défini le contenu des schémas régionaux de cohérence écologique et la procédure selon laquelle ceux-ci sont élaborés ; que la fédération requérante n'est pas recevable à contester ces dispositions législatives, en dehors de la procédure prévue par l'article 61-1 de la Constitution ; que, d'autre part, l'article R. 371-26 du code de l'environnement issu du décret attaqué, qui prévoit que le diagnostic du territoire régional que comprend, en vertu de l'article R. 371-25 du même code, le schéma régional de cohérence écologique, porte notamment sur les interactions entre la biodiversité et les activités humaines, ne méconnaît pas les dispositions du premier alinéa de l'article L. 371-1 du code de l'environnement ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Charte de l'environnement : " Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social " ; que lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise en oeuvre de ces principes, il n'appartient au juge administratif, au vu de l'argumentation dont il est saisi, de vérifier si les mesures prises pour leur application ne les ont pas méconnus, que dans la mesure où ces mesures d'application ne se bornent pas à tirer les conséquences nécessaires de la loi qu'elles ont pour objet de mettre en oeuvre ; qu'en l'espèce, les dispositions réglementaires critiquées se bornent à mettre en oeuvre les articles L. 371-1 et suivants du code de l'environnement ; que, par suite, la fédération requérante ne peut utilement soutenir que les articles R. 371-25 et R. 371-26 du code de l'environnement, tels qu'ils résultent du décret attaqué, méconnaissent l'article 6 de la Charte de l'environnement ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions qu'elle attaque ; que sa requête doit, par suite, être rejetée ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les interventions de la fédération départementale des chasseurs de Loire-Atlantique et de la fédération départementale des chasseurs de Seine-Maritime sont admises.

Article 2 : La requête de la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais, à la fédération départementale des chasseurs de Loire-Atlantique, à la fédération départementale des chasseurs de Seine-Maritime, au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 369148
Date de la décision : 30/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2014, n° 369148
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:369148.20140730
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