La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/07/2014 | FRANCE | N°376802

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 30 juillet 2014, 376802


Vu 1°, sous le n°376802, la requête, enregistrée le 28 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la communauté de communes du Pays de Salers, dont le siège est place du Château à Salers (15140) ; la communauté de communes du Pays de Salers demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-149 du 13 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Cantal ;

Vu 2°, sous le n°378162, la requête, enregistrée le 17 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M.

A... B..., demeurant à... ; M. B...demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour ...

Vu 1°, sous le n°376802, la requête, enregistrée le 28 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la communauté de communes du Pays de Salers, dont le siège est place du Château à Salers (15140) ; la communauté de communes du Pays de Salers demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-149 du 13 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Cantal ;

Vu 2°, sous le n°378162, la requête, enregistrée le 17 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. A... B..., demeurant à... ; M. B...demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-149 du 13 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Cantal ;

....................................................................................

Vu 3°, sous le n°379401, la requête, enregistrée le 22 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de La Roquebrou (15150) ; la commune de La Roquebrou demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-149 du 13 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Cantal ;

....................................................................................

Vu 4°, sous le n°379660, la requête, enregistrée le 5 mai 2014, présentée par M. C...D..., demeurant... ; M. D...demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-149 du 13 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Cantal ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 ;

Vu la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 ;

Vu le décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article R. 611-8 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles Touboul, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 191-1 du code électoral, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " Le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair. / Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " I. - Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil départemental qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. / II. - La qualité de chef-lieu de canton est maintenue aux communes qui la perdent dans le cadre d'une modification des limites territoriales des cantons, prévue au I, jusqu'au prochain renouvellement général des conseils départementaux. / III. - La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes : / a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ; / b) Le territoire de chaque canton est continu ; / c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants ; / IV. - Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d'autres impératifs d'intérêt général " ;

4. Considérant que le décret attaqué a, en application de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, procédé à une nouvelle délimitation des cantons du département du Cantal, compte tenu de l'exigence de réduction du nombre des cantons de ce département de 27 à 15 résultant de l'article L. 191-1 du code électoral ;

Sur le décret du 13 février 2014 :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales se bornent à prévoir la consultation du conseil général du département concerné à l'occasion de l'opération de création et de suppression de cantons ; que ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ou réglementaire non plus qu'aucun principe n'imposent que la modification de la délimitation des cantons soit précédée de la consultation des communes ou des populations intéressées ; que, dès lors, les requérants ne sauraient utilement soutenir que le décret litigieux serait illégal en raison de l'insuffisance de la concertation conduite ou de l'insuffisante prise en considération des observations formulées à cette occasion ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'instance dont une disposition législative ou réglementaire prévoit la consultation avant l'intervention d'une décision doit être mise à même d'exprimer son avis sur l'ensemble des questions soulevées par cette décision ; que, si la délimitation territoriale des cantons du département du Cantal figurant dans le décret adopté n'est pas en tous points identique à celle qui était prévue dans le projet soumis pour avis au conseil général, il ressort des pièces du dossier que celui-ci a été saisi de l'ensemble des questions soulevées par le projet, qui tendait à définir une nouvelle délimitation de l'ensemble des cantons du département ; que les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que le conseil général aurait dû être consulté une nouvelle fois, compte tenu des modifications apportées au projet après sa consultation initiale ; que s'il est également soutenu que la consultation du conseil général ne s'est pas déroulée dans des conditions régulières, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien fondé ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au pouvoir réglementaire de se conformer à l'avis rendu par le conseil général ;

7. Considérant enfin qu'aucune disposition de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ni aucun autre texte n'imposait au pouvoir réglementaire de motiver le décret attaqué ;

En ce qui concerne la légalité interne :

8. Considérant qu'il résulte des dispositions des III et IV de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales citées au point 3 que le territoire de chaque canton doit être établi sur des bases essentiellement démographiques, qu'il doit être continu et que toute commune de moins de 3 500 habitants doit être entièrement comprise dans un même canton, des exceptions de portée limitée et spécialement justifiées au cas par cas pouvant toutefois être apportées à ces règles ;

9. Considérant, en premier lieu, que ni ces dispositions, ni aucun autre texte non plus qu'aucun principe n'imposent au pouvoir réglementaire de prévoir que les limites des cantons, qui sont des circonscriptions électorales, coïncident avec les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale existants ou en projet dans le cadre d'un schéma départemental de coopération intercommunale, les limites des " bassins de vie " définis par l'Institut national de la statistique et des études économiques ou celles des anciens cantons ; que, dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance du schéma départemental de coopération intercommunale, de l'absence de prise en compte du périmètre des communautés de communes existantes et des " bassins de vie " et de ce que d'anciens cantons ont été morcelés entre plusieurs nouveaux cantons doivent être écartés ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que le décret attaqué a procédé à la délimitation des quinze nouveaux cantons du département du Cantal en se fondant sur une population moyenne et en rapprochant la population de chaque canton de cette moyenne ; que, dès lors que les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales n'ont pas été méconnues, les requérants ne peuvent utilement soutenir que les zones rurales seraient, du fait de la mise en oeuvre de ces règles, moins bien représentées que les zones urbaines au sein de l'assemblée départementale, ni que les spécificités de l'organisation sociale en zone rurale, la géographie ou la topographie spécifiques aux zones de montagne, l'histoire ou l'attractivité touristique de certains territoires auraient été méconnues ; que les moyens tirés de ce que la délimitation retenue ne reposerait sur aucun critère objectif, serait arbitraire et étrangère à l'intérêt général ou conduirait à augmenter le nombre d'élus pour un même territoire sont également inopérants ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les choix opérés par le décret attaqué dans les rattachements qu'il opère des communes du Falgoux, du Vaulmier, de Saint-Vincent de Salers, de Saint-Chamant, de Saint-Projet de Salers et de Teissières lès Bouliès, ainsi que des communes qui sont regroupées au sein des communautés de communes du Pays de Salers, du Pays de Monsalvy, du Pays de Saint-Flour, du Pays de Pierrefort-Neuvéglise, du Pays de Mauriac et de la communauté d'agglomération du Bassin d'Aurillac ou encore dans la délimitation du canton de Neuvéglise seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation ; que n'est pas plus constitutive d'une erreur manifeste d'appréciation la circonstance que le pouvoir réglementaire, en édictant le décret attaqué, n'aurait pas davantage usé de la marge d'appréciation dont il disposait pour mettre en oeuvre les critères mentionnés au III de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, ou bien pour y déroger en vertu du IV du même article ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que, d'une part, le paragraphe II de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales a maintenu jusqu'au prochain renouvellement général des conseils départementaux les chefs-lieux de canton existants ; que, d'autre part, le décret attaqué s'est borné, en application du décret du 18 octobre 2013 portant application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral, à désigner pour chaque nouveau canton un bureau centralisateur des résultats électoraux, notion qui est distincte de celle de chef-lieu de canton ; que le décret attaqué n'a dès lors, par lui-même, ni pour objet ni pour effet de faire perdre cette qualité aux actuels chefs-lieux de canton ; que, par suite, les moyens tirés de l'illégalité du décret attaqué en raison des conséquences de la perte de cette qualité pour les communes chefs-lieux de canton qui n'ont pas été désignées comme bureaux centralisateurs ne peuvent qu'être écartés ;

13. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la désignation de la commune de Saint-Paul-des-Landes comme bureau centralisateur du canton du canton n°13 serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

14. Considérant enfin que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur le décret du 19 mars 2014 :

15. Considérant que l'unique modification introduite par le décret du 19 mars 2014 au décret du 13 février 2014 portant révision de la carte cantonale du département du Cantal consiste à remplacer au 2° de l'article 12 de ce décret relatif au canton n° 11 (Saint-Flour 1) les mots : " à l'ouest " par les mots : " à l'est " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil général a été mis à même de donner un avis sur l'ensemble des questions liées à la nouvelle délimitation des cantons du département, y compris le canton n° 11 ; que l'erreur ainsi rectifiée revêtait un caractère purement matériel ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret serait illégal au motif qu'il aurait substantiellement modifié la nouvelle délimitation des cantons du département du Cantal manque en fait ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, que les requêtes doivent être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de la communauté de communes du Pays de Salers et autres sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la communauté de communes du Pays de Salers, à M. A...B..., à la commune de La Roquebrou, à M. C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 376802
Date de la décision : 30/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2014, n° 376802
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Charles Touboul
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:376802.20140730
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award